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La Bataille des femmes - Les Classiques des sciences sociales

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Ces constats ramènent à la formation de base : la sage-femme<br />

apprend à définir l’urgence par rapport au risque de décès. Elle apprend<br />

à discerner les niveaux de risque, et met en place <strong>des</strong> interventions<br />

prévues et enseignées.<br />

Mais si cette urgence est omniprésente dans les discours et<br />

sous-tend les comportements professionnels <strong>des</strong> sages-<strong>femmes</strong>, il<br />

n’est pas certain que cette conception engage <strong>des</strong> pratiques idoines.<br />

Un principe d’enclenchement<br />

Un enfant vient de naître, la mère est délivrée du placenta puis rallongée sur la<br />

table, et recouverte d’un pagne sec. Elle est seule, la salle d’accouchement est<br />

pleine, chacun est affairé. SF est en train de remplir un dossier. Soudain, un<br />

bruit métallique provient de la table de la patiente ayant accouché une heure plus<br />

tôt. SF se lève brusquement, se dirige d’un pas précipité vers la patiente, pensant<br />

que celle-ci fait une « crise » Le reste de l’équipe accourt : seul moment où SF et<br />

les matrones montrent leur vivacité. Ensuite, SF attend tranquillement et en silence<br />

que le tensiomètre, le bassin et les gants soient apportés, afin de contrôler la<br />

tonicité utérine, puis enchaîne calmement les gestes les uns après les autres.<br />

HB vient d’accoucher une patiente, s’assure qu’elle saigne « normalement », vérifie<br />

la tonicité utérine puis quitte la salle. Le bureau de la sage-femme est un peu<br />

éloigné de la salle d’accouchement. Elle laisse la patiente aux soins de la matrone<br />

pendant qu’elle remplit le dossier obstétrical. Vingt minutes plus tard, la matrone<br />

vient la chercher : « la parturiente saigne ». HB lâche immédiatement son stylo et<br />

accourt. Elle constate le saignement, elle enfile <strong>des</strong> gants, glisse le bassin métallique<br />

sous le siège de la patiente, met un peu de Bétadine sur le gant et effectue la<br />

révision utérine. Elle entreprend ainsi la prise en charge d’hémorragie du postpartum<br />

immédiat selon les normes du protocole de service. Sur la demande de<br />

HB, j’injecte en intramusculaire l’ocytocine, pendant qu’elle effectue la révision,<br />

puis elle vide la vessie à l’aide d’une sonde métallique. En quelques minutes, le<br />

seuil critique est dépassé, l’utérus a retrouvé sa fermeté, le saignement s’est tari.<br />

Le processus d’urgence se déclenche lors de l’apparition d’un<br />

signe franc, qui, selon les contextes de pratique, est identifiable aussi<br />

bien par un personnel spécialisé que par un personnel peu formé.<br />

Sans être exhaustif, citons : l’imminence d’une expulsion [risque de<br />

déchirure périnéale, de chute et d’état de mort apparente du nouveauné],<br />

un saignement [risque de décès], une phase aiguë d’éclampsie<br />

[risque de coma]. Une fois enclenché, le processus évolue toujours de<br />

la même façon, comme l’illustre la <strong>des</strong>cription précédente. Sous l’effet<br />

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