Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

REVUE DE PRESSE-PRESS REVIEW-BERHEVOKA ÇAPÊ-RlVISTA STAMPA-DENTRO DE LA PRENSA-BASIN ÖZETi
L'Humanité - 3 janvier 1994
Droit d'asile
Rojin, jeune Kurde très
surveillée
Assignée à résidence
dans les Deux-Sèrres et
toujours menacée
d'expulsion, la jeune
femme a passé le
réreillon du nourel an
arec ses amis du
comité de soutien.
De notre envoyée spéciale.
«
BONNE année Rojin
et vive la liberté! »
C'est par ces mots
que ses amis ont salué pour le
Jour de l'An la jeune Kurde,
assignée à résidence dans les
Deux-Sèvres depuis le 19 novembre
sur ordre de Charles
Pasqua. Les amis de Rojin, c'est
le comité de soutien qui grossit
de semaine en semaine et a déjà
recueilli près de cinq cents signatures.
Pour feter l'année nouvelle,
il avait organisé, samedi, un repas
amical dans une grande
maison en pleine campagne.
Pour l'occasion, Rojin avait revêtu
la robe de fete des femmes
kurdes: étincelante, toute pailletée
de rose et tombant jusqu'aux
pieds. Heureuse d'être
ainsi entourée, toute émue, elle
passa à son poignet un bracelet
d'argent, cadeau de nouvel an
du comité. Sur l'une des faces
on a gravé son nom et sur l'autre
« Vive la liberté ». Elle a
également reçu un cadeau du
maire de Niort, Bernard Rellec :
une radio pour se sentir moins
seule et écouter ses cassettes de
musique kurde.
En ce début d'année, Rojin
est habitée de sentiments
contradictoires. Elle est triste
d'être coupée des siens mais la
surveillance policiére étouffante
qu'elle connaissai t depuis son
arrestation le 18 novembre a
été, depuis, allégée. Les quatre
policiers qui ne la quittaient pas
d'une semelle, sont partis mercredi
dernier. Et quelques jours
avant, sa résidence avait été
transferée de Saint-Pardoux à
Refannes, où l'Hôtel du
commerce qui l'abrite désormais
offre davantage d'espace et de
commodités. Mais Rojin n'en
est pas plus libre pour autant.
&s possibilités de mouvement
sont limitées au canton et elle
est étroitement surveillée par la
gendarmerie de Menigoute, qui
s'informe de tous ses déplacements
et ptultiplie les rondes de
contrôle. Samedi, par exemple,
avant d'aller déjeuner avec elle,
j'ai accompagné Rojin à Menigoute,
où elle a dû signer sa
feuille de présence. Le gendarme
a pris note de son programme
dei la iournée et du nom des
personnes qui l'accompagnaient...
Grave question pour Rojin et
ses amis: le départ des RG est-il
un bon signe ou un piége?
Avant de partir, ils lui ont dit
que l'arrêté d'expulsion qui pesait
sur elle était levé. Depuis,
Rojin essaie d'en obtenir une
confirmation écrite. En vain. Le
député UDF, M. Maurisset, a
bien dit la semaine dernière à
une délégation du comité qu'il
se faisait fort d'obtenir cette
preuve écrite auprès du cabinet
du ministre de l'Intérieur. Mais
jusqu'ici rien n'est venu. Et il
n'y a pas eu non plus de réponse
aux lettres adressées par Rojin à
tous les parlementaires du département.
Deux députés UDF,
une socialiste (Ségoléne Royal),
deux sénateurs de droite et un
député européen PS, Michel
Hervé.
Une attitude qui met un peu
mal à l'aise les militants socialistes,
membres du comité de
soutien à Rojin. Gérard Doray,
secrétaire de la section PS de
Niort et aviculteur de son état,
le reconnaît: « Pour nous, ditil,
il y a bien sûr l'aspect humain
mais au-delà, la défense de
valeurs qui sont les nôtres et
parmi lesquelles le soutien au
peuple en recherche d'identité. »
Pour tous les membres du
comité, l'approche du 12 janvier
est ressentie avec appréhension,
à cause de la visite officielle
que doit faire en France le
premier ministre turc,
Mo< Tanju Ciller. « Le gouvernement
français ne va-t-il pas
être tenté de lui faire plaisir et
de sacrifier Rojin et peut-être
d'autres réfugiés kurdes? », demande
Francis Vacker. secrétaire
du comité de soutien, et.
communiste. Nous devons être
vigilants. » Il annonce une demande
d'audience auprès de
Chartes Pasqua pour les prochains
jours.
Pour Chantal Mathieu, qui.
représente les Verts, « la démocratie
et la liberté sont bafouées
dans ce pays ». Dénonçant lés
ventes d'armes à la Turquie, elle
ajoute : « Cela intéresse tout le
monde, qu'on soit de gauche ou
de droite. C'est ce qui est intéressant
dans notre soutien à Rojin
: autour d'elle se réunissent
des gens de tous bords luttant
'pour une même cause. »
Rojin ne dira pas le
contraire, qui a trouvé ici une
deuxième famille chaque jour
élargie. Ainsi a-t-elle passé le
réveillon du 31 avec une cinquantaine
de jeunes du Mouvement
de la jeunesse rurale chrétienne
qui l'ont invitée à leur
soirée dansante. Rojin n'en est
pas surprise : il y a déjà parmi
ses amis plusieurs chrétiens et
même des curés. Celui de Saint-
Pardoux lui a rendu visite plusieurs
fois et Roger Godet, responsable
diocésain des migrants,
est aujourd'hui parmi
ceux qui l'entourent.
« Jamais je ne vous oublierai
», dit-elle à ses nouveaux
amis qui lui font un peu oublier
sa déception à l'égard d'une
France en laquelle elle croyait
tant et dont elle a le sentiment
que le gouvernement l'a trahie.
FRANÇOISE
GERMAIN-ROBIN
Scènes d'émeutes à Bruxelles
De notre correspondant
particulier.
LEproblème kurde est une
mèche d'amâdou. Deux
quartiers de Bruxelles,
Schaerbeek et Saint-Josse, ont
vécu une nuit d'émeutes. Samedi,
cent cinquante Kurdes venus
de Bonn et participant à
une c( marche de la liberté » se
sont réunis dans une salle louée
à Saint-Josse, commune où les
Turcs sont nombreux. Plusieurs
centaines d'entre eux se sont
rassemblés devant le bâtiment,
exigeant le départ des Kordes el
le retrait du drapeau kurde déployé
sur là façade. la gendar-
'merie intervint pour évacuer les
Kurdes. Ce qui donna lieu à des
affrontements violents avec les
contre-manifestants turcs. Un
policier et cinq gendarmes ont
été blessés, dont un hospitalisé.
« Ils ont brûlé un drapeau
turc et menacé de s'en prendre à
nos cafes et à nos maisons »,
clame-t-on côté' turc. Côté
kurde, on accuse le consulat de
Turquie d'avoir lâché les
« loups gris » (extrême droite
turque). Si le bourgmestre de
Saint-Josse, Guy Cudell, parle
de « provocation » de la part
des Kurdes pour avoir. organisé
\lne manifestation ên pler~
« quartier turc », le ministre de
l'Intérieur, Louis Tobback l
pointe du doigt les contremanifestants
turcs : « Quand je
vois les rapports de gendarmerie
(.. ,), on me confirme de tou.
tes parts qu'il y a eu une forte
présence des « loups gris ». »
Dimanche soir, le foyer
d'agitation était ravivé par des
bandes de jeunes Turcs masqués
et armés qui saccagèrent une pâtisserie
kurde déjà mise à mal la
veille. Cinquante mineurs ont
été interpellés, Nombre de voitures
ont été endommagées, des
magasins
réduites en miettes.
PIERRE-ANDRE
mis à sac, des vitrines
CHANZY
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