ICOM International Council of Museums - Museo Estancia Jesuitica ...

Gorgas: Muséologie et histoire. Les changements de paradigme
Une croix, un lasso et une flèche, de vieux outils de l´homme, de nos jours abaissés ou élevés comme des
symboles; ils m´émerveillent, je ne sais pourquoi, quand sur la terre il n´y a rien qui ne puisse être effacé
par l´oubli ou altéré par la mémoire et quand personne ne sait dans quelles images ils seront traduits par
l´avenir.
(Jorge Luis Borges)
Une question qui excède largement les musées appelés historiques. Le débat sur les
rapports conflictuels entre muséologie et histoire porte l´interrogation sur le statut
scientifique des sciences sociales, sur la prééminence des unes sur les autres et sur la
façon dont elles se complètent.
Le même sujet nous renvoie d´ailleurs, au rôle historique attribué aux musées, perçus
comme des espaces privilégiés de représentation et de construction de la mémoire.
A l´aide de ses disciplines, les sciences humaines essayent d´interpréter et d´expliquer
les phénomènes sociaux. La grande différence avec les sciences exactes et naturelles
est, peut-être, que ses buts ne sont pas donnés naturellement, mais qu´il s´agit de
constructions, par conséquent, ses modèles d´enquête doivent être adéquats à la
complexité des objets.
Il paraît, comme dit Maraisse, que l´histoire a cru jouer un rôle royal, et elle a relégué la
plupart des autres disciplines, y comprise la Muséologie, au rang de sciences
auxiliaires.
L´histoire n´échappe pas, pourtant, au problème de la scientificité des sciences
sociales, et elle ne peut pas non plus répondre à la question de la signification des faits
sociaux et au sens des actions humaines.
Le même concept de récit ou discours propre à la méthode historique renvoie en
quelque sorte, à la littérature et à la sémantique.
L´objet d´étude de la muséologie, (le rapport spécifique de l´homme avec la réalité
dans un contexte différent de celui d´origine), n´est pas étranger à cette complexité
pour laquelle il doit utiliser d´autres disciplines, afin de valoriser, comprendre et
découvrir des significations et des sens.
Quand on étudie l´histoire même des musées, on comprend jusqu´à quel point ils ont
contribué au développement de la connaissance scientifique, soit grâce aux
témoignages qu´ils conservent ou aux idées qu´ils communiquent. C´est cela qui ouvre
un champ d´étude sur le phénomène muséal et sur le problème de la
« communicabilité », si cher à toutes les sciences sociales.
On va essayer de réfléchir sur la manière dont l´histoire et surtout les courants
historiographiques, ont tenu des influences réciproques avec la Muséologie et on va
essayer d´exposer comment la théorie et la pratique muséale ont tracé des routes
dans l´historiographie actuelle.
On se demande, ainsi que Martin Schaerer, dans quelle mesure la muséologie et les
musées sont responsables des différents points de vue de l´histoire, car ce que
l´histoire présente avec des mots, avec des écrits, avec des essais, le musée le montre
en images, en représentations. Ce sont ces représentations où l´on montre les
rapports sociaux et politiques qui s´incarnent dans le sens des objets et du milieu où ils
sont présentés.
Le musée est ainsi compris comme un endroit d´échanges culturelles de production de
sens et où les objets s´effacent dans un réseau de significations et d´appréciations.
Lorsque le musée procure une représentation, il se propose en surface d´inscription. Il
est juge et partie, il choisit ce dont il faut se rappeler et ce qu´il faut oublier, alors il
s´institue en tribunal. « Quand on dit tribunal, il ne s´agit pas seulement de l´institution
juridique, mais ça va plus loin : ses procédés, son travail de recherche, l´identification
d´objets témoins, l´authenticité critique, le registre, la comparution des parties, la
décision, l´exécution, etc. Enfin, tout ce qui caractérise l´historiographie aussi bien que
la muséologie. » 1
1 Déotte, Jean-Louis. Catastrofe y Olvido: Las Ruinas, Europa, el Museo. Pag. 24
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