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ICOM International Council of Museums - Museo Estancia Jesuitica ...

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Célius: Le musée, le passé et l’histoire<br />

(années 1910-1930) puis de la consolidation (1940-1950) de l’école haïtienne<br />

d’ethnologie qui a opéré une redéfinition de la communauté haïtienne. Celle-ci ne se<br />

conçoit point exclusivement à partir d’une légitimité politique conférée par la conquête<br />

de l’indépendance, mais aussi, désormais, par ses composantes culturelles, dont<br />

certaines héritées d’Afrique, comme le vodou. L’ethnologie procède ainsi à un<br />

élargissement de l’horizon du patrimoine commun que réfute la politique patrimoniale<br />

de l’administration Vincent qui, au contraire, maintient ou réintroduit la prohibition du<br />

vodou, expression d’un état de barbarie aux yeux d’une certaine élite. Celle-ci accepte<br />

tout au plus une valorisation du vodou qui procède à sa folklorisation. Un processus<br />

effectivement engagé 32 qui n’empêchera pas l’État de s’associer à une grande<br />

« campagne antisupertitieuse » menée contre le vodou par le clergé catholique<br />

(breton) en 1941. C’est pour tenter de sauver la mémoire d’une religion vouée à<br />

l’autodafé que Jacques Roumain obtient du gouvernement d’Élie Lescot (1941-1946) la<br />

création, en 1941, d’un Bureau d’ethnologie doté d’un musée. Le Bureau fera partie de<br />

l’INAHCA en 1983. Le contexte du début des années 1980 n’est décidément plus le<br />

même que celui de la fin des années 1930. On verra le MUPANAH exposer des objets<br />

vodou. Le nouveau musée s’enrichira d’artefacts précolombiens issus de la collection<br />

du musée du Bureau d’ethnologie. Il dispose d’une galerie qui recevra des expositions<br />

de peinture haïtienne contemporaine, la création picturale, plastique plus largement,<br />

ayant connu un développement sans précédent dans le pays depuis les années 1940.<br />

Je ne m’attarderai pas sur les soubresauts qu’à connus le MUPANAH depuis 1986, ni<br />

sur les efforts d’un « recentrage » sur sa « vocation historique » qui semble se<br />

dessiner depuis peu. Je noterai qu’il a été conçu dans une perspective plus ou moins<br />

encyclopédique, comme le Musée National et le Palais du Centenaire, chaque<br />

établissement portant l’empreinte du contexte de sa création, de la conception globale<br />

alors en vigueur des éléments constitutifs du patrimoine national. D’autres paramètres<br />

confirment l’inscription du Palais dans cette généalogie. Certes Catts Pressoir nous<br />

apprend que l’édifice de 1904 est démoli en 1952 après être laissé à l’abandon. Cela<br />

signifie qu’il avait été préalablement désaffecté, probablement en 1938 au pr<strong>of</strong>it du<br />

nouveau Musée National. Reste à documenter cette proposition pour laquelle je ne<br />

dispose que de quelques indices pour l’instant. Trois œuvres conservées actuellement<br />

au MUPANAH, et qui étaient exposées au Musée National 33 , pourraient avoir été<br />

commandées par Nord Alexis pour le Palais de l’Indépendance. La première est un<br />

tableau anonyme intitulé Proclamation de l’indépendance. La seconde, une peinture<br />

attribuée à Louis Rigaud, montre la cérémonie de Bénédiction des drapeaux lors de la<br />

célébration du Centenaire ; on y reconnaît, entre autres, le président Alexis placé à<br />

contre-jour sous l’arcade au centre de la composition. La troisième est Le Serment des<br />

Ancêtres, tableau attribué à Lorvana Pierrot Lagojanis. L’œuvre, dans laquelle apparaît<br />

aussi Nord Alexis, s’apparente, dans sa conception d’ensemble (une allégorie), au<br />

Tableau historique du Centenaire dont la commande pour le Palais du Centenaire, au<br />

même artiste, est bien attestée 34 . En plus de ces indices, il apparaît qu’avec le Palais<br />

32 Kate Ramsey, « Without One Ritual Note: Folklore Performance and the Haitian State, 1935-1946»,<br />

Radical History Review, 84, 2002, pp. 7-41; «Prohibition, persecution and performance: anthropology<br />

and the penalization <strong>of</strong> Vodou in the Mid-Twentieth Century», Gradhiva, n. s., no 1, 2005, pp. 165-179.<br />

33 Luis Marinas, «La peinture haïtienne», Le Nouvelliste, 27 janvier 1964 ; Michel-Philippe Lerebours,<br />

Haïti et ses peintres de 1804 à 1980. Souffrances et espoirs d’un peuple, Port-au-Prince, Imprimeur II,<br />

1989, t. I, p. 157.<br />

34 Antoine Augustin reprend le descriptif du tableau (op. cit., pp. 43-44). Une lettre de « Citoyens des<br />

Gonaïves » datée du 14 janvier 1904, publiée dans Le Nouvelliste du 23 janvier, évoque ce tableau<br />

après une visite du Palais. Parmi les trois tableaux à thèmes historiques vus par Marinas (op. cit.) au<br />

Musée National en 1964, il y a une Célébration du Centenaire. Lerebours (op. cit.) semble suggérer<br />

qu’il s’agit du même tableau connu maintenant sous le titre de Bénédiction des drapeaux qu’il attribue<br />

à Louis Rigaud de même que la Proclamation de l’indépendance. Il y a toutefois ce Tableau historique<br />

du Centenaire, comme on l’appelait en 1904, de Mme Lagojanis qui n’est cependant pas mentionné<br />

dans les collections du MUPANAH. Par ailleurs, on sait que Le serment des ancêtres de Guillaume<br />

Guillon-Lethière, œuvre <strong>of</strong>ferte au gouvernement haïtien par l’artiste guadeloupéen en 1823, a été<br />

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