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Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française

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En quoi la guerre

civile interalgérienne

a-t-elle consisté ?

Mostefaï a garanti la participation future des Européens aux

«forcesalgériennesdumaintiendel’ordre»etleprinciped’une

amnistie qui « fera, à dater de ce jour, table rase du passé ».

Il est cependant beaucoup trop tard, même si, depuis sa cellule,

Salan a appuyé Susini. De nombreux éléments du FLN ne

reconnaissent en rien cet « accord » qui est vilipendé par Pérez,

passéenEspagne,etsurtoutparl’OASoranaise.Cettedernière

espère encore mettre sur pied une partition d’un nouveau style,

des « plateformes territoriales » où seraient regroupés les Européensetlesmusulmansfavorablesàla

France.Deleurcôté,les

autorités, sous l’égide du général Katz, entendent opérer le

«bouclage»desquartierseuropéensetlesreprendreenmainen

multipliant les contrôles, qui s’accompagnent d’arrestations

massivesetexaspèrentles200000Européensd’Oran.Aulendemain

du 17 juin, l’OAS locale proclame donc que la lutte

continue. Le désaveu par Salan des projets de plateformes

brise les énergies, mais l’impasse de négociations avec les

autorités provoque encore des plasticages et des opérations

spectaculaires, comme l’incendie du port d’Oran.

Le28juin1962,Micheletti,chefdel’OASoranaise,s’adresse

pour la dernière fois à la population pour acter l’échec final de

l’idée de « ménager ici le réduit qui sauverait peut-être l’Occident

» et proclamer « l’Algérie morte ». Le lendemain, les dirigeants

et commandos de l’OAS quittent la ville, tandis que

les départs des Européens se font massifs à la veille de l’indépendance.

Leur tragédie n’est pas finie et culmine à l’occasion

de la fusillade du 5 juillet à Oran, ce massacre longtemps

« oublié », dont les conséquences, marquées par une recrudescence

des enlèvements et des disparitions, précipitent

l’exode définitif des Français d’Algérie, qui furent 800 000 à

franchir la Méditerranée en 1962.

LA VALISE

OU LE CERCUEIL

Ci-contre : des

rapatriés d’Algérie

attendant

de pouvoir

débarquer de leur

bateau arrivé

dans le port de

Marseille, en 1962.

Pris entre les

attentats de l’OAS

et les représailles

et enlèvements

du FLN, les civils

européens

d’Algérie terrorisés

quittèrent

massivement

le sol algérien

à partir du

printemps 1962.

Conclu par un succès écrasant

du «oui » et la reconnaissance par

la France du nouvel Etat algérien le

3 juillet, le référendum du 1 er juillet 1962

en Algérie ouvre en principe le pouvoir

au GPRA. Sur le papier, il est le dépositaire

de la souveraineté algérienne jusqu’à

l’élection d’une Assemblée nationale

constituante. De fait, le 3 juillet, Farès,

le patron de l’Exécutif provisoire, a remis

sa démission à Ben Khedda, président

du GPRA, qui est triomphalement entré

dans Alger. Celui-ci est cependant

contesté aussi bien par l’état-major de

l’ALN de Boumediene que par le bureau

politique du FLN (Ben Bella), qui souhaite

voir Farès demeurer en fonction.

S’ouvre alors en Algérie, lors des trois

mois suivants, une ère d’affrontements

violents, souvent qualifiée de guerre civile.

Elle oppose le clan benbelliste, appuyé

sur l’ALN extérieure et certaines wilayas

(circonscriptions territoriales de l’ALN)

de l’intérieur, au GPRA, soutenu

par d’autres wilayas et des fédérations

extérieures du FLN, dont la fédération

de France. Le combat livré est loin d’être

seulement politique car il met aussi aux

prises des clans militaires bien délimités.

Trois mois durant, malgré les efforts

du syndicat UGTA qui proclame

«Sept ans, c’est assez ! », les deux factions

se livrent à une lutte féroce.

L’été 1962 en Algérie mêle donc anarchie,

guerre civile et difficultés économiques.

La paix n’est pas au rendez-vous et l’unité

tant vantée par les nationalistes vole en

éclats au sommet. On constate également

la prolifération de groupes armés se

réclamant, à tort ou à raison, de l’ALN. Une

telle absence d’autorité reconnue obère

encore davantage le respect des garanties

des accords d’Evian, déjà mises à mal

durant les mois de transition de mars à

juillet, sans oublier l’engagement de «nonreprésailles

» pris par le GPRAà Bâle le

9 novembre 1961. L’heure est en effet aux

65

h

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