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Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

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forme manifeste: le rhéteur ni le politicien ou le journaliste ne font constamment de<br />

syllogismes en trois points. Mais encore on ne persuade pas seulement avec des enthymèmes,<br />

c’est à dire avec des énoncés qui peuvent être connus dans le système culturel comme les<br />

conclusions de syllogismes implicites inscrits dans l’interdiscursivité.<br />

Les faits de raisonnement et d’argumentation, justement parce qu’ils sont centraux,<br />

s’enclenchent sur la totalité des opérations linguistiques, discursives, cognitives, et<br />

interdiscursives par lesquelles du sens se produit dans un texte. Pas de rhétorique sans<br />

topique, c’est à dire en termes modernes sans une histoire du discours social, de la<br />

production historico-sociale du probable, de l’opinable et du vraisemblable. Pas de<br />

rhétorique ni de dialectique sans analyse de la réalisation en langage du présuppositionnel<br />

comme de l’inférable et autres implicitations. Pas de rhétorique ni de dialectique séparables<br />

d’une narratologie et d’une sémiotique du descriptif et plus généralement des<br />

schématisations qui sous-tendent le discours et que le discours manifeste en énoncés. C’est<br />

dans le co-occurence du descriptif, du narratif et de l’argumentatif que s’enclenchent les<br />

mécanismes de déduction et d’induction mais aussi (en suivant Peirce et Eco) de l’abduction<br />

à l’origine de tout processus intellectuel puisqu’il s’agit de «cadrer» des faits hétérogènes en<br />

une co-intelligibilité d’ordre homothétique, paradigmatique ou séquentielle.<br />

Enfin, la dialectique (au sens d’Aristote) est dialogique: l’énonciateur se construit un<br />

destinataire, mais aussi des adversaires, des témoins, des autorités, des objecteurs et des<br />

interlocuteurs... Tout débat d’idées suppose non un espace vide où construire une<br />

démonstration, mais l’intervention dans un discours social saturé, cacophonique, plein<br />

d’idées à la mode, de préjugés, de platitudes et de paradoxes, où tous les arguments possibles<br />

sont déjà utilisés, marqués, interférés et parasités. Si, comme le pose M. Van Schendel,<br />

"l’idéologème est un quasi-argument", on peut retourner la formule en rappelant que tout<br />

argument est un idéologème, un énoncé qui recèle des marques et des enjeux sociaux; même<br />

les topoï quasi-universels du type Is fecit cui prodest varient culturellement dans l’usage qui<br />

peut en être fait, dans les contraintes qui règlent leur invocation et leur acceptabilité. Les<br />

topoï des pragmaticiens, -- Anscombre, Ducrot, Berendonner et al., -- sont des faits<br />

socio-discursifs, mais isolés par des linguistes peu soucieux de s’aventurer dans la jungle<br />

idéologique, choisis banaux et "innocents" et réduits à des schémas formels.<br />

Georges Vignaux, dès ses premiers travaux de théorie du discours a développé des<br />

concepts (schématisation, présentation, «micro-monde») qui visaient à intégrer pleinement<br />

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