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Sommaire - CCIFR

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Émile Pain<br />

participants, la cause du mécontentement était liée à la falsification des résultats<br />

des élections et, pour 52% d’entre eux, à l’impossibilité d’influer sur le pouvoir.<br />

On découvre ainsi que le pouvoir russe est malgré tout apte à contribuer au<br />

développement du mouvement citoyen – mais de façon indirecte, en unissant<br />

contre lui différentes composantes politiques.<br />

Les personnes unies dans l’activité de contestation en 2011 et 2012 ne se<br />

qualifiaient pas de nationalistes citoyens mais, au fond, ils l’étaient. La plupart<br />

d’entre eux représentaient ces couches sociales qui par leur niveau d’enseignement,<br />

d’entreprenariat, de qualification pouvaient parfaitement se couler dans les<br />

rangs des personnes aux valeurs cosmopolites qui constituaient l’essence de cet<br />

élan de « fuite des esprits » hors de Russie. Mais les gens qui ont participé aux<br />

manifestations de 2011-2012 ne partent pas pour des pays plus confortables. Ils<br />

créent en Russie des associations de bénévoles, apportent une aide aux victimes<br />

des catastrophes naturelles, prennent la défense de quartiers historiques faisant<br />

l’objet de destructions et luttent contre les déboisements sauvages. Ce sont des<br />

gens à la culture activiste, ils sont prêts à rester dans leur pays et à supporter non<br />

seulement des inconvénients mais parfois même des dangers bien plus grands que<br />

des perquisitions ou des campagnes de dénigrement pour des motifs politiques.<br />

Pour endurer tout cela, il faut faire preuve non de cosmopolitisme mais bien<br />

plutôt d’un fort attachement à son pays. Les activistes citoyens, qui pourraient être<br />

aussi qualifiés en termes sociologiques de nationalistes citoyens, illustrent leur<br />

souhait de changer le type d’État, de le rendre national dans le sens de soumis à la<br />

société-nation, pour la servir et non dans l’intérêt de groupes oligarchiques ou de<br />

corporations bureaucratiques.<br />

Un tel État-nation (qui conserve un grand nombre de zones de peuplement<br />

de peuples à identités, traditions et cultures diverses) peut et, probablement,<br />

commencera à se constituer en Russie sur la base d’une large coalition politique<br />

et d’une consolidation citoyenne, dans le but de dépasser l’autoritarisme,<br />

l’arbitraire et la corruption. De tels objectifs ont surtout servi de coup de pouce à<br />

la consolidation nationale et citoyenne au XXe siècle, alors qu’une consolidation<br />

négative est le plus souvent à l’origine de l’apparition des États-nations dans<br />

l’histoire mondiale. Or, à ce niveau, les embranchements sont possibles. Les<br />

contestations peuvent conduire à la formation aussi bien de nations citoyennes,<br />

laïques, que de communautés ethnocratiques et théocratiques, comme ce fut<br />

le cas en Iran après la révolution islamique de 1979. Le régime théocratique<br />

parvenu au pouvoir avait alors cruellement réprimé ses alliés de naguère de la<br />

coalition antimonarchique et anti-corruption.<br />

À mon avis, la Russie pourrait voir l’apparition simultanée des deux scenarii<br />

localisés dans des espaces géographiquement distincts. Dans une grande partie<br />

RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013

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