Guide des valeurs pour la vie en démocratie - Council of Europe

matière de sécurité social et de soins de santé. Dans certains cas, ces systèmes étaient financés
par les impôts, dans d’autres par des cotisations à des systèmes d’assurance. La plupart des
Etats communistes avaient également des systèmes assurant à tous l’accès aux soins
médicaux, aux retraites pour les personnes âgées, au logement et à l’emploi, même si certains
droits économiques et sociaux, comme le droit de grève, n’étaient pas nécessairement
garantis.
Cependant, si nous voyons le monde d’aujourd’hui, il reste beaucoup à faire avant de pouvoir
affirmer que tous disposent du minimum vital : suffisamment de nourriture, une bonne santé,
un logement décent et un travail assurant un revenu suffisant pour vivre et faire vivre sa
famille. Un milliard d’adultes ne savent ni lire ni écrire. Plus de 500 millions d’enfants ne
suivent pas d’enseignement primaire. Plus d’1,5 milliards de personnes n’ont pas accès à des
installations sanitaires décentes ou à une eau véritablement potable. 35 000 enfants meurent
tous les jours, de faim ou de maladies qui pourraient être évitées grâce à la vaccination, ainsi
qu’à une eau et à des installations sanitaires plus propres. Pour ces adultes et ces enfants, les
droits de la Convention de l’ONU doivent plutôt apparaître comme des objectifs inaccessibles
que comme des garanties universelles.
Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que l’idée même de droits économiques et sociaux
ait été contestée depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale. L’écrivain canadien, Michael
Ignatieff, considérait que, alors que la défiance entre l’Union soviétique et ses anciens alliés
occidentaux se transformait en Guerre froide, deux conceptions distinctes des droits de
l’homme étaient apparues, l’une socialiste et l’autre capitaliste. La première mettait l’accent
sur les droits économiques et sociaux, la seconde, surtout les Etats-Unis, insistait plutôt sur les
droits civils et politiques.
En effet, la principale raison de la rédaction de deux conventions internationales séparées,
l’une sur les droits civils et politiques, l’autre sur les droits économiques, sociaux et culturels,
était de permettre aux gouvernement, notamment aux alliés des Etats-unis dans la guerre
froide, de ratifier la Convention sur les droits civils et politiques sans devoir accepter la
Convention sur les droits économiques, sociaux et culturels. C’est pour une raison similaire
que les droits économiques et sociaux n’ont pas été inclus dans la Convention européenne des
droits de l’homme (1950) mais font l’objet d’un document distinct, la Charte sociale
européenne.
Cependant, à cette époque, la situation était beaucoup plus complexe que ne le suggère cette
division idéologique. Dans les premières élections qui ont suivi la guerre, les électeurs de
plusieurs pays d’Europe de l’Ouest choisirent des gouvernements acquis à l’idée d’une
protection sociale assurée par l’Etat. On considérait qu’il fallait prendre des mesures pour
éviter que les troubles sociaux et politiques résultant de la Grande dépression des années 20 et
30, qui avaient conduit à la montée du fascisme en Europe, ne puissent se reproduire.
Il est également vrai que l’Union soviétique et les gouvernements du reste du Bloc
communiste accordèrent la priorité aux droits économiques et sociaux, plutôt qu’à la liberté
d’expression et aux autres droits civils. Cependant, l’Union soviétique était l’un des huit Etats
membres qui s’étaient abstenus lors du vote sur la Déclaration universelle des droits de
l’homme et c’étaient des pays en voie de développement, comme le Chili, Cuba, Panama et
les Philippines qui prirent l’initiative de la rédaction des principaux documents sur lesquels se
base le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Depuis la première publication de la Déclaration universelle et de la Convention européenne
des droits de l’homme, il y a eu un vif débat sur le statut des droits économiques et sociaux
par rapport à celui des droits civils et politiques. Ce débat porte, depuis lors, sur un certain
nombre de questions et de problèmes :
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