25.06.2013 Views

Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

jamais la grâce, parce qu’à demi-mort dans cette vie, je ne puis qu’espérer la vie éternelle.<br />

J’espère la vie éternelle parce que tout me manque sur cette route où je gis à moitié mort.<br />

Il est évident que cette lecture maximale ou simplement complète est produite dans<br />

le texte comme permise et inéluctable. L’accomplir c’est recevoir la foi. On voit ce qui<br />

légitime la lecture de type augustinien et ce qui rend absolument insuffisante tout lecture<br />

de type «moliniste». (Sans vouloir prendre position dans les débats théologiques!)<br />

*<br />

Il reste à montrer que ce modèle herméneutique marche comme une axiomatique générale<br />

du texte de Luc, malgré le caractère hétérogène de certains de ses passages.<br />

Tournons-nous vers une autre diégèse, elle aussi inlassablement interrogée: l’épisode<br />

de Marie-Magdeleine dont l’iconisation est si accomplie dans le texte qu’il s’est prêté à<br />

devenir le thème dominant de la peinture religieuse classique et baroque.<br />

Nous pourrons aller plus vite; il s’agit seulement de montrer que c’est la même affaire.<br />

«Un Pharisien pria Jésus de manger avec lui» (VIII,36). On connaît la scène, – l’arrivée<br />

muette de la prostituée de la ville, sa position aux pieds de Jésus, le parfum et les larmes, les<br />

réflexions intérieures du Pharisien Simon, la parabole de Jésus qui les devine:<br />

«Un créancier avait deux débiteurs, l’un devait 500 deniers et l’autre 50...» (41) Jésus<br />

adresse de vifs reproches à Simon et compare sa conduite avec la conduite de la pécheresse.<br />

2<br />

Puis, il y a cet acte inouï (car le réalisme, c’est aussi l’irruption de l’inouï, par la tactique<br />

inverse de la vraisemblance): le pardon des péchés, accompagné par les rumeurs<br />

d’indignation des participants, dont l’attitude antipathique à Jésus nous indique une fois<br />

encore où nous devons nous placer.<br />

2 Tout aussi inouï est évidemment, pour une mentalité ancienne, l’acte par lequel l’invité «engueule»<br />

littéralement son hôte en sachant qu’il lui est socialement interdit de répondre. Le lecteur ancien doit être<br />

soufflé de cette transgression de la sociabilité (tout cela pour une putain) et ne possède aucun argument<br />

pour justifier la conduite de Jésus. Il est donc à la fois poussé dans le texte vers le groupe des invités qui<br />

murmurent et tenté de leur échapper pour se rapprocher de Jésus, qui vient de reprocher à Simon de juger<br />

trop vite, ce que, lui lecteur, vient de manquer de faire à l’égard du héros de ces récits.<br />

172

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!