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La Suisse et les transactions sur l'or pendant la Seconde Guerre ...

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Rapport intermédiaire <strong>sur</strong> l’or 97<br />

Chapitre 2<br />

Discussions au sein des organes de <strong>la</strong> Banque nationale suisse<br />

Autre conséquence des avertissements des Alliés: <strong>la</strong> BNS se voyait contrainte d’examiner d’un<br />

œil plus critique ses achats d’or à <strong>la</strong> Reichsbank, au risque, en cas de victoire des Alliés, de<br />

devoir restituer l’or ou de payer une compensation matérielle. En mai 1943 déjà, un Conseiller<br />

fédéral envisagea c<strong>et</strong>te éventualité: W<strong>et</strong>ter nota dans son journal, le 1 er mai 1943, après un<br />

entr<strong>et</strong>ien avec un <strong>Suisse</strong> de r<strong>et</strong>our des Etats-Unis:<br />

«perspectives […] défavorab<strong>les</strong>, aussi pour nos avoirs <strong>et</strong> notre or après <strong>la</strong> guerre. Peut-être<br />

nous fera-t-on payer nous aussi». 136<br />

Aujourd’hui il est de notoriété, que <strong>les</strong> dirigeants de <strong>la</strong> BNS savaient que <strong>les</strong> livraisons d’or de<br />

<strong>la</strong> Reichsbank contenaient également de l’or belge pillé. Hirs dut en faire l’aveu lors des<br />

négociations de Washington. Lorsqu’on lui demanda s’il n’en avait «eu vraiment aucune idée»,<br />

il répondit: «Bien sûr que nous le savions.» 137 Pour <strong>la</strong> BNS, le fait de savoir ne constituait pas<br />

une raison de cesser ses achats d’or. 138<br />

Ce n’est qu’à partir du milieu de l’année 1943, après que <strong>les</strong> médias se furent emparés du<br />

suj<strong>et</strong> 139 <strong>et</strong> que le Gouverneur de <strong>la</strong> Banque de France, Yves de Boisanger, eut attiré l’attention<br />

de <strong>la</strong> BNS <strong>sur</strong> <strong>la</strong> responsabilité qu’elle endossait, que <strong>la</strong> question de l’or pillé fit l’obj<strong>et</strong> de<br />

débats au sein de son organe de direction. A <strong>la</strong> fin des mois de juill<strong>et</strong> <strong>et</strong> d’août 1943, deux<br />

réunions du Comité de banque furent animées par <strong>les</strong> discussions décisives <strong>sur</strong> <strong>la</strong> poursuite ou<br />

<strong>la</strong> cessation des achats d’or à <strong>la</strong> Reichsbank. El<strong>les</strong> méritent d’être évoquées plus en détail ici,<br />

dans <strong>la</strong> me<strong>sur</strong>e où el<strong>les</strong> reflètent <strong>les</strong> diverses positions.<br />

En premier lieu, le président du Conseil de banque, Bachmann, souleva <strong>la</strong> question de savoir si,<br />

à propos du commerce d’or avec <strong>la</strong> Reichsbank, il ne fal<strong>la</strong>it pas interroger le Conseil fédéral<br />

pour s’appuyer, comme <strong>la</strong> Suède, «davantage <strong>sur</strong> <strong>les</strong> conceptions anglo-américaines». Il fit<br />

consigner c<strong>la</strong>irement dans le procès-verbal qu’il ne pouvait partager <strong>la</strong> «conception de M.<br />

Weber, selon <strong>la</strong>quelle <strong>la</strong> <strong>Suisse</strong>, parce qu’elle possède une monnaie-or, est contrainte<br />

d’accepter de l’or proposé par des Etats étrangers». <strong>La</strong> question avait «plus que jamais un<br />

caractère politique. C’est pourquoi le Conseil fédéral devrait se prononcer <strong>sur</strong> le<br />

comportement que <strong>la</strong> banque doit adopter face à ce genre de cessions d’or.» 140 C<strong>et</strong>te tentative<br />

de modérer <strong>les</strong> <strong>transactions</strong> <strong>sur</strong> l’or avec <strong>la</strong> Reichsbank obtint un certain soutien, mais dans<br />

l’ensemble, <strong>la</strong> position de <strong>la</strong> direction générale l’emporta. On rétorqua pour l’essentiel qu’«on<br />

nous a tout bloqué du côté allié», alors que «<strong>les</strong> Allemands […] continuent quand même à<br />

nous livrer quelque chose». Par ailleurs, Koechlin argumenta que le principe de <strong>la</strong> neutralité<br />

suisse empêchait toute me<strong>sur</strong>e uni<strong>la</strong>térale, <strong>et</strong> que l’on pouvait «affirmer en toute bonne foi»<br />

136<br />

Journal personnel (Tagebuch) W<strong>et</strong>ter 1943, p. 152.<br />

137<br />

AFB E 6100 (A) 25, volume 2326, L<strong>et</strong>tre de Pfenninger à Weber du 22.6.1946, p. 2 (citation originale en allemand).<br />

138<br />

Fior 1997, p. 52 sqq.<br />

139<br />

Cf. Einzig 1943; ainsi qu’Archives BNS, Procès-verbal du Comité de banque, 22./23.7.1943, p. 182, au suj<strong>et</strong> des<br />

avertissements exprimés dans <strong>les</strong> émissions radiophoniques ang<strong>la</strong>ises.<br />

140<br />

Ibid., p. 187 (citation originale en allemand).

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