Orphée 2001 - Margelle

oiseau découpant l’azur. Un tel cheminement ne pouvait me conduire qu’à
la simplicité. J’avisai un escalier de pierre, hésitant entre les demeures,
semblant mener plus haut que la ville elle‑même. Je le suivis. Il avait une
fin, je me trouvai devant une entrée, avec un rideau de perles bon marché.
Mon cœur, cette boussole, s’affola un peu. J’étais fort proche du caché,
de la révélation. Il me fut très difficile d’oser tendre la main, d’écarter le
rideau de perles. Je devinais derrière lui une silhouette blanche, pareille à
celle qui m’avait parlé à Lucques, dans les campaniles. Était‑ce le lieu et
la formule ? Était‑ce donc en cet endroit simple que je pourrais redonner
Son Nom à ma femme ?
Avant d’entrer, j’eus, il m’en souvient, une pensée presque futile à
« Seigneur, comme je suis maigre ! Je ressemble à un loup ! »
Je souris, j’entrai.
‑ Jacques…
Elle se tenait dans l’ombre, pâle, modelée par cette douce clarté.
‑ J’ai entendu le tonnerre de ton Oiseau de Feu.
‑ Oh ! Ça ne vaut pas Garuda.
J’avais envie de pleurer. Sa beauté était différente, plus mûre, moins
nana. Etait‑elle moins Assassin ? Et moins Kali ?
‑ Je t’ai sonné les cloches, sourit‑elle, comme dans le bon vieux temps.
‑ Mon amour… (Je n’avais jamais dit quelque chose d’aussi brutal)
C’était donc toi cette silhouette blanche. Tu étais partout.
‑ Je ne t’ai jamais quitté, Jacques. Nous avons des destins à accomplir.
‑ Quelqu’un sortit de l’ombre.
‑ Je te présente Jésus, dit‑elle avec une extrême douceur. C’est ton fils.
144