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invasions et transferts biologiques - Centre d'Océanologie de ...

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Une espèce introduite peut rencontrer, dans sa région d'adoption, une ressource alimentaire<br />

particulièrement favorable (GESAMP, 1997).L'importance <strong>de</strong> la ressource potentielle, pour<br />

l'espèce introduite, dans la région receveuse, constitue certainement un facteur <strong>de</strong> succès, <strong>et</strong><br />

même d'invasivité (invasiveness) (Barlow <strong>et</strong> Kean, 2004).<br />

Un facteur <strong>de</strong> succès, chez les magnoliophytes terrestres, pourrait être la faible production<br />

primaire <strong>de</strong>s espèces indigènes. Cleland <strong>et</strong> al. (2004) ont montré que leur succès diminuait<br />

dans les peuplements à forte production ou, dans un peuplement donné, les années où la production<br />

primaire était importante.<br />

Une espèce déjà introduite, en modifiant ou bouleversant le fonctionnement <strong>de</strong> l'écosystème,<br />

peut favoriser l'introduction d'autres espèces (invasional meltdown). La métaphore a été créée<br />

par Simberloff <strong>et</strong> Von Holle (1999). Il s'agit en quelque sorte d'une réaction en chaîne 88 ,<br />

dans laquelle le processus s'accélère, peut-être jusqu'à un point <strong>de</strong> non-r<strong>et</strong>our (Simberloff,<br />

2006a, 2006b ; Gurevitch, 2006). La yellow crazy ant Anoplolepis gracilipes (fourmi) a été<br />

introduite sur l'île Christmas, au Nord-Est <strong>de</strong> l'océan Indien. Elle forme <strong>de</strong>s super-colonies<br />

(colonies à reines multiples) qui occupent le quart <strong>de</strong> la surface <strong>de</strong> l'île. Dans les secteurs envahis,<br />

le crabe rouge terrestre Gecarcoi<strong>de</strong>a natalis (espèce-clé <strong>de</strong> l'écosystème ; le principal<br />

consommateur) est 42 fois moins abondant que dans les secteurs témoins (0.03 ind./m² contre<br />

1/m²) : en eff<strong>et</strong>, les fourmis l'attaquent <strong>et</strong> le tuent avec <strong>de</strong> l'aci<strong>de</strong> formique. En présence <strong>de</strong>s<br />

fourmis, l'importance <strong>de</strong> la litière est x 2, la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong>s germinations est x 30, la diversité<br />

spécifique <strong>de</strong>s germinations x 3.5, il y a apparition d'autres espèces introduites, comme le<br />

Coccidae Coccus celatus <strong>et</strong> la mortalité <strong>de</strong>s arbres Inocarpus fagifer est augmentée (O'Dowd<br />

<strong>et</strong> al., 2003). En Terre <strong>de</strong> Feu (Argentine <strong>et</strong> Chili), les lacs créés par le castor introduit Castor<br />

cana<strong>de</strong>nsis ont favorisé l'introduction <strong>de</strong> nombreuses espèces aquatiques (Menvielle <strong>et</strong> al.,<br />

2010). Dans le Maine (USA) <strong>et</strong> en Nouvelle Ecosse (Canada), l'espèce introduite Codium<br />

fragile var. tomentosoi<strong>de</strong>s (chlorobiontes, Archaeplastida) colonise <strong>de</strong>s clairières dans les<br />

forêts natives <strong>de</strong> Laminaria (straménopiles) <strong>et</strong>, une fois établie, empêche la recolonisation par<br />

les laminaires ; une secon<strong>de</strong> espèce introduite, le bryozoaire Membranipora membranacea, se<br />

développe sur les Laminaria <strong>et</strong> contribue à leur arrachage lors <strong>de</strong>s tempêtes, donc à l'ouverture<br />

<strong>de</strong> clairières où se développera Codium; Membranipora ai<strong>de</strong> donc Codium à éliminer<br />

Laminaria (Levin <strong>et</strong> al., 2002 ; Scheibling <strong>et</strong> Gagnon, 2006). Mais <strong>de</strong>s cas inverses, où l'espèce<br />

introduite renforce les défenses <strong>de</strong> la communauté face à <strong>de</strong> nouvelles introductions, ont<br />

été décrits (Sakai <strong>et</strong> al., 2001). Le concept d’invasional meltdown a été critiqué (i) pour sa<br />

connotation militaire <strong>et</strong> (ii) parce qu'il ne représente pas un cas général ; Simberloff (2006a,<br />

2006b) fait remarquer, pour sa défense, qu'il n'a pas prétention à être généralisé, mais simplement<br />

à expliquer certains cas <strong>de</strong> succès <strong>de</strong>s <strong>invasions</strong> <strong>biologiques</strong>.<br />

Les espèces indigènes, qui ont co-évolué avec leurs prédateurs, savent les fuir. En revanche,<br />

elles peuvent être naïves vis-à-vis d'un prédateur introduit. C'est le cas <strong>de</strong>s mollusques Pecten<br />

fumatus <strong>et</strong> Chlamys asperrima en Australie, qui fuient l'étoile <strong>de</strong> mer indigène Coscinasterias<br />

muricata, <strong>et</strong> non l'étoile <strong>de</strong> mer introduite Asterias amurensis (Hutson <strong>et</strong> al., 2005).<br />

L'évolution (la co-évolution) a sélectionné, chez les espèces d'un écosystème <strong>et</strong> d'une région,<br />

un certain nombre <strong>de</strong> traits d'histoire <strong>de</strong> vie qui y ont une valeur adaptative. En présence d'une<br />

espèce introduite, <strong>et</strong> donc d'un changement brutal <strong>de</strong>s ‘règles du jeu’, ces traits d'histoire <strong>de</strong><br />

vie peuvent s'avérer ‘suicidaires’, <strong>et</strong> donc précipiter le déclin, ou la disparition, d'espèces indigènes.<br />

On désigne ce processus sous le nom <strong>de</strong> ‘evolutionary trap’ (piège évolutif)<br />

88 En anglais, meltdown est utilisé pour désigner la réaction en chaine qui se produit lors <strong>de</strong> la fusion nucléaire.<br />

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