L 108, C

— — 112
der aux indigènes la plus grande somme de liberté compatible
avec l'ordre et la sécurité publique » (toujours le même sou
ci) (1). Et Jubault, chef du bureau arabe de Téniet en 1862,
trace un programme qui est une véritable anticipation : « Il
faut, écrit-il, que les populations viennent d'elles-mêmes au
progrès et dans ce sens nous croyons n'avoir pas de meilleure
voie à suivre que de créer une sorte de conseil communal indi
gène partout où la chose sera possible. Les éléments de ce
conseil se trouvent dans les djemaa des tribus; il suffirait de
les employer. Le meilleur moyen d'apprendre aux hommes à
connaître leurs intérêts est de les charger eux-mêmes de les
discuter... Cette méthode forcerait le peuple indigène à sortir
de l'état d'engourdissement moral et de stagnation dans lequel
il est plongé en lui donnant le sentiment de la vie sociale et de
la vie politique. » (2). Ainsi on amènera progressivement les
Indigènes à notre état de civilisation comme le recommandent
les chefs de l'Armée et comme semblent l'accepter certains Indi
gènes eux-mêmes (3). L'Algérie deviendra l'image de la Mé
tropole. (4).
Mais l'assimilation ne se bornera pas à la communauté
d'institutions, ni même de civilisation. Elle doit être totale. Pour
Pellissier de Reynaud « il n'y a de conquêtes légitimes et dura
bles que là où le peuple vainqueur élève à lui le peuple vaincu,
de manière à ce que l'avenir amène une fusion complète » et
il se déclare partisan des mariages mixtes et même de la poly
gamie (5). Bugeaud, dans ses instructions aux bureaux arabes
à propos des Indigènes, dit qu'il espère « leur faire supporter
d'abord notre domination, les y accoutumer plus tard et à la
longue les identifier avec nous, de manière à ne former qu'un
(1) G. 1864, Orléansville, novembre.
(2) G. Téniet-el-Had, 1" T. 1862.
(3) N 450, 1854, Rapport du Gl Camou.
N 1805. Randon dans son rapport à IPEmpereur de novembre 1862
rapporte les paroles d'un conseiller général indigène disant : « mes compa
triotes comprendront que la conquête de la France n'a pas eu pour objet de
les asservir, mais de les assimiler ». Le désir d'assimilation se retrouve même
dans le Sénatus-consulte de 1863 : Duval et Warnier (57) 125.
(4) A. de Montgravier (1) 2e lettre p. 26.
(5) Pellissier (14) 424.