L’INTERACTION VILLE - EQUIPEMENT EN VILLE NOUVELLE - RECEPTION ET ADAPTATION DE LA FORMULE DE L’EQUIPEMENT SOCIO-CULTUREL INTEGRE Rapportdéfinitif - Février 2005CHAPITRE IIespace fermé » 185 , la <strong>nouvelle</strong> approche met l’acc<strong>en</strong>t sur la t<strong>en</strong>sion nécessaire <strong>en</strong>tre l’autonomie <strong>de</strong>chaque équipem<strong>en</strong>t (architecturale et programmatique) et son interrelation avec un espace urbaincommun. Cette position qui va <strong>de</strong> pair avec le rejet <strong>de</strong> l’architecture <strong>de</strong> dalle associé très souv<strong>en</strong>t àl’équipem<strong>en</strong>t intégré [voir FIG. 05.1] valorise les notions <strong>nouvelle</strong>s d’ « espace public » et <strong>de</strong>« scénographie urbaine » 186 .L’approfondissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> réseau:Jusqu’ici, la notion <strong>de</strong> réseau est prés<strong>en</strong>te dans la réflexion sur les équipem<strong>en</strong>ts intégrés à Marne-la-Vallée comme du reste aussi au Vaudreuil, mais cela reste une notion peu explicitée. Des étu<strong>de</strong>s faitespar Quaternaire Éducation intègr<strong>en</strong>t, déjà <strong>en</strong> 1972, la notion <strong>de</strong> réseau : réseau <strong>de</strong> lecture publique,réseau docum<strong>en</strong>taire, réseau d’équipem<strong>en</strong>ts pour l’<strong>en</strong>fance, réseau d’information…En outre, lesbibliothécaires qui travaill<strong>en</strong>t au sein <strong>de</strong>s équipes pluridisciplinaires à Marne-la-Vallée port<strong>en</strong>t dès 1973leur réflexion sur un réseau <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la lecture publique.Philippe Jarry et le groupe TRAME vont avoir un rôle important dans l’approfondissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’idée d’unréseau <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts à partir d’une réflexion sur l’animation culturelle. Cette notion implique pour euxune mobilité et un pragmatisme, car le réseau prés<strong>en</strong>te une structure sans hiérarchie, aisém<strong>en</strong>text<strong>en</strong>sible ou rétractile, avec une multiplicité <strong>de</strong> points <strong>de</strong> passage et une d<strong>en</strong>sité <strong>de</strong>s échanges, offrantainsi une souplesse <strong>de</strong> gestion et <strong>de</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t 187 . Cette conception du réseau, inspirée par lestravaux théoriques <strong>de</strong> Gilles Deleuze et Michel Guattari aura une certaine influ<strong>en</strong>ce dans laprogrammation <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxième génération à Marne-la-Vallée. Elle se confronte à uneapproche plus hiérarchique du réseau découlant <strong>de</strong> la logique d’organisation pyramidale <strong>de</strong>séquipem<strong>en</strong>ts suivant l’échelle urbaine à laquelle ils se rapport<strong>en</strong>t. Les étu<strong>de</strong>s initiales <strong>de</strong> l’ARESC sur laprogrammation <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts dans le secteur 2 prévoyai<strong>en</strong>t déjà la création d’une trame fine etrégulière d’équipem<strong>en</strong>ts légers <strong>en</strong> vue d’animer le quartier.Ce qui est affirmé dans la réflexion m<strong>en</strong>ée au Luzard c’est l’articulation <strong>en</strong>tre cette vision formelle dumaillage <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts et l’approche sociologique <strong>de</strong>s rapports sociaux. Si la volonté <strong>de</strong> regrouper leséquipem<strong>en</strong>ts selon <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> vie sociale reste constante, le regard sur les précéd<strong>en</strong>ts mythiquesa beaucoup évolué. L’intégration réalisée à Yerres et à Gr<strong>en</strong>oble est mise <strong>en</strong> question à partir d’unecritique <strong>de</strong> « l’idéologie unitariste qui nie ou masque la réalité <strong>de</strong>s clivages sociaux caractéristiques <strong>de</strong> lasociété française » 188 .L’affirmation du réseau s’articule ainsi avec <strong>de</strong> nouveaux objectifs <strong>de</strong> vie sociale, laissant la place àl’aspiration pour <strong>de</strong>s groupes à se différ<strong>en</strong>tier, à s’opposer, et à s’approprier complètem<strong>en</strong>t un lieu:— Autonomie : fournir aux habitants un cadre <strong>de</strong> vie leur permettant le maximum d’autonomie ;— Intégrité : possibilité, tant pour les individus que pour les groupes, d’assurer leur id<strong>en</strong>titépropre sans être soumis aux contraintes <strong>de</strong> désagrégation que peuv<strong>en</strong>t induire le découpageet l’émiettem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s activités proposées.La méthodologie <strong>de</strong> programmation au LuzardTout comme pour le c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> l’Arche Guédon, la programmation et la conception du c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> quartier<strong>de</strong>s Luzards vont réunir dans une démarche pluridisciplinaire ambitieuse <strong>de</strong> multiples acteurs. Unprocessus <strong>de</strong> concertation est ainsi mis <strong>en</strong> place confrontant les points <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s principaux bureauxd’étu<strong>de</strong>s impliqués à l’époque dans la réflexion sur la programmation et sur la coordination <strong>de</strong>séquipem<strong>en</strong>ts collectifs, à savoir l’APIAUL, la SCOOPER, le CERFI, Quaternaire Éducation, le Groupe <strong>de</strong>Sociologie Urbaine (GSU), l’Ag<strong>en</strong>ce Nationale pour le Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Éducation Perman<strong>en</strong>te(ADEP).185 A. Baraton, Y. Charreyre, A. Cotl<strong>en</strong>ko, F. Novati, E. Pierre, Le Pôle <strong>de</strong> R<strong>en</strong>contre, janvier 1977, [EPAMARNE -archives G.Machu].186 Ibid.187 M. Peraldi, Le Temps <strong>de</strong>s Rites : L’action culturelle <strong>en</strong> <strong>ville</strong> <strong>nouvelle</strong>, C.E.R.F.I.S.E., pp. 39-40.188 Barthez, « À propos <strong>de</strong>s regroupem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s supports du c<strong>en</strong>tre », in Programmation du C<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Quartier <strong>de</strong>sLuzards : Note préparatoire à la Réunion du 31 mars 1976, Noisiel, le 23 mars 1976, [EPAMARNE - archives G. Machu].62
L’INTERACTION VILLE - EQUIPEMENT EN VILLE NOUVELLE - RECEPTION ET ADAPTATION DE LA FORMULE DE L’EQUIPEMENT SOCIO-CULTUREL INTEGRE Rapportdéfinitif - Février 2005CHAPITRE IILa « méthodologie <strong>de</strong> programmation » du c<strong>en</strong>tre, qui fait l’objet d’une réflexion spécifique 189 , se veut unestructure d’étu<strong>de</strong> ouverte impliquant non seulem<strong>en</strong>t la participation <strong>de</strong> ces bureaux d’étu<strong>de</strong>s spécialisésmais aussi celle <strong>de</strong>s usagers, <strong>de</strong>s animateurs, du personnel <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts urbains aussi bi<strong>en</strong> que<strong>de</strong>s représ<strong>en</strong>tants <strong>de</strong>s administrations et <strong>de</strong>s associations.La démarche consiste à alterner <strong>de</strong>s phases <strong>de</strong> travail isolé <strong>de</strong>s spécialistes et <strong>de</strong>s phases d’étu<strong>de</strong>scommunes. La programmation se déroule ainsi <strong>en</strong> trois temps :1. Délimitation <strong>de</strong>s domaines et discussion sur le cadre méthodologique ;2. Analyse et propositions <strong>de</strong> regroupem<strong>en</strong>t d’unités fonctionnelles à travers l’outil <strong>de</strong>s matrices etmise au point d’une proposition d’organigramme ;3. Proposition technique <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts regroupem<strong>en</strong>ts et élaboration du plan-masse.Plusieurs domaines d’étu<strong>de</strong> spécialisés sont id<strong>en</strong>tifiés, rev<strong>en</strong>ant aux uns et aux autres, éducationperman<strong>en</strong>te, petite <strong>en</strong>fance et <strong>en</strong>fance, adolesc<strong>en</strong>ce et pré-adolesc<strong>en</strong>ce, domaine médico-social, loisirs,services administratifs, services collectifs privés et habitat. Par ailleurs les problématiques <strong>de</strong>regroupem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s services vont donner lieu à <strong>de</strong>s travaux collectifs associant les membres <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tsbureaux d’étu<strong>de</strong>.En ce qui concerne la localisation <strong>de</strong>s fonctions, la SCOOPER va pouvoir repr<strong>en</strong>dre le systèmed’analyse fonctionnelle élaboré au Vaudreuil permettant d’élaborer une organisation spatiale du c<strong>en</strong>tre.La décomposition programmatique s’effectue à partir <strong>de</strong> matrices définissant les critères <strong>de</strong>regroupem<strong>en</strong>t fonctionnel (répulsion, indiffér<strong>en</strong>ce, proximité, contiguïté) et les critères perceptifs(répulsion, indiffér<strong>en</strong>ce, même espace urbain, participation visuelle simultanée, intégration).L’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s <strong>nouvelle</strong>s relations et <strong>de</strong>s sous-<strong>en</strong>sembles s’effectue <strong>en</strong> étudiant le nombre et lestypes <strong>de</strong> relations <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts composants fonctionnels [voir FIG. 01.3 et 01.4]. Ces étu<strong>de</strong>sconduis<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fin à une structure <strong>de</strong>s liaisons id<strong>en</strong>tifiant <strong>de</strong>ux pôles <strong>de</strong> relations : forte proportion <strong>de</strong>liaisons positives et forte proportion d’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> liaisons 190 . Ces bilans souti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t l’élaboration d’unorganigramme fonctionnel.Au final, les étu<strong>de</strong>s initiales <strong>de</strong>s bureaux d’étu<strong>de</strong> permett<strong>en</strong>t d’esquisser <strong>en</strong> mars 1976 une hypothèsepréliminaire <strong>de</strong> regroupem<strong>en</strong>t au niveau du c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> quartier. Le c<strong>en</strong>tre inclura non seulem<strong>en</strong>t un pôle <strong>de</strong>r<strong>en</strong>contre, mais aussi un pôle d’informations, une maison <strong>de</strong>s associations, <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> loisirset quelques commerces.La complexité du processus <strong>de</strong> programmation ainsi défini <strong>en</strong>traîne pour l’EPA un travail difficile <strong>de</strong>coordination et <strong>de</strong> pilotage, chaque bureau d’étu<strong>de</strong> travaillant selon ses habitu<strong>de</strong>s et sa spécificité. Cettemétho<strong>de</strong> assez lour<strong>de</strong> est contestée que ce soit par les urbanistes <strong>de</strong> l’EPA qui se s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t exclus <strong>de</strong>sétu<strong>de</strong>s préalables ou par certains membres du GCVN. Est mis <strong>en</strong> cause la logique consistant à payerpour la programmation d’un c<strong>en</strong>tre urbain, une pléthore <strong>de</strong> sociologues qui <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>sd’ordre pédagogique ou psychosociologique plutôt que <strong>de</strong>s urbanistes mieux à même <strong>de</strong> répondre aux<strong>en</strong>jeux opérationnels 191 .Comme pour répondre à cette critique et <strong>de</strong> manière complém<strong>en</strong>taire au travail <strong>de</strong> programmation, M.Macary va lancer une consultation d’urbanistes sous la forme d’un concours d’idée. Cette consultationqui sollicite <strong>de</strong>s jeunes pratici<strong>en</strong>s ayant déjà une certaine expéri<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> <strong>ville</strong> <strong>nouvelle</strong>, Ch. DePortzamparc et A. Grumbach ; B. Trilles et D. Montassut ; G. P<strong>en</strong>creac’h et Cl. Vasconi 192 , infléchit leregard porté sur le rapport <strong>en</strong>tre les équipem<strong>en</strong>ts et l’espace public. En particulier CL. Vasconi etP<strong>en</strong>creac’h apport<strong>en</strong>t une critique significative <strong>de</strong> la première génération <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts intégrés <strong>en</strong> sefondant sur leur expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Cergy-Préfecture. Michel Macary et Monique Sibel vont élaborer le planmassedu Luzard principalem<strong>en</strong>t à partir <strong>de</strong> leur projet. Car après cette interv<strong>en</strong>tion préliminaire, lesarchitectes-urbanistes <strong>de</strong> l’EPA repr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t les r<strong>en</strong>nes, ne sollicitant à nouveau <strong>de</strong>s architectesurbanistesextérieurs qu’à la toute fin du processus <strong>de</strong> conception.189 EPAMARNE, Méthodologie <strong>de</strong> programmation du c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> quartier 2, texte dactyl., Noisiel s.d. [EPAMARNE - archives G.Machu].190 SCOOPER, Élém<strong>en</strong>ts pour la mise à jour d’une organisation spatiale du c<strong>en</strong>tre du Quartier <strong>de</strong>s Luzards, Rou<strong>en</strong>, 18 juin1976, [EPAMARNE - archives G. Machu].191 J. M. Boyer, op. cit., p. 288-289.192 M. Macary, Note méthodologique concernant les étu<strong>de</strong>s architecturales d’avant-projet du c<strong>en</strong>tre urbain du Luzard, textedactyl., EPAMARNE Noisiel, le 19 janvier 1976, [EPAMARNE - archives G. Machu].63