You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
56<br />
Mikhaïl Vinogradov<br />
Les deux premiers objectifs furent atteints d’une manière ou d’une autre.<br />
Les revendications des manifestants (annulation des résultats du scrutin,<br />
démission de Tchourov) furent officiellement ignorées mais, dans l’ensemble, on<br />
eut l’impression que le Kremlin était prêt à envisager des élections anticipées<br />
à la Douma ne fût-ce que comme solution de rechange. Ce n’est pas un hasard<br />
si deux des trois points clés de la réforme politique concernaient la Chambre<br />
basse, à savoir l’enregistrement des petits partis et le changement du mode de<br />
composition du Parlement. La réactivation du projet de Mikhaïl Prokhorov<br />
engendra des attentes alternatives fantômes. D’ailleurs, les changements réels<br />
revêtaient un caractère de façade, reflétant la thèse divergente selon laquelle le<br />
pouvoir aurait été prêt à discuter toute question avec l’opposition, hormis celle<br />
du pouvoir lui-même.<br />
En ce qui concerne la division des élites, le pouvoir tira soudain les leçons<br />
des crises passées (notamment de la « parade des souverainetés » de la fin des<br />
années 1980). L’idée de revenir aux élections des gouverneurs permit d’éviter<br />
une recrudescence des contestations dans les régions bénéficiant du soutien des<br />
autorités locales. En dernier ressort fut proposé un « gâteau » via le soutien à l’idée<br />
des élections. Les gouverneurs en fonction (en tout cas les plus puissants d’entre<br />
eux) eurent la possibilité de renforcer leur statut, et leurs opposants d’escompter<br />
qu’ils pourraient parvenir au pouvoir via les élections dans le cadre du système<br />
politique existant et non via le soutien de l’opposition et un changement de<br />
pouvoir au niveau fédéral.<br />
Si en décembre 2011 des manifestations se déroulèrent dans les 50 plus grandes<br />
villes de Russie (y compris les républiques du Nord-Caucase), elles disparurent<br />
par la suite. Les opposants de Moscou se laissèrent convaincre qu’il n’y avait sur<br />
place aucun soutien sérieux ; quant aux élites régionales, elles commencèrent à<br />
se préparer aux élections dans leurs propres territoires et, comme il s’avéra plus<br />
tard, souvent en dépit du bon sens. Quand les passions s’essoufflèrent un peu,<br />
les libertés promises furent sévèrement restreintes. Entre le 15 décembre, date<br />
à laquelle l’idée de revenir à l’élection des gouverneurs fut rendue publique, et<br />
le 1er juin 2012 (entrée en vigueur de ce nouveau schéma) des mesures cadres<br />
furent adoptées dans vingt-trois des quatre-vingt-deux sujets de la Fédération.<br />
Dans ces régions, cela reporta de cinq ans la tenue des élections, notamment<br />
dans les treize régions où des élections anticipées devaient se dérouler en 2012.<br />
Résultat, à l’automne 2012, il n’y eut de scrutin que dans cinq régions seulement<br />
(au lieu de dix-sept comme cela aurait été le cas si les réformes annoncées étaient<br />
entrées en vigueur immédiatement). Dans la plupart d’entre elles, les chances<br />
des gouverneurs en fonction de se maintenir semblaient sérieuses. Là où des<br />
intrigues se firent jour malgré tout (régions de Riazan et de Briansk), beaucoup<br />
RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013