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la nouvel<strong>le</strong> compagne, qui la détestait cordia<strong>le</strong>ment. Par la suite, quand<br />

<strong>le</strong>s Duplantier avaient quitté l’Australie, longtemps avant <strong>le</strong>s Voisin, ils<br />

étaient retournés régulièrement, à toutes <strong>le</strong>s vacances de Noël, à Newcast<strong>le</strong>,<br />

et ils voyaient toujours John et Sylvie Silverman à cette occasion.<br />

Puis <strong>le</strong>s Silverman venaient en congé sabbatique en Europe, en Hollande<br />

et en France ; alors ils se retrouvaient à Paris, ou dans <strong>le</strong>urs maisons de<br />

campagne respectives. Enfin <strong>le</strong>s Silverman avaient décidé de s’instal<strong>le</strong>r<br />

pour vivre à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Sydney, et <strong>le</strong>s<br />

Duplantier <strong>le</strong>s y rejoignaient de temps en temps. Clotilde avait un béguin<br />

pour Andrew, un des fils du premier mariage de John, non pas pour Joël,<br />

comme prévu, et Joël, lui, s’intéressait à Muriel, la fil<strong>le</strong> de John, qui avait<br />

un an de plus que lui, mais l’atmosphère de complicité entre <strong>le</strong>s enfants,<br />

maintenant tous grands ado<strong>le</strong>scents, était là, un peu à la Martin du<br />

Gard, avec une dose d’exotisme ou de cosmopolitisme en plus, de sorte<br />

que Sylvie et Maureen n’arrêtaient pas de se renvoyer menta<strong>le</strong>ment ou<br />

viva voce de petits cris de plaisir en s’embrassant deux fois sur chaque<br />

joue. Sylvie n’avait encore que vingt-cinq ans au moment du divorce.<br />

Son ressentiment à l’endroit de Jacques était profond, certes, car el<strong>le</strong><br />

l’avait aimé, el<strong>le</strong> avait mené avec lui une vie matériel<strong>le</strong>ment diffici<strong>le</strong><br />

pendant des années, et el<strong>le</strong> avait cru en une grande aventure en passant<br />

de la médiocrité intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong> de son entourage familial aux perspectives<br />

audacieuses du jeune universitaire provocateur, poète à ses heures, libéré<br />

des contraintes de la conformité familia<strong>le</strong> et religieuse. Mais, malgré <strong>le</strong><br />

choc brutal de la première séparation (quand Jacques avait rencontré<br />

M.), et <strong>le</strong> défilé des faux espoirs, la déception répétée, au fond, la seu<strong>le</strong><br />

chose qu’el<strong>le</strong> était restée définitivement incapab<strong>le</strong> de pardonner, c’était<br />

que Jacques prétendît n’avoir jamais voulu la naissance de Joël, qu’il<br />

l’accusât après coup d’avoir fait cet enfant pour <strong>le</strong> retenir, lui, qu’il n’ait<br />

jamais manifesté d’affection pour <strong>le</strong>ur fils et qu’il s’en fût tota<strong>le</strong>ment<br />

désintéressé dès l’âge d’un an. Sans doute Jill, terrib<strong>le</strong>ment jalouse, y<br />

était-el<strong>le</strong> pour quelque chose, mais il y avait des causes plus profondes,<br />

qu’el<strong>le</strong> attribuait à la personnalité de Jacques, une atteinte qui la diminuait,<br />

la rabaissait, la souillait, et qui avait été très <strong>le</strong>nte à guérir, malgré<br />

la bonté de John, la réussite complète et inespérée qu’el<strong>le</strong> avait connue<br />

dans ses études et sa carrière. Ces sentiments, sans <strong>le</strong>s imposer à Maureen<br />

mais trouvant en el<strong>le</strong> un terrain favorab<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> <strong>le</strong>s lui avait fait partager ;<br />

cela ne la réconfortait pas, n’ayant pas envie de <strong>le</strong>s disséminer et en<br />

ayant un peu honte, mais l’aidait à porter cette obscure honte enfouie.<br />

Duplantier, donc, au petit-déjeuner familial dans la cuisine de <strong>le</strong>ur hôtel<br />

particulier de Neuilly, tend à Maureen l’enveloppe expédiée de Paris par<br />

Jacques Voisin, d’où Maureen sort <strong>le</strong>s deux photos de Perkins Street.<br />

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