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Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française

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RAOUL SALAN (ROQUECOURBE, 1899-PARIS, 1984)

Le «militaire le plus décoré de France ». C’est par cette périphrase que l’on

désigne souvent le général Salan dont la carrière commence à Saint-Cyr en 1917

et sur les champs de bataille du secteur de Verdun en 1918. Après la guerre,

il sert en Allemagne, au Levant (où il est grièvement blessé) et surtout en

Indochine où il se fait affecter en 1924. A l’exception de courts intermèdes,

il ne la quittera plus jusqu’en 1937. Il rejoint alors le ministère des Colonies

et son service de renseignement intercolonial, en lien étroit avec Georges

Mandel, titulaire du portefeuille. A la tête d’un bataillon de tirailleurs

sénégalais, il se bat courageusement durant les combats de 1940. Replié

à Vichy, il est affecté en Afrique occidentale en 1942. Nommé colonel,

il gagne Alger à l’été 1943. A la tête du 6 e régiment de tirailleurs sénégalais,

il joue un rôle majeur dans la libération de Toulon en août 1944, participe

aux combats d’Alsace, puis décroche ses étoiles de général. L’Allemagne

à peine vaincue, il retourne en Indochine avec Leclerc. Initialement

proche de Hô Chi Minh et de Giap, après l’échec de la

conférence de Fontainebleau (1946), il combat sans merci le

Viêt-minh. Au plus haut niveau, le général Salan est l’artisan

de faits d’armes majeurs (batailles de Vinh Yen et Nghia Lo

en 1951, défense de Na San en 1952…). Après Diên Biên

Phu, il est l’adjoint du général Ely en Indochine jusqu’en

octobre 1954. C’est lui qui dirige la «rétractation » des forces dans le

delta du fleuve Rouge

et l’évacuation de Hanoï. De retour en métropole, il y reste deux ans avant de prendre le commandement

des forces en Algérie à la fin de l’année 1956. Peu après sa prise de fonction, réputé «bradeur de l’Indochine »,

il échappe à un attentat au bazooka perpétré par les «ultras ». Artisan majeur du retour au pouvoir du général

De Gaulle en mai 1958, il est vite écarté des responsabilités et quitte le service actif en juin 1960. En octobre

de la même année, il affiche son refus d’abandonner l’Algérie française et part en exil en Espagne. Il est de retour

à Alger pour le putsch d’avril 1961 et prend la direction de l’OAS après son échec. Il est arrêté le 20 avril 1962 et

échappe de justesse à la condamnation à mort. Détenu à la prison de Tulle, il en est le dernier libéré en juin 1968.

EDMOND JOUHAUD (BOU-SFER, 1905-ROYAN, 1995)

«Ma famille est originaire d’Algérie. Je suis le cadet. (…) actuellement, dans les cimetières d’Oran, d’Aïn-

Turk et de Bou-Sfer, reposent mes grands-parents, mes parents, deux frères, deux sœurs et déjà une nièce.

Ces quelques mètres carrés que je possède dans les cimetières d’Algérie, c’est le seul patrimoine que

je possède sur ma terre natale. Ce que j’ai défendu et ce que je défends, ce sont d’abord des mètres carrés

de cimetières. » Cette déclaration du général Jouhaud devant le Haut Tribunal militaire, le 11 avril 1962,

explique les raisons viscérales qui l’ont conduit à se joindre à la révolte des généraux un an auparavant.

Rien dans le parcours de cet homme n’annonçait pourtant un tropisme quelconque pour les

pronunciamientos. Saint-Cyrien (promotion du Rif, 1924-1926), breveté pilote en 1928, il est tout

d’abord affecté en Afrique occidentale. Echappant aux Allemands en juin 1940, il parvient à gagner

l’Algérie et s’engage dans la Résistance à l’occasion de son affectation en métropole en 1942 : après

avoir tenté plusieurs fois de gagner l’Angleterre, il rejoint l’Organisation de résistance de l’armée (ORA)

dans le Bordelais, et devient chef d’état-major FFI de la région. Nommé général de brigade en 1949,

puis de division en 1954, il est marqué par l’abandon des populations tonkinoises après le drame

de Diên Biên Phu, alors qu’il vient d’être nommé commandant de l’air en Extrême-Orient. Il enchaîne

ensuite les plus hautes fonctions militaires : major général de l’armée de l’air (1955), commandant

la 5 e région aérienne, qui comprend l’Algérie (1957), chef d’état-major de l’armée de l’air (1958) puis

inspecteur général de l’armée de l’air (1960). A ce dernier poste, il est tenu à dessein à l’écart

de l’Algérie. Après l’échec du putsch d’Alger, il entre en clandestinité et prend la tête de l’OAS à Oran.

Arrêté le 25 mars 1962, condamné à mort le 13 avril suivant, il passe deux cent vingt-neuf jours

à attendre son exécution. Sa peine est commuée en détention criminelle à perpétuité et il est incarcéré

à la prison de Tulle, d’où il sera libéré en 1967.

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