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Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

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Dans ses Nouveaux et moins nouveaux visages de la censure (1994), Jean-Jacques Pauvert montre<br />

la confusion entretenue par les esprits autoritaires et conservateurs autour de la notion de<br />

censure. Il suffit de définir la censure, comme le fait d’ailleurs trop restrictivement le Grand<br />

Robert, comme un «examen préalable exigé par les autorités» pour que les lois à posteriori<br />

dont je viens de parler, les règlements, interdictions d’exposition et de publicité,<br />

intimidations par menace de poursuite, coupures de budgets et de subventions à des artistes<br />

déviants et autres moyens enfin par lesquels textes et images, informations et imaginations<br />

ne circulent pas ou sont passibles de peines diverses, ne puissent être qualifiés de censure.<br />

Cette non-circulation devient une chose qui n’a pas de nom, un ensemble flou qui ne permet<br />

pas de mettre en cause l’existence en France par exemple d’une parfaite «liberté<br />

d’expression».<br />

Pauvert n’a pas tort: on ne peut qu’être frappé par le fait que, dans un pays caractérisé<br />

par les liens incestueux entre le journalisme et le pouvoir – où en tout cas une réflexion<br />

poussée sur l’autocensure serait de rigueur, – le mot de censure n’apparaît guère pour désigner<br />

quelque chose qui se passe en France; dans tout le texte rédactionnel du Monde en 1992-1993<br />

chaque fois que ce mot est attesté, c’est dans un contexte où il est fait état de choses qui se<br />

passent à l’étranger.<br />

Agacé par la casuistique de ces interdits de fait et de ces peines et représailles<br />

suspendues en épées de Damoclès sur les têtes des artistes, auteurs et éditeurs, qui ne seraient<br />

pas de la censure, Pauvert propose une définition large qui lui semble – et à moi aussi – celle<br />

que le grand public comprend et admet comme pertinente:<br />

Il y a censure lorsqu’un pouvoir quelconque empêche par un<br />

moyen quelconque, un ou plusieurs individus de s’exprimer<br />

librement par le procédé qu’ils ont choisi. 4<br />

Si l’on précise que ce «moyen quelconque» englobe tout ce qui relève de l’intimidation,<br />

de la pression et du harcèlement, – menaces de poursuites, chantage à l’emploi, ennuis directs<br />

et sérieux pour la carrière (celle du journaliste, de l’enseignant, de l’éditeur, de l’écrivain....),<br />

– alors il me semble que la définition est pertinemment englobante; dans le domaine dont<br />

4 p. 22.<br />

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