Orphée 2001 - Margelle

La demeure d’Alternance ne différait pas énormément de Pierre Sainte.
Une élégante maison de style toscan, avec quelque cinquante pièces,
toutes protégées du soleil par ces fenêtres étroites et typiques, meurtrières
que l’on croirait inspirées du style médiéval. Je notai la prédilection de
Tsorne pour les beiges et les marrons. Les meubles de bois ancien étaient
simples, on se fût cru dans la résidence d’un aristocrate du pays, pas chez
la PDG d’AllGen.
Il y avait un mais… Un petit ascenseur, dissimulé derrière une fausse
porte de bois. J’écoutais le soupir désabusé de la machine, où allions‑nous,
en enfer ? Certainement, mais quel enfer ? Pas celui de Dante. Ce serait
plus probablement un enfer technologique.
Je fus très surpris par la taille d’AllGen. Cette boîte était officielle‑
ment domiciliée à Frisco où elle disposait d’un complexe de laboratoires
d’accès très réservé. AllGenetics était l’une des nombreuses compagnies
mondiales œuvrant dans la génétique d’avant garde, on ne savait presque
rien de sa ligne de produits. Des bruits avaient couru sur un département
de chirurgie criminelle, greffe d’organes volés, mais rien n’était jamais
sorti au jour. En sortant de ce petit ascenseur, je venais de pénétrer dans le
véritable territoire d’AllGen et la première question que je me posai était
d’ordre pratique à la surface enterrée de ces laboratoires devait, à première
estimation, faire de dix à vingt fois celle de la maison. Par où passait le
personnel ? Comment se faisait l’aération ? Et comment avait‑il été pos‑
sible de réaliser ces grands travaux sans que les communautés politiques
et scientifiques en soient informées ? Peut‑être que ceux qui entraient là
n’en ressortaient plus ? C’était assez dans le style du vieux Toscan, laissez
toute espérance, vous qui venez ici ! Sauf que le diable était femelle.
Tsorne m’adressa un sourire froid. Elle avait suivi mon raisonnement,
c’était facile.
Je la suivis. On pratiquait, chez AllGen, le clonage humain accéléré. Le
diable m’expliqua les étapes du projet et les échanges énergie/temps.
‑ Nous pouvons, dit‑elle, réaliser un corps humain complet en trois
heures, mais il sera relativement imprévisible. Les expériences poussées
que nous avons réalisées montrent qu’il existe une sorte de barrière tem‑
porelle à ne pas franchir. Le meilleur ratio temps/énergie nous mène à un
horizon de trois jours. Ce qui est intéressant, c’est que nous pouvons déve‑
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