Orphée 2001 - Margelle

Le syndrome de la passante
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Paris, celle qui revient toujours
Je me souviens d’une femme qui marchait dans
la rue. Comment était‑elle ? J’ai oublié. Je ne sais
plus. […] Je me rappelle seulement qu’elle était
inoubliable. Patuit dea. Elle s’avançait en déesse
sur le pavé parisien. Je me disais en un éclair que
mon sort était suspendu à la démarche de la divi‑
nité. […] J’ai beaucoup rêvé à des femmes qui
ne me sont apparues que le temps d’un éclair qui
illumine la nuit.
(Jean d’Ormesson, Le Rapport Gabriel)
Profitant d’un instant de distraction de la République des fesses et de
leur Présidente, laquelle s’était absorbée dans la contemplation d’un étal
nommé « Filles à la vanille », je saisis l’occasion de m’évader un bref
instant. Dans ma tête, car mon corps restait le bateau ivre que cette peau
de vache avait cloué, nu, à ses poteaux bleu de Gêne.
J’avais besoin de m’expliquer ma situation, de la comprendre, de l’ad‑
mettre. J’étais, comme vous le constaterez encore, partagé entre désir
et frustration, poésie et révolte, grogne et animalité. Je ne lui avais rien
demandé, à ce cul ! De quel droit m’entraînait‑il ainsi dans Paris ? Je me
mis à réfléchir au syndrome de la passante. Il n’expliquait pas tout, il me
soulageait. D’autres, plus grands, plus expérimentés, y avaient passé.
Il existe dans la vie des hommes une relation d’amour qu’ils sont seuls
à connaître, c’est le syndrome de la passante. De toutes les relations que
nous vivons, c’est la plus brève, l’une des plus intenses, celle qui peut
laisser des souvenirs tout au long d’une vie. Je la nomme syndrome de
la passante, car, en général, les hommes la développent avec l’appari‑