ICOM International Council of Museums - Museo Estancia Jesuitica ...

Gourarier: Un musée humaniste
de Sapiens, ce qui nous renvoie à la question qui est en train de remplacer celle du
chaînon manquant : pourquoi sommes nous une seule espèce, à ce point semblable et
comment se fait-il que nous soyons la seule alors qu’il a existé par le passé plusieurs
espèces d’hommes qui ont cohabité ensemble? Du chaînon manquant à l’épopée des
espèces disparus, la troisième section de l’exposition consacrée à « l’homme et la
femme des origines » retrace l’évolution de notre regard sur l’Homme préhistorique,
depuis les premières grandes découvertes jusqu’à nos jours.
L’esprit humain ne se construit pas seulement à partir de ses acquis.
Notre pensée, qui a su s’adapter à tous les environnements, est préparée pour
recevoir l’éducation et la culture développées par chaque société humaine. Dés lors, le
propre de l’Homme par excellence n’est-ce pas son cerveau et la façon dont il
fonctionne ? C’est autour de cette question que s’articule la section consacrée à « Une
histoire naturelle de l’Homme », qui tente de cerner les invariants de la nature humaine
pour en définir la ou les spécificités.
Ces invariants sont ceux que l’espèce humaine partage avec les autres espèces
animales : par notre anatomie nous appartenons au règne animal, de l’embranchement
des vertébrés, de l’ordre des mammifères, de la famille des primates et du genre homo
et comme tous les animaux nous connaissons la malformation, la maladie et le
vieillissement. Comme bien
d’autres espèces animales, nous disposons également de cinq sens pour
appréhender le monde mais là commencent aussi nos spécificités . Comme les
animaux, c’est par nos sens que nous sommes en contact avec le monde extérieur.
Pourtant, si la vue, l’ouie ou l’odorat sont développés différemment et parfois mieux par
d’autres animaux, nous sommes, en revanche, les seuls à modifier nos sens pour
améliorer notre perception et par là même notre emprise sur le monde. Des
trépanations et déformations crâniennes aux lunettes et téléphones portables,
comment avons-nous transformé notre corps au point de lui permettre, à son tour, de
transformer le monde ? Ces questions sont au centre de la section consacrée à Une
histoire naturelle de l’espèce humaine.
5. Si des peuples sans écriture ont existé, les sociétés ne sont jamais sans histoire.
Souvent le découvreur, l’explorateur ou l’ethnologue, parti d’Europe pour
rencontrer d’autres cultures, a regardé les indigènes des terres lointaines comme de
nouveaux Adam et Eve, vivant au paradis et hors du temps, dans des isolats, des
mondes proches de l’utopie, où les rapport humains seraient arrivés depuis toujours à
un point d ‘équilibre parfait, à l’abri de toute pollution des autres sociétés humaines. Ce
mythe a été conforté par le qualificatif qui fut appliqué à bien des sociétés de
chasseurs-cueilleurs : peuples sans écritures. Dés lors, seul l’Européen observateur
pouvait se revendiquer comme issu d’une histoire, ce qui était dénié à son
interlocuteur, l’indigène observé. C’est donc en toute bonne conscience que l’on
pouvait enseigner, dans les anciennes colonies françaises, aux enfants des écoles de
Dakar ou de Port aux Princes que tout avait commencé avec nos ancêtres les Gaulois
et devait se continuer avec Jeanne d’Arc et la Révolution Française.
Pourtant, plus nos connaissances de l’ancienneté des peuplements humains sur les
cinq continents se sont confortées et plus l’existence de sociétés ayant subsisté à
l’écart de toute autre pendant des milliers voire des dizaines de milliers d’années
semble improbable. Toutes les sociétés ont une histoire, ce qu’une récente exposition
du Musée de l’Homme consacrée aux inuit a démontré récemment en soulignant à
quel point les chasseur-cueilleurs du Groenland ont été influencé par des apports
extérieurs, en particulier de métaux pour passer, vers l’ An Mil, d’une civilisation, celle
de Dorset, centrée sur le phoque à une autre, celle de Thulé, ouverte sue la chasse à
la baleine.
301