Guide des valeurs pour la vie en démocratie - Council of Europe

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mode de vie d’une minorité ou à violer les droits de ses membres en tant que citoyens de quelque façon que ce soit. De nombreux Etats européens ont adopté des lois de ce type. Par exemple, la France possède des lois qui interdisent les discours publics ou les écrits niant l’Holocauste, incitant à la haine raciale ou religieuse ou bien à la violence envers des personnes, en raison de leur orientation sexuelle. La négation de l’Holocauste est également interdite en Autriche. L’Allemagne prévoit des limitations, concernant l’incitation à la haine, qui visent également les idées néonazies. Le Parlement du Royaume-uni a également adopté des lois interdisant l’incitation à la haine raciale et religieuse. La portée de ces lois est double. Premièrement, dans une démocratie libérale, la liberté d’expression ne dispose pas d’un privilège particulier la plaçant au dessus d’autres droits et valeurs. Cependant, il s’agit d’un droit important qu’il faut protéger contre ceux qui tentent de le dénier à certains ou à tous. Deuxièmement, ceux qui veulent, soit dénier leur liberté d’expression à certaines personnes sur un sujet particulier, soit continuer à exprimer leurs points de vue, même si ceux-ci offensent ou humilient d’autres personnes, doivent avoir de solides arguments. Ils ne peuvent pas se contenter d’affirmer qu’ils ont un droit universel à agir (qu’il s’agisse de dire ce qu’ils pensent ou de protéger de la critique leurs conceptions religieuses). Ils doivent convaincre les autres que leurs prétentions sont plus fondées que celles de leurs opposants. Le philosophe américain, Stanley Fish, a observé que, dans une démocratie pluraliste caractérisée par l’existence de groupes, d’intérêts, de valeurs et de modes de vie différents, la liberté d’expression ne constitue pas toujours la référence adaptée dans les contextes de production de parole. Chaque fois que le droit de dire ce que l’on pense est contesté, il faut examiner les conséquences que pourrait avoir le fait d’exprimer, ou de ne pas exprimer, son point de vue et savoir si l’on a, ou non, plus à gagner ou à perdre en empêchant que ce point de vue ne soit exprimé. Références John Stuart Mill, On Liberty (De la liberté) , Clarendon Press, 1980. Stanley Fish, There’s No Such Thing as Free Speech…and it’s a good thing too (La liberté d'expression n'existe pas ... et c'est une bonne chose), Oxford University Press, 1994. 54
ETUDE DE CAS 5 : Liberté d’expression ou offense à la religion : l’affaire des caricatures danoises se moquant du Prophète Mahomet Robert Stradling Chronologie Chronologie de de l’affaire l’affaire Juillet 2005 : Au Danemark, des responsables musulmans rencontrent le Premier ministre pour se plaindre de la façon dont la presse traite de l’Islam. Le Premier ministre, Anders Fogh Rasmussen, répond que le gouvernement danois ne peut pas dicter aux journaux ce qu’ils doivent ou non imprimer. 30 septembre 2005 : Après qu’un auteur danois, Kare Bluitgen, se soit plaint de ne pouvoir trouver un illustrateur pour son livre sur le Prophète, en raison de la tradition islamique interdisant d’en faire le portrait, le journal danois, Jyllands-Posten, publie un éditorial critiquant l’autocensure dans les médias danois. Cet article est accompagné de 12 caricatures d’artistes anonymes. Certaines d’entre elles ne sont pas particulièrement critiques envers l’islam, d’autres ont un caractère nettement provocateur, notamment une image du Prophète avec un turban s’avérant être une bombe. D’autres caricatures associent également l’Islam au terrorisme. 17 octobre 2005 : Le journal égyptien al Fagr reproduit certaines caricatures en les qualifiant d’insultantes et de «bombes racistes ». Ce quotidien prédit un tollé, cependant, à ce moment là il y a peu de protestations. 20 octobre 2005 : Les ambassadeurs au Danemark de 10 pays musulmans demandent un entretien au Premier ministre pour se plaindre des caricatures. Décembre 2005 : Une délégation de responsables musulmans danois se rend au Moyen- Orient pour discuter du problème avec des responsables politiques et des érudits musulmans. Lors d’une réunion à La Mecque, l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) exprime sa préoccupation concernant «la haine croissante envers l’Islam et les Musulmans ». Les caricatures sont qualifiées de «profanation de l’image du Saint prophète Mahomet ». 10 janvier 2006 : Le journal norvégien, Magazinet , publie les caricatures danoises. 26 janvier 2006 : L’Arabie saoudite rappelle son ambassadeur au Danemark. La Libye ferme son ambassade dans ce pays. Le boycott des produits danois se répand de l’Arabie saoudite et du Koweït à d’autres pays arabes. 30 janvier 2006 : Le Jyllands-Posten présente ses excuses pour les offenses qu’ont pu causer les caricatures, ce qu’il avait refusé de faire auparavant. Il déclare : « selon nous, les 12 caricatures étaient neutres. Elles n’avaient pas pour but d’offenser et n’enfreignaient pas le droit danois. Cependant, elles ont manifestement offensé de nombreux musulmans, ce pour quoi nous présentons nos excuses. » Le Premier ministre danois se félicite de ces excuses mais défend la liberté de la presse. 55
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