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Barah Mikaïl<br />
nécessité pour la France de se préparer à d’autres scenarii similaires autrement<br />
qu’en étant sur la défensive.<br />
L’économie quant à elle reste à bien des égards liée au politique, et c’est ici que<br />
Paris trouverait grand bénéfice dans une meilleure définition de ses principes<br />
de politique étrangère. Évidemment, sa vocation à faire émerger une politique<br />
extérieure européenne forte est présente. Mais cela n’annule en rien l’impératif qu’il<br />
y a pour la France à se montrer plus claire quant aux attentes qu’elle a vis-à-vis de ses<br />
homologues au sein du monde arabe. Quoique placées sous des apparences nobles,<br />
les orientations de la diplomatie française donnent toujours la forte impression de<br />
ne pas avoir su saisir combien il est important d’être cohérent dans l’approche d’un<br />
Moyen-Orient en pleine transition. Que la France se réjouisse officiellement (avec<br />
parfois des réserves) des mutations politiques tunisienne, égyptienne et libyenne a<br />
certes cela de positif qu’elle va ainsi dans le sens des opinions publiques de ces pays.<br />
Il n’en demeure pas moins que la France devrait être plus claire – voire offensive<br />
– sur les cas du Bahreïn, de la Jordanie, voire du Yémen, où les évolutions sont<br />
inquiétantes. De même, les abus intervenants en Arabie saoudite et aux Émirats<br />
arabes unis mériteraient une indignation plus forte. Le même constat pourrait<br />
d’ailleurs être formulé dans les cas de l’Algérie et du Maroc, pays pour lesquels la<br />
France a fait le choix depuis longtemps de contenir ses critiques en général afin<br />
de maintenir ouverte la porte des opportunités politiques, économiques comme<br />
touristiques.<br />
Les intérêts économiques de la France dans le monde arabe doivent d’ailleurs<br />
être examinés avec plus d’attention. Les échanges commerciaux avec la région<br />
tournent autour de 50 milliards d’euros annuels, soit environ 15% du commerce<br />
extérieur français. Mais ce sont les pays du Maghreb (à commencer par l’Algérie)<br />
qui comptent parmi les plus étroits clients de la France, le Proche-Orient et les<br />
pays du Golfe se retrouvant loin derrière. L’opportunité demeure pourtant présente<br />
pour la France de doubler son potentiel économique d’un rôle politique plus fort<br />
dans la région. Les tentatives de rapprochement avec les pays du Golfe se sont<br />
traduites par de minces avancées jusqu’ici. Or, que ce soit en termes commerciaux<br />
ou de défense, la France demeure en mesure de renforcer ses propositions et de<br />
passer pour l’un des partenaires les plus actifs de la région. Elle y gagnerait tant sur<br />
le plan commercial que politique.<br />
En juillet 2012, la France avait suggéré, par la voix de son ministre des<br />
affaires étrangères et européennes, Laurent Fabius, un recours à des coopérations<br />
à « géométrie variable ». Soit le développement de politiques au cas par cas, en<br />
fonction des pays abordés, de leurs besoins et de leurs perspectives. Néanmoins,<br />
la France a clairement besoin de s’émanciper du fort lien qu’elle a avec les pays<br />
du Maghreb. Non que celui-ci doive être délaissé ou allégé. Au contraire, le<br />
RUSSIA IN GLOBAL AFFAIRS • VOL. 11 • NUMERO SPECIAL • 2013