Amour et sexualité chez l’adolescent
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LES PROPOS DES JEUNES ET DES ÉDUCATEURS<br />
111<br />
Ces propos des éducateurs nous perm<strong>et</strong>tent de voir comment s’exerce,<br />
<strong>chez</strong> ces résidants play-boys, le double standard dénoncé par plusieurs féministes<br />
(voir notamment Morokoff, 2000). Ce double standard dénie à la<br />
femme son autonomie sexuelle <strong>et</strong> lui confère plutôt un rôle de gardienne<br />
de la morale. L’exercice autonome de la sexualité se fait, dans ce contexte,<br />
au prix d’une perte de statut social. À c<strong>et</strong> égard, les résidants, du moins<br />
dans le discours des éducateurs, corroborent la démonstration de Morokoff.<br />
En eff<strong>et</strong>, ils entr<strong>et</strong>iendraient la vision que leur blonde doit être sexuellement<br />
« pure ». Quant à celles qui ne correspondraient pas à c<strong>et</strong>te image, elles<br />
sont qualifiées de « salopes ». Ce déni d’une sexualité autonome serait également<br />
le corollaire, selon Morokoff, de la hiérarchisation des rôles sexuels<br />
caractéristique de notre société par laquelle la femme serait maintenue<br />
dans une position inférieure.<br />
Neuf des éducateurs rencontrés dans les quatre groupes de discussion<br />
sont d’avis que les relations amoureuses des résidants sont irrespectueuses.<br />
C<strong>et</strong> irrespect prend différents visages dont celui de la négligence <strong>et</strong> parfois<br />
même de la violence. Certains éducateurs qualifient les résidants de<br />
« conteurs », d’autres taxent leurs comportements à l’égard de leurs partenaires<br />
de « games <strong>et</strong> d’accroires ». Ce manque de respect se traduit notamment<br />
par l’échange des partenaires sexuelles, comme le suggère l’intervention<br />
suivante.<br />
C’est toujours les mêmes blondes qui circulent, ils connaissent toutes les<br />
mêmes filles <strong>et</strong> parlent de leurs expériences avec la même fille. (FG3, 187-<br />
192)<br />
Deux autres situations semblent fréquentes : certains résidants laissent<br />
présager de bonnes intentions aux partenaires potentielles, alors qu’à leur<br />
insu, ils tiennent un tout autre discours. D’autres sont incapables d’exprimer<br />
honnêtement leur absence d’intérêt à leur partenaire, alors ils fréquentent<br />
d’autres filles en catimini. Ce manque de respect culmine, <strong>chez</strong> certains<br />
résidants, dans la violence conjugale <strong>et</strong> sexuelle, comme en témoignent ces<br />
deux éducateurs.<br />
Il l’a déjà frappée pendant qu’ [elle] était enceinte, il lui manquait de<br />
respect régulièrement, il parlait à plein d’autres filles. (FG4, 728-730)<br />
Leur blonde, c’est pratiquement des agressions qu’ils font. Ils ne s’en rendent<br />
pratiquement pas compte, tu sais. La jeune fille qui ne veut pas, lui qui<br />
insiste, insiste, [elle] finit par céder. C’est pratiquement une agression<br />
sexuelle, [mais] ils ne s’en rendent pas compte. (FG2, 1746-1452)<br />
Selon certains éducateurs, les partenaires des résidants présentent de<br />
nombreuses similitudes avec eux : elles viennent des mêmes milieux (centres<br />
d’accueil), fréquentent les mêmes endroits (ressources d’aide) <strong>et</strong> éprouvent<br />
des difficultés de même nature. Certains éducateurs croient que nombre