Orphée 2001 - Margelle

modeste pour décourager les congés payés, suffisamment génial pour me
donner l’envie d’y passer du temps. Vous avez vu à quel point, depuis
le début de ce bouquin, je m’agite pour ne rien dire ? Je fais le con !
Embarqué dans une âpre controverse sur l’ontogenèse du Cul, je vole
un avion et je vous cause de mes flirts argentés avec les Helvètes ! Pour
ne citer que deux de mes innombrables méfaits. Ah ! J’en suis gêné pour
vous, si vous avez payé ce bouquin au prix auquel je suspecte mon éditeur
de l’avoir mis en vente. Pour me faire pardonner son inconduite, je prends
quelques bonnes résolutions à je vais me taire, me concentrer sur la quête
de mon Graal. Je commencerai par méditer. Rêver, peut‑être.
Seul. Sans lucarnes électroniques sur le monde.
Là, dans cette chambre blanche, face à ces murs dont les ombres mou‑
vantes me donnent l’heure.
Dans cette cellule de moine.
Avec pour seule et intérieure immensité celle de la Méditerranée qui a
été ma femme et à qui je reste uni.
Je devais changer de décor. Plus de bruit, plus de fureur. Plus de tech‑
nique. Pas de passions, pas de regrets. Un seul désir à l’approche du caché.
Décanter me prit du temps. Je ne véhiculai que des signes de colère et de
feu. Tsorne, le Raptor, les ruines de Rome, des vagues de fièvre et d’agi‑
tation, mes premières tentatives furent infructueuses.
Je louai une petite 125 et m’en fus me promener dans les montagnes et
les points de vue. Mes retrouvailles avec les lieux anciens n’étaient qu’une
illusion. Les Barbares étaient partout. D’accord pour Sant’Antonio que les
Chleuhs avaient envahi dès les années cinquante. Mais toi, Santa Eulalia !
De ta plage vierge, de l’île aux lapins, de la maison de pêcheur du vieux
Tchumeu, de la maison fraîche où je transperçais mes étés de Margot la
Noire et de ce puits où nous tirions de l’eau tous les matins, de toi, Santa
Eulalia, il ne restait rien. L’île était devenue un rendez‑vous de classes
très moyennes jouant au jet‑set. Je les regardai avec un peu d’incrédulité,
des boutiques mode et tendance avaient envahi les rues, il y avait moins
de vernissages, moins d’escrocs parisiens, moins de fous plus ou moins
nobles qui y pratiquaient la plongée et l’amour en apnée, moins de bars à
tapas et plus trace de ce vrai farniente espagnol des années dorées. La nuit,
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