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Timofeï Bordatchev<br />
à-vis de leurs citoyens, ne peuvent pas être relevés au moyen de la force militaire.<br />
On considère communément que c’est le cas des problèmes écologiques, de la<br />
pénurie alimentaire et du manque d’eau, des déséquilibres de l’économie mondiale.<br />
Il convient ici cependant de prendre en compte que la majorité des « nouveaux »<br />
défis de sécurité, bien qu’ils soient de nature supranationale ou globale, n’ont pas<br />
encore débouché sur l’élaboration par la communauté internationale d’actions<br />
supranationales pour les surmonter. Or, en fait, la réponse à ces nouveaux défis<br />
demeure au niveau des États nationaux qui ne sont pas tenus de prendre en compte<br />
les répercussions sur leurs voisins des mesures qu’ils prennent. Ce qui, à son tour,<br />
peut conduire à un regain de tension dans les relations internationales quand on se<br />
trouve sous la menace d’un emploi de la force militaire.<br />
En ce qui concerne les menaces émanant du terrorisme international ou des<br />
réseaux criminels, la question de l’emploi de la force est encore plus d’actualité. La<br />
réaction la plus sûre, comme l’expérience l’a montré récemment, est de détruire<br />
l’ennemi dans son foyer. Compte tenu de ce que l’adversaire n’est pas basé dans<br />
un espace abstrait mais sur le territoire d’États souverains (Afghanistan, Pakistan,<br />
Yémen, etc.), les forces et les moyens des services spéciaux sont bien évidemment<br />
insuffisants. Il est alors indispensable de recourir aux forces conventionnelles qui<br />
effectuent de facto une intrusion sur un territoire étranger. Fût-ce grâce à des<br />
armes hautement technologiques ou à des drones.<br />
En même temps, on voit s’accroître le nombre de défis politiques globaux,<br />
extrêmement complexes, diversifiés et propres aux particularités du monde<br />
contemporain. Le principal d’entre eux, c’est le désarroi ressenti par les États et<br />
leurs dirigeants face aux limitations objectives de leurs possibilités de contrôler le<br />
marché mondial et son influence sur les économies nationales. La force reste un<br />
des ultimes domaines où s’exerce le monopole de l’Étates . Elle devient, en premier<br />
lieu, une réaction naturelle à la pression exercée sur la souveraineté dans d’autres<br />
domaines. Plus une menace est complexe et incompréhensible, plus la tentation est<br />
grande pour les États de répondre de manière « simple et efficace ».<br />
La démocratisation rapide de la politique internationale et le renforcement des<br />
nouveaux centres de force non-occidentaux imposant de répartir les ressources<br />
de pouvoir et les avantages économiques incitent les puissances de statu quo à<br />
passer à une défense plus rude de leurs droits « historiquement acquis », et les pays<br />
révisionnistes doivent répondre à cette situation par une recrudescence des forces<br />
et moyens militaires. Le résultat, c’est la concurrence qui, dans le cas de la Chine et<br />
de l’Amérique peut revêtir les traits d’une course aux armements.<br />
Le développement des technologies militaires, en premier lieu dans le domaine<br />
des armements conventionnels, conduit à la formation d’un facteur psychologique<br />
d’impunité. Or, c’est justement le dommage traditionnellement causé par une<br />
RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013