Guide des valeurs pour la vie en démocratie - Council of Europe

entièrement séparés géographiquement. La population de Bagdad, la capitale, est en fait
mixte. Deuxièmement, la richesse potentielle de l’Iraq est son pétrole, mais les puits de
pétrole ne sont pas également répartis dans le pays, et les Sunnites, en particulier, craignent
d’être perdants si le pétrole devait tomber aux mains des seuls Chiites et Kurdes.
Certaines critiques ont fait valoir que la stratégie des Etats-Unis en Afghanistan aurait été plus
indiquée pour l’Iraq. En l’occurrence, on a ici affaire à un autre pays caractérisé par des
clivages ethniques et religieux. On y trouve plusieurs grands groupes ethniques comme les
Pachtouns, les Tadjiks et les Ouzbeks, eux-mêmes composés de plusieurs tribus différentes,
parfois en guerre les unes contre les autres. Le gouvernement des Etats-Unis a voulu ici
mettre sur pied un gouvernement d’unité nationale, comprenant des représentants de la
plupart des factions et des chefs militaires s’étant opposé aux Talibans et rallier la population
autour d’un homme fort, Hamid Karzaï, chef de guerre pachtoune, disposant d’une base dans
le Sud, également acceptable aux yeux de certains autres dirigeants régionaux.
Enfin, les critiques font aussi habituellement remarquer que l’unique moyen d’instaurer la
démocratie en Iraq serait que le gouvernement des Etats-Unis et/ou les Nations Unies y
restent très longtemps, pour ramener ordre et stabilité, assurer le développement économique
et contribuer à la création d’une culture politique démocratique. Toutefois, comme ils le font
observer, de nombreux électeurs aux Etats-Unis et dans les autres pays de la Coalition veulent
retirer leurs troupes d’Iraq aussi rapidement que possible ; dans ces conditions, il est peu
probable qu’un futur gouvernement des Etats-Unis soit disposé à adopter une telle stratégie au
long cours.
Comment ceux et celles qui préconisent que l’on tente au plus vite d’introduire la démocratie
en Iraq ont-ils répondu aux questions et préoccupations soulevées par leurs opposants ? En
réponse à l’argument selon lequel la démocratie ne peut prospérer dans un pays sans tradition
ni culture politique libérale et démocratique, ils évoquent les événements survenus ces 20
dernières années en Europe de l’Est après la chute du communisme.
A ceux qui citent le cas du Rwanda et du Soudan et prétendent qu’un pays marqué par des
clivages ethniques, religieux et géographiques est par nature instable et, par conséquent, peu
propice au développement de la «plante démocratique », ils mentionnent les événements
survenus en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo et au Timor oriental. Sans aller jusqu’à dire que
ces pays ont d’ores et déjà achevé leur transition vers une démocratie pluraliste stable, ils font
plutôt valoir que les Nations Unies ont mis en place, dans ces pays, des programmes de
développement à long terme qui créent les conditions nécessaires à l’émergence d’institutions
et de processus démocratiques.
Les défenseurs de la position du gouvernement des Etats-Unis en Iraq font également valoir
que l’Iraq a peut-être en commun avec l’Afghanistan, le Rwanda et le Soudan des clivages
ethniques et religieux, mais que certaines autres différences importantes pourraient y faciliter
la transition démocratique. Ils font observer que 75 % de la population iraqienne est urbaine et
n’a aucun lien avec les chefs tribaux et chefs militaires des régions rurales. Par ailleurs, de
nombreux Iraqiens sont laïques et ne veulent pas être gouvernés par des religieux. Les recettes
pétrolières, une fois la production revenue à la normale, financeront un développement
économique rapide. De plus, l’alphabétisation et les niveaux d’instruction sont beaucoup plus
élevés en Iraq que dans les autres pays cités en exemple par les détracteurs.
A ceux qui semblent penser que le modèle de l’Afghanistan pourrait être plus approprié à
l’Iraq qu’une démocratisation immédiate, ils répondent que la stratégie d’un gouvernement
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