25.06.2013 Views

Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

Interventions critiques (Volume I) : Questions d ... - Marc Angenot

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Le féminisme pro-censure (désigné par ses adversaires comme le «fundamentalist<br />

20<br />

feminism », mais se désignant et se faisant reconnaître par beaucoup de «libéraux» comme<br />

un féminisme d’extrême-gauche, – «radical») a remporté de nombreuses «victoires» depuis<br />

cinq ou six ans, non seulement auprès de toutes les administrations universitaires du pays,<br />

mais aussi d’États et de municipalités qui ont voté des arrêtés et des lois banissant la<br />

«pornographie» et diverses formes d’expression susceptibles d’être interprétées par ses<br />

«victimes» comme relevant du «harcèlement sexuel» à leur égard. Certaines de ces mesures<br />

21<br />

légales, fondamentalement insoutenables, – «fatally flawed » au point de vue du droit<br />

américain, – ont cependant commencé à être cassées par les cours d’appel ou par la Cour<br />

suprême.<br />

Catharine McKinnon et Andrea Dworkin – «these obsessed moralistic women», comme<br />

22<br />

les qualifie fort à propos Camille Paglia – sont les deux doctrinaires en vue du féminisme<br />

anti-pornographique U.S. et l’art et la littérature sont des secteurs qu’elles ne considèrent<br />

certes pas immunisé ni protégé contre leur stalinisme victorien (Lolita de Nabokov n’est-il<br />

pas un roman pédophilique?) Elles identifient la pornographie à la société tout entière,<br />

suprématiste mâle et anti-femmes par nature. Toutes deux du reste soutiennent<br />

explicitement que l’hétérosexualité est, pour «les» femmes, une violence en soi ou une forme<br />

d’aliénation contre-nature: «Unambiguous conventional heterosexual behavior is the worst<br />

23<br />

betrayal of our common humanity», clame A. Dworkin . Il est difficile de répliquer à une<br />

rhétorique hyperbolique morbide qui identifie la production imprimée ou filmée de sexualité<br />

explicite au nazisme et au Ku-klux-klan et réclame pour elle les sanctions judiciaires qui<br />

s’appliquent à la «hate literature». Le plaidoyer de McKinnon qui est juriste, revient à poser<br />

que la pornographie ne saurait être protégée par la Constitution américaine sous la rubrique<br />

de la liberté de parole: la pornographie doit être en elle-même (et par ses effets directs)<br />

qualifiée de crime; elle n’est ni une idée, ni une fiction ni une représentation, elle est un acte<br />

délictueux. Elle n’est pas même le spectacle de la discrimination à l’égard des femmes, elle<br />

20 Susan Bright, «Better the Devil you Know», San Francisco Review of Books, Mai-juin 1993.<br />

21 Strossen, 1995, 59.<br />

22 Paglia, 1994, 107.<br />

23 Women Hating, New York: Dutton, 1984, 184.<br />

125

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!