La Bataille des femmes - Les Classiques des sciences sociales
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l’enfant né, le corps maternel prend un repos physiologique avant<br />
l’expulsion placentaire.<br />
Pour les sages-<strong>femmes</strong> avec lesquelles nous nous sommes entretenues,<br />
l’étape de l’expulsion fœtale représente à la fois le « risque<br />
de décéder » et le pronostic vital de l’enfant.<br />
Une parturiente en travail appelle SF. Elle l’examine et vérifie l’évolution du<br />
mobile fœtal. Sans un mot, elle glisse le bassin sous le siège de la parturiente et lui<br />
dit de pousser. <strong>La</strong> mère pousse deux à trois fois, sans résultat. <strong>La</strong> tête de l’enfant<br />
ne <strong>des</strong>cend quasiment pas. SF réitère son ordre. <strong>La</strong> tête de l’enfant progresse lentement<br />
dans le bassin. Sur un ton ferme, SF lui demande de continuer à pousser.<br />
<strong>La</strong> patiente ne pousse pas et commence à se tortiller sur la table d’accouchement.<br />
SF élève la voix et lui dit qu’elle est capricieuse.<br />
SF commence très calmement la phase <strong>des</strong> efforts expulsifs.<br />
Dès que la femme ne répond plus aux ordres, SF change de tactique<br />
pour diriger la parturiente et la faire pousser. Cette attitude, à la fois<br />
autoritaire et maternante, semble spécifique de l’expulsion.<br />
Nous insistons sur la particularité du comportement à ce moment<br />
précis, car l’urgence ressentie par les professionnelles conduit à<br />
la fois à de l’attention mais peut aussi virer à une certaine « violence ».<br />
HB me décrit un accouchement effectué en dehors de nos rencontres. Elle me raconte<br />
avoir frappé une malade. Elle la décrit comme étant indisciplinée, impolie et<br />
agitée. Elle avait arraché la perfusion, avait bousculé la table de réanimation.<br />
Elle me précise s’être laissé aller à « donner <strong>des</strong> coups de pieds ». <strong>La</strong> patiente<br />
avait « ameuté » tout le quartier, et le gardien lui avait même dit qu’il n’avait<br />
pas pu dormir. Elle m’explique qu’au moment de l’expulsion, la femme a refermé<br />
les jambes après le dégagement de la tête, HB ne pouvait pas dégager les<br />
épaules alors elle l’a frappée. Elle me dira : « je vous jure Patricia, c’est la première<br />
fois que je frappais une malade ». Le lendemain, la patiente se plaint auprès<br />
d’une parente <strong>des</strong> mauvais traitements de la sage-femme. <strong>La</strong> parente est technicienne<br />
supérieure, elle connaît HB. Elle dit à l’accouchée qu’elle a dû être très<br />
indisciplinée pour que HB la frappe. (Six mois de pratique)<br />
Dans cette <strong>des</strong>cription, HB présente la violence comme un<br />
dernier recours. <strong>La</strong> situation devenait urgente, il fallait agir rapidement,<br />
l’enfant se mettait en hypoxie par compression du cordon ombilical.<br />
SF dirige l’expulsion d’une jeune fille de seize ans. L’expulsion se déroule comme<br />
nous l’avons précédemment décrit. Cette fois, l’expulsion est plus longue, la jeune<br />
fille est plus agitée que la précédente. Elle crie à plusieurs reprises, SF ordonne de<br />
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