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La Suisse et les transactions sur l'or pendant la Seconde Guerre ...

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Rapport intermédiaire <strong>sur</strong> l’or 89<br />

Chapitre 2<br />

Le 22 août, <strong>les</strong> premières cessions de <strong>la</strong> Reichsbank à <strong>la</strong> banque d’émission portugaise eurent<br />

lieu à partir du dépôt bernois de <strong>la</strong> banque allemande <strong>et</strong> <strong>sur</strong> le nouveau dépôt C. L’année<br />

suivante, ces <strong>transactions</strong> d’or par Berne devaient prendre une grande ampleur. 100 De r<strong>et</strong>our<br />

d’une visite à Lisbonne en octobre 1942, Victor Gautier, directeur de <strong>la</strong> BNS, fit un rapport<br />

détaillé <strong>sur</strong> <strong>la</strong> politique en matière d’or du Banco de Portugal <strong>et</strong> répéta que <strong>la</strong> banque centrale<br />

portugaise refusait l’or en provenance directe de Berlin. Toutefois un détour par Berne venait à<br />

bout des réserves politiques <strong>et</strong> juridiques qui s’opposaient à un achat direct, ce qui – ajoutait<br />

Gautier – devrait donner à réfléchir à <strong>la</strong> direction générale de son établissement. 101<br />

Les détails de <strong>la</strong> politique du Portugal en matière d’or ne seront pas commentés davantage ici.<br />

Il suffit de r<strong>et</strong>enir que <strong>la</strong> BNS avait conscience de son rôle de p<strong>la</strong>que tournante de l’or en<br />

provenance du III e Reich. Pourtant, au milieu de 1942, le cercle restreint des responsab<strong>les</strong><br />

politiques <strong>et</strong> de <strong>la</strong> direction générale de <strong>la</strong> BNS n’était plus seul à percevoir l’importance de<br />

l’or pour l’approvisionnement de l’économie de guerre allemande. Les citoyens attentifs<br />

pouvaient apprendre très précisément, par <strong>la</strong> presse, d’où venait l’or de <strong>la</strong> Reichsbank. Comme<br />

l’a rappelé K<strong>la</strong>us Urner, Salomon Wolff écrivit dans un article paru le 16 août 1942 dans <strong>la</strong><br />

Neue Zürcher Zeitung «que quiconque vou<strong>la</strong>it savoir ce qu’il en était ne se faisait plus aucune<br />

illusion <strong>sur</strong> <strong>les</strong> véritab<strong>les</strong> tenants <strong>et</strong> aboutissants du commerce de l’or allemand». 102<br />

Tandis qu’au cours de l’année 1942, le commerce d’or qui avait <strong>la</strong> <strong>Suisse</strong> pour pivot se<br />

développait de manière très rapide, le marché national de l’or auquel participaient <strong>les</strong> banques<br />

commercia<strong>les</strong> ne resta pas inactif (cf. chapitre 4). Des opérations d’agio de grande envergure,<br />

100 Cf. Archives BNS, <strong>La</strong>gerbuchhaltung der Kunden-Golddepots 1939-1945, 4.3.1997. En septembre 1942, <strong>la</strong> BNS<br />

modifia sa politique des prix à l’égard du Banco de Portugal. «A titre de faveur particulière», <strong>la</strong> BNS avait cédé l’or à<br />

<strong>la</strong> banque du Portugal au prix de 4895 francs le kilogramme d’or fin. Avec eff<strong>et</strong> au 15 septembre 1942, elle augmenta<br />

le prix de vente de l’or au cours appliqué aux autres banques d’émission, soit fr. 4920.63 kgf. Archives BNS, Procèsverbal<br />

de <strong>la</strong> direction générale, 17.9.1942, N° 658, p. 825 (citation originale en allemand).<br />

101 «Le Portugal n’achète pas d’or directement de <strong>la</strong> Reichsbank, d’une part pour des raisons politiques, d’autre part, sans<br />

doute, pour des raisons de précaution juridique. Mais lorsque c<strong>et</strong> or est passé par notre intermédiaire, ces objections<br />

tombent. Il me semble qu’il y a là pour nous matière à réflexion.» Archives BNS, 2125, Rapport de Victor Gautier<br />

après son voyage à Lisbonne <strong>et</strong> Madrid du 12 au 26.10.1942 (citation originale en français); cf. également Bourgeois<br />

1981, p. 61; Fior 1997, p. 54-55; Marguerat 1991, p. 120, ainsi que <strong>la</strong> bibliographie qui y est mentionnée. Le rapport de<br />

Gautier fit également apparaître que <strong>les</strong> banques commercia<strong>les</strong> suisses poursuivaient leurs achats de grandes quantités<br />

d’escudos au Portugal, toutefois non pas contre de l’or, mais contre des francs suisses <strong>et</strong> d’autres devises: «En matière<br />

de devises le Banco cède tous <strong>les</strong> escudos destinés aux opérations contre documents <strong>et</strong> en outre il adm<strong>et</strong> une mise à<br />

disposition de 100 mille escudos par banque <strong>et</strong> par semaine contre francs suisses aussi bien que contre $ ou contre<br />

couronnes suédoises. Pendant un certain temps c<strong>et</strong>te tolérance a été réduite, pour le franc suisse, à 10 mille escudos par<br />

semaine <strong>et</strong> par banque <strong>et</strong> ce<strong>la</strong> parce que <strong>les</strong> banques commercia<strong>les</strong> suisses faisaient ach<strong>et</strong>er des escudos par toutes leurs<br />

succursa<strong>les</strong> <strong>et</strong> agences jusqu’à <strong>la</strong> limite maximum. Maintenant, <strong>la</strong> tolérance a été reportée de 10 mille à 100 mille<br />

escudos, mais chaque banque ne peut ach<strong>et</strong>er qu’une fois le montant permis.» Archives BNS, 2125, Rapport de Victor<br />

Gautier après son voyage à Lisbonne <strong>et</strong> Madrid du 12 au 26.10.1942 (citation originale en français). Cf. également<br />

DDS, volume 14, N° 229, Annexe II, p. 748–750.<br />

102 Urner 1985a, p. 627 (citation originale en allemand). L’article de <strong>la</strong> NZZ d’août 1942 décrivait en détail <strong>les</strong> diverses<br />

méthodes qu’utilisait l’Allemagne pour s’approprier l’or dérobé: «Les réserves d’or des banques d’émission en<br />

question ne purent que partiellement être mises à l’abri avant l’arrivée des troupes allemandes, après que l’Allemagne<br />

se fut déjà approprié <strong>les</strong> réserves d’or de l’Autriche <strong>et</strong> de <strong>la</strong> Tchécoslovaquie après leur annexion. De plus <strong>les</strong><br />

Devisenschutzkommandos mis en p<strong>la</strong>ce dans tous <strong>les</strong> territoires occupés veillent à ce que <strong>les</strong> devises <strong>et</strong> l’or en<br />

possession du public soient remis. C’est ce qui est notamment arrivé en Hol<strong>la</strong>nde; en France occupée, on s’est d’abord<br />

contenté de m<strong>et</strong>tre <strong>la</strong> main <strong>sur</strong> <strong>les</strong> montants trouvés dans <strong>les</strong> coffres-forts des banques. Toutes ces sources faisaient<br />

affluer des quantités d’or considérab<strong>les</strong> vers l’Allemagne, qui pouvait alors en disposer de <strong>la</strong> manière décrite pour<br />

soutenir son économie de guerre.» Wolff 1942 (citation originale en allemand).

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