invasions et transferts biologiques - Centre d'Océanologie de ...
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évoluer (Strauss <strong>et</strong> al., 2006). Quoi qu'il en soit, la mise en évi<strong>de</strong>nce d'une réponse évolutive<br />
ne signifie pas que l'évolution soit suffisante pour répondre au problème posé à l'espèce native.<br />
Le principe <strong>de</strong> l'Evolutionary enlightened management (qui ne concerne pas uniquement les<br />
introductions d'espèces, mais tous les impacts humains) est séduisant. Il consiste non pas à<br />
lutter contre les espèces introduites, mais à ai<strong>de</strong>r les espèces indigènes à survivre, assez<br />
longtemps pour qu'elles développent <strong>de</strong>s adaptations à la compétition avec les espèces introduites<br />
(Schlaepfer <strong>et</strong> al., 2005).<br />
13. Le bêtisier<br />
A propos <strong>de</strong>s introductions d'espèces, on entend parfois <strong>de</strong>s affirmations bien étranges, dites<br />
par <strong>de</strong>s personnes non spécialistes, ce qui est bien excusable, mais aussi par <strong>de</strong> hauts responsables<br />
d'administrations en charge <strong>de</strong> l'environnement, ou même par <strong>de</strong>s scientifiques,<br />
parfois même par <strong>de</strong>s scientifiques travaillant dans le domaine <strong>de</strong> l'écologie, mais pas dans<br />
celui <strong>de</strong> la biologie <strong>de</strong>s <strong>invasions</strong> (Davis <strong>et</strong> al., 2011 ; Fig. 107). L'écologie constitue en eff<strong>et</strong><br />
un domaine très large, <strong>et</strong> la plupart <strong>de</strong>s biologistes peuvent considérer à juste raison que leurs<br />
recherches sont en relation, marginale ou non, avec l'écologie : la génétique, la biologie moléculaire,<br />
la physiologie, la taxonomie, <strong>et</strong>c. Il n'est donc pas inutile <strong>de</strong> passer en revue les stupidités<br />
que l'on relève dans la presse ou dans la littérature scientifique à propos <strong>de</strong>s <strong>invasions</strong><br />
<strong>biologiques</strong> (d'après Boudouresque, 2003, complété).<br />
La publication <strong>de</strong> Thieltges <strong>et</strong> al. (2006) 183 , qui traite du mollusque Crepidula fornicata,<br />
d'origine nord-américaine <strong>et</strong> introduit en Europe, constitue un ‘cas d'école’ : elle réunit la plus<br />
grossière méconnaissance <strong>de</strong> l'écologie avec une confusion naïve entre ce qui est (ou supposé)<br />
bon pour l'écosystème <strong>et</strong> ce qui est bon pour l'homme (Fig. 108, 109). (i) L'importance <strong>de</strong> la<br />
diversité spécifique, <strong>de</strong> la biomasse <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'abondance <strong>de</strong>s individus dans un écosystème n'est<br />
ni bonne, ni mauvaise ; ce sont <strong>de</strong>s caractéristiques <strong>de</strong> chaque écosystème, <strong>et</strong> c'est le changement<br />
(en plus ou en moins) par rapport à ces caractéristiques qui doit être considéré. Dans <strong>de</strong><br />
nombreux écosystèmes (déserts, hautes latitu<strong>de</strong>s, en altitu<strong>de</strong>, fonds sableux, <strong>et</strong>c.) à gran<strong>de</strong><br />
valeur patrimoniale, la diversité spécifique <strong>et</strong> la biomasse sont naturellement faibles. Contrairement<br />
à ce que croient Thieltges <strong>et</strong> al. (2006), un accroissement <strong>de</strong> la diversité spécifique <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la biomasse n’est pas ‘positif’ pour l’écosystème. (ii) Il en va <strong>de</strong> même pour la structuration<br />
<strong>de</strong> l'habitat. (iii) Le parasitisme, comme la prédation <strong>et</strong> le mutualisme, fait partie <strong>de</strong>s caractéristiques<br />
fonctionnelles d'un écosystème ; un écosystème ‘naturel’ est généralement riche<br />
en parasites, <strong>et</strong> ce sont souvent les perturbations ou le stress qui en réduisent le nombre (voir à<br />
ce suj<strong>et</strong> Bartoli <strong>et</strong> Boudouresque, 2007) ; considérer la réduction du parasitisme comme un<br />
élément positif, ce que font Thieltges <strong>et</strong> al. (2006), constitue donc une véritable hérésie scientifique.<br />
(iv) Au total, Thieltges <strong>et</strong> al. (2006) confon<strong>de</strong>nt complètement l'écologie (le fonctionnement<br />
<strong>de</strong> l'écosystème) avec ce qui est bon (où qu’ils croient être bon) pour l'aquaculture en<br />
particulier, l'homme en général.<br />
‘Que serions-nous sans les espèces introduites ? la tomate, la pomme <strong>de</strong> terre, <strong>et</strong>c.’. La tomate,<br />
la pomme-<strong>de</strong>-terre, comme la quasi-totalité <strong>de</strong>s espèces cultivées <strong>et</strong> élevées, sont <strong>de</strong>s<br />
espèces bon-indigène, mais ne sont pas <strong>de</strong>s espèces introduites (en eff<strong>et</strong>, elles ne sont pas<br />
183 Le travail <strong>de</strong> Thieltges <strong>et</strong> al. (2006) est pourtant publié dans une excellente revue : Biological Invasions.<br />
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