Guide des valeurs pour la vie en démocratie - Council of Europe

Pourtant, il ne faut pas supposer que les dictatures et les autocraties sont les seules à vouloir
contrôler et censurer la manière dont les gens consultent et utilisent l’Internet. Depuis un
certain temps déjà, la plupart des démocraties libérales font pression sur les FAI pour qu’ils
barrent l’accès aux sites Internet de pornographie enfantine ; parfois, les internautes ayant
téléchargé des fichiers de pornographie enfantine ont été poursuivis. Dans ces mêmes
démocraties libérables, les médias, et en particulier les industries culturelles comme le
cinéma, la télévision et l’édition musicale, ont également pris une part active à la lutte contre
ceux qui piratent et diffusent leurs œuvres sur Internet.
Mais le changement peut-être le plus notable de ces dernières années résulte directement des
attaques terroristes du 11 septembre 2001. Un mois après ces attentats, le Congrès des Etats-
Unis a adopté la «Loi patriote »; d’autres États occidentaux leur ont emboîté le pas en
adoptant une législation qui vise à conférer à la police et à d’autres forces de sécurité de
nouveaux pouvoirs de surveillance et le droit d’obtenir des données personnelles sur les
internautes. Nombreux sont certes ceux qui seraient vraisemblablement favorables à ce type
de mesures pour protéger le public en général, mais on a de plus en plus le sentiment que ces
nouvelles attributions donnent aux autorités dans les démocraties libérales le moyen d’étendre
leur surveillance au-delà des seuls terroristes, pédophiles et pirates, à quiconque ne fait rien
d’illégal mais consulte des sites Internet controversés et radicaux ou utilise l’Internet pour
diffuser des informations susceptibles d’embarrasser et de compromettre politiquement le
gouvernement au pouvoir.
Par conséquent, l’on assiste depuis une dizaine d’années à un débat qui concerne
principalement les répercussions d’une extension des droits civils et politiques au domaine de
l’Internet visant à garantir aux internautes la liberté d’expression et la liberté d’association, à
faire en sorte qu’ils ne soient pas censurés et qu’ils ne fassent pas l’objet de sanctions s’ils
font valoir ces droits par le biais de l’Internet. Toutefois, au cours des 10 dernières années
environ, un autre débat est également apparu, qui porte sur la capacité de l’Internet à
contribuer à une démocratie plus directe. En 1994, on a inventé le terme de démocratie
électronique, même si certains préfèrent parler de cyberdémocratie ou de démocratie
numérique. Quel que soit le terme utilisé, l’objectif est plus ou moins le même : améliorer le
processus démocratique en réduisant le fossé entre les administrés et le gouvernement,
l’électorat et les élus.
À un certain niveau, cette évolution technologique ouvre la voie aux campagnes
électroniques, aux campagnes émanant de la base qui contournent les voies politiques
habituelles, aux dialogues politiques interactifs entre électeurs et candidats, voire aux
associations, aux partis et aux groupes d’intérêts politiques virtuels.
À un autre niveau, cette utilisation de l’Internet pourrait permettre aux gens d’être directement
associés aux processus décisionnels par le biais du vote électronique lors des élections et des
référendums électroniques. En 2002, un certain nombre d’expériences ont été menées en
Suisse, où l’on avait déjà introduit le vote par correspondance en complément des urnes
traditionnelles. Cette expérience a nécessité la mise en place de procédures visant à garantir
que le vote électronique soit aussi privé, sûr et exempt de tentatives de fraude que le système
traditionnel ou le vote par correspondance. La carte autorisant l’électeur à voter par voie
électronique comporte une bande autocollante sous laquelle se cache un mot de passe unique
pour cette personne. Il est impossible d’accéder au système de vote électronique sans avoir à
la fois le mot de passe et certaines autres données nominatives.
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