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Olga Boutorina<br />
À la différence de l’Union européenne, où la crise a suscité une réaction<br />
douloureuse mais énergique des autorités et de la société, en Russie elle n’a pas<br />
donné d’impulsions notables. Pendant que l’UE tente d’analyser ce qui s’est produit<br />
et de développer une nouvelle stratégie de développement économique, la Russie<br />
retourne à ses « bonnes vieilles » pratiques, se contentant d’imiter les institutions<br />
démocratiques et les mécanismes de marché.<br />
* * *<br />
Après avoir constitué un marché unique de qualité, fourni aux pays faibles une<br />
monnaie forte et fait passer ces pays à un modèle de développement durable,<br />
l’Union européenne s’est heurtée à une déformation inattendue des mécanismes<br />
de marché. La périphérie de la zone euro s’est révélée mal préparée à la hausse de<br />
la concurrence, et les marchés n’ont pas su anticiper correctement les risques. La<br />
crise a provoqué l’arrêt des marchés monétaires de la zone euro et la désintégration<br />
de l’espace financier uni. Les stabilisateurs automatiques de l’économie qui<br />
existaient avant l’introduction de l’euro ont cessé de fonctionner et l’économie a été<br />
déséquilibrée pour une longue durée.<br />
La Russie, en revanche, a démontré la solidité de ses mécanismes économiques,<br />
même s’il serait exagéré de les qualifier de mécanismes de marché. L’équilibre<br />
institutionnel du système économique paraît solide — mais la stabilité sociale<br />
repose sur une forte polarisation des revenus et sur le bas niveau de vie d’une partie<br />
importante de la population. À l’heure actuelle, il n’y a pas, dans le pays, de forces<br />
désireuses et capables de lancer une profonde transformation institutionnelle et<br />
structurelle de l’économie. Combien de temps encore cette transformation sera-telle<br />
repoussée ? Cela ne dépend pas seulement des facteurs extérieurs, au premier<br />
rang desquels les cours mondiaux du pétrole. L’impulsion pour les réformes peut<br />
aussi venir de l’intérieur. On pourra le constater d’ici trois à cinq ans, quand<br />
accèdera au marché du travail la génération née dans les années 1990 — c’est-àdire<br />
précisément les enfants des urbains qui ont dû revenir aux travaux agraires.<br />
Si ces jeunes Russes qui ont grandi avec les gadgets technologiques et les réseaux<br />
sociaux refusent en masse de nourrir des cochons et de fabriquer du terreau, des<br />
changements importants sont à prévoir dans la société.<br />
RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013