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, ARTISTE DANS 'ONCOURT - Doria

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du monde de la sensation artistique. Nous pouvons percevoir dans ce paragrapheune certaine amertume des Goncourt vis-à-vis de leurs propres critiques. En effet,les Goncourt, écrivains de la sensation, se perçoivent non comme des écrivains,mais comme des esthètes qui donnent au lecteur une émotion. Ils se détachent dureste de la littérature contemporaine par leur souci de trouver le mot juste quiprocurera au lecteur la sensation juste. Ils ont été considérés à leur époque commedes précieux, alors qu’eux se jugeaient des réalistes de la sensation, incompris parcet univers d’intellectuels lettrés qui donnaient plus de valeur à l’idée qu’àl’émotion. Seul Zola, dans Du roman. Sur Stendhal, Flaubert et les Goncourt,souligne cet aspect sensitif des Goncourt :MM. De Goncourt, pour leur part, ont apporté une sensation nouvelle de la nature. C’estlà leur trait caractéristique. Ils ne sentent pas comme on a senti avant eux. Ils ont les nerfsd’une délicatesse excessive, qui décuple les moindres impressions. […] Le but à atteindren’est plus de conter, de mettre des idées ou des faits au bout les uns des autres, mais derendre chaque objet qu’on présente au lecteur, dans son dessin, sa couleur, son odeur,l’ensemble complet de son existence 76 .Il signale un peu plus loin l’incompréhension du public envers les Goncourt et lescondamne : « Ce sont des aveugles qui nient les couleurs. Plus un écrivain a unesensibilité nerveuse, une façon à lui de sentir et de rendre, et plus il court le risquede n’être pas compris » 77 . En associant la critique lettrée au personnage deGarnotelle, les Goncourt réprouvent celle-ci. Ils montrent le décalage entre l’artqu’ils proposent eux-mêmes et les critères inadaptés qu’utilisent les critiques àleur égard.La sensation, et en particulier la souffrance du corps, a une très grandeimportance dans le concept créatif des Goncourt :Il est dans la vie de l’artiste des jours qui ont de ces inspirations, des jours où il éprouve lebesoin de répandre et de communiquer ce qu’il a de désolé, d’ulcéré au fond du cœur.Comme l’homme qui crie la souffrance de ses membres, de son corps, il faut que ce jourlàl’artiste crie la souffrance de ses impressions, de ses nerfs, de ses idées, de ses révoltes,de ses dégoûts, de tout ce qu’il a senti, souffert, dévoré d’amertume au contact des êtres etdes choses. Ce qui l’a atteint, froissé, blessé dans l’humanité, dans son temps, dans la vie,76 E. ZOLA, Du roman. Sur Stendhal, Flaubert et les Goncourt, éditions Complexe, Paris, 1989, p. 252-253.77 Idem, p. 255.157

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