Guide des valeurs pour la vie en démocratie - Council of Europe

Mais certains continuent à objecter que les droits économiques et sociaux ne constituent pas
des droits au même titre que les droits civils et politiques et, de fait, même dans des pays
parmi les plus développés du monde, certains droits économiques et sociaux ne sont pas
appliqués ou garantis aussi strictement que les droits civils et politiques. Ces critiques tendent
à se partager en deux camps. La position la plus extrême consiste à dire que ces droits sont
des normes universelles applicables à tous en toutes circonstances. Mais alors, affirment-ils,
de ce point de vue, les droits économiques et sociaux ne sont pas universels. Le droit de
constituer un syndicat ou d’y adhérer ne s’applique qu’aux salariés d’industries dans
lesquelles il est possible que la main d’œuvre s’organise en syndicat. Le droit aux soins de
santé ne s’applique qu’aux personnes qui sont malades. Le droit au logement social ne
s’applique qu’à ceux qui sont incapables de se procurer un logement, pour eux mêmes et pour
leurs familles, etc.
Ceux qui défendent ce point de vue poursuivent leur argumentation en affirmant qu’il est
injuste d’exiger des gens qui assurent leur subsistance et celle de leur famille une contribution
financière pour subvenir aux besoins des autres. Un exemple caractéristique de ce point de
vue consiste à contester le fait que les personnes n’ayant pas d’enfants doivent contribuer à
l’éducation des enfants des autres avec leurs impôts.
Une réponse courante, faite à ceux à ceux affirmant que les droits économiques et sociaux ne
sont pas des droits au sens habituel, est que l’usage du mot « universel » prête à confusion.
Selon cette conception, un droit est universel, non parce que tout le monde l’exerce, mais
parce que tout le monde pourrait l’exercer s’il en avait besoin. Nombre de gens ne seront
jamais arrêtés par la police ou accusés d’un crime, ils n’auront donc pas besoin d’invoquer le
droit à un procès équitable. De la même façon, la plupart des gens ne seront jamais confrontés
à la torture ou à l’esclavage. Ce qui rend ces droits universels, c’est le fait que tout le monde
puisse les invoquer si il en a besoin. Ce qui est important ici c’est le mot « si ».
Ceux qui affirment que les droits économiques et sociaux ont la même valeur que les droits
civils et politiques font remarquer que les droits sont une protection contre les décisions
arbitraires de ceux qui sont au pouvoir ou ont autorité sur nous. Au cours des deux siècles
derniers, on s’est battu pour la reconnaissance des droits civils et politiques, justement parce
que ceux qui gouvernaient exerçaient souvent leurs pouvoirs de façon arbitraire. Des
individus étaient punis pour avoir dit des choses qui déplaisaient aux gouvernants ou
simplement jetés et laissés en prison sans procès équitable ni digne de ce nom.
Ils poursuivent généralement leur argumentation en affirmant qu’il en va de même pour les
droits économiques et sociaux. Ces droits universels existent pour que les autorités ne
puissent décider arbitrairement qui peut bénéficier ou non d’un traitement médical, d’une
éducation et d’un logement social. C’est pourquoi le droit international et les droits nationaux
en matière économique et sociale comportent habituellement des mesures destinées à éviter
les discriminations contre les minorités et d’autres groupes de la société dans l’accès aux
services publics.
Une critique plus modérée de la nature des droits économiques et sociaux consiste à dire qu’il
y a des objectifs ou idéaux que tout gouvernement devrait chercher à atteindre mais qu’il ne
peut y arriver que progressivement, au fur et à mesure que le pays s’industrialise, s’enrichit et
commence à disposer des ressources financières et économiques nécessaires. Les défenseurs
de ce point de vue font généralement remarquer que le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels impose aux gouvernements d’ « agir… …au maximum de
ses ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits. »
Ils affirment que cette déclaration montre qu’il y une différence de statut très claire entre les
droits économiques et sociaux, d’une part, et les droits civils et politiques, de l’autre. On
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