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préfère laisser perdre les légumes récoltés en trop grande abon
dance plutôt que d'en tirer un bénéfice (1).
Les débuts furent difficiles. L'administration dut avancer
les semences à charge de restitution. La première récolte donna
273 quintaux d'orge, 85 quintaux de blé, et 800 quintaux de
paille. Le troupeau comprenait seulement 8 bœufs, 4 vaches,
4 mulets, 90 moutons ou brebis. Légumes et fruits restèrent
rares, car on ne put défricher qu'un seul jardin d'environ un
hectare et demi qui fournit seulement des melons et des navets.
Mais les progrès suivirent rapidement. Les cultures de cé
réales s'étendirent, surtout celles de blé;
ment on creusa 18 silos autour de la Smala et,
pour l'emmagasine-
ce nombre ne
suffisant pas, on construisit un magasin sur le même modèle
que les maisons et on y déposa les céréales qui devaient être
promptement consommées. Sept hectares de jardin furent mis
en valeur et grâce à d'importantes conduites d'eau et à quatre
grands bassins d'irrigation de la contenance de 27 à 34 mètres
cubes chacun, ils donnèrent en abondance tous les légumes pos
sibles (choux, salades, haricots, oignons, citrouilles, et surtout
melons et pastèques) et quantité d'arbres fruitiers (poiriers, pê
chers, pommiers et plus encore, cerisiers et noyers jusqu'alors
inconnus dans le pays) dont les plants avaient été envoyés de
la pépinière d'Alger. L'intérieur et les abords du village furent
garnis de mûriers. La pomme de terre, essayée pour la pre
mière fois, donna du 10 pour 1. Les ceps de vigne se comptèrent
par milliers. Le succès du tabac fut malheureusement compro
mis par l'inhabileté ou la négligence du soldat qui servit de
moniteur.
(1) Si l'on songe que, suivant les conceptions de Lapasset, cette colonie
avait également un but éducatif et qu'elle était destinée à essaimer, on ne
peut s'empêcher d'évoquer les fondateurs du mouvement coopératif, les Equi
tables pionniers de Rochdale dont le manifeste, rédigé en 1844, s'exprimait
ainsi (c'est nous qui soulignons) : « Sitôt qu'il sera possible, la société procé
dera à l'organisation de la production, de la distribution et de l'éducation,
dans son sein et par ses propres moyens ou, en d'autres termes, elle se cons
tituera en colonie autonome où tous les intérêts seront mis en commun. La
société viendra en aide aux autres sociétés coopératives qui voudront fonder
de semblables colonies ». (Antonelli, Manuel d'économie politique, 1945, tome
I, p. 380).