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La Suisse et les transactions sur l'or pendant la Seconde Guerre ...

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Rapport intermédiaire <strong>sur</strong> l’or 128<br />

Chapitre 2<br />

Il est donc évident que <strong>la</strong> BNS n’ignorait pas le sort des victimes dépouillées. Pouvait-on<br />

exclure, alors qu’elle constituait de loin le principal intermédiaire de <strong>la</strong> Reichsbank, qu’elle ait<br />

reçu, elle aussi, une part de c<strong>et</strong>te catégorie d’or? En fait, c<strong>et</strong>te question était déjà dépassée<br />

avant même que <strong>les</strong> dirigeants de <strong>la</strong> BNS ne <strong>la</strong> posent pour <strong>la</strong> première fois à <strong>la</strong> Reichsbank.<br />

Ce n’est que lorsque <strong>les</strong> avertissements des Alliés firent p<strong>la</strong>ner des menaces de restitution que<br />

<strong>la</strong> Banque nationale entreprit de demander à Puhl d’attester que l’or envoyé de Berlin<br />

provenait des réserves allemandes d’avant-guerre. Comme Michel Fior a pu l’établir, elle<br />

n’interrogea pas Puhl une seule fois avant le milieu de 1943 <strong>sur</strong> <strong>la</strong> provenance du métal jaune<br />

arrivant à Berne . 306<br />

Ainsi, <strong>la</strong> Banque nationale n’adopta l’argument de <strong>la</strong> bonne foi qu’au moment où en fait elle<br />

avait déjà perdue celle-ci. On pourrait aujourd’hui qualifier d’opiniâtr<strong>et</strong>é, voire même<br />

d’autosuggestion, <strong>la</strong> façon dont <strong>les</strong> responsab<strong>les</strong> cherchèrent à se ras<strong>sur</strong>er mutuellement: ce qui<br />

ne devait pas être vrai ne pouvait pas l’être:<br />

«Nous ignorons d’où vient l’or. Nous ne pensons donc pas comm<strong>et</strong>tre un délit en ach<strong>et</strong>ant de<br />

l’or à <strong>la</strong> Reichsbank. Nous estimons bien plus que nous pouvons continuer à accepter de l’or<br />

de l’Allemagne dans <strong>la</strong> même proportion que jusqu’ici pour satisfaire ses besoins en francs<br />

suisses. Toute autre position reviendrait à adm<strong>et</strong>tre que nous avons mal agi.» 307<br />

Lorsque, presque trois ans plus tard, dans <strong>la</strong> réunion des 23 <strong>et</strong> 24 mai 1946, le Comité de<br />

banque débattit du rapport <strong>sur</strong> <strong>les</strong> re<strong>la</strong>tions avec <strong>la</strong> Reichsbank déjà soumis au Conseil fédéral<br />

par <strong>la</strong> direction générale <strong>et</strong> qu’il y apporta <strong>les</strong> dernières modifications, son président,<br />

Bachmann, se permit de «proposer une version légèrement différente» pour <strong>la</strong> dernière partie.<br />

Bachmann estimait de nouveau «que dans <strong>la</strong> conclusion, il fal<strong>la</strong>it avancer essentiellement <strong>les</strong><br />

motifs économiques de notre politique <strong>sur</strong> l’or <strong>et</strong> moins <strong>la</strong> question de <strong>la</strong> bonne foi». Weber, le<br />

président de <strong>la</strong> direction générale, rétorqua «que nous ne pouvons renoncer à faire valoir notre<br />

bonne foi face aux exigences des Alliés». 308 Au terme de longues discussions, le Comité de<br />

banque opta pour <strong>la</strong> version de <strong>la</strong> direction générale. Après avoir décidé de se justifier en<br />

invoquant sa bonne foi, <strong>la</strong> BNS ne pouvait faire machine arrière qu’au prix de sa crédibilité.<br />

Elle était prisonnière de son argumentation bâtie <strong>sur</strong> <strong>la</strong> bonne foi, dont il était impossible de<br />

sortir.<br />

Un conflit opposa en 1946 deux membres de <strong>la</strong> direction générale, après que le directeur<br />

général Hirs eut été vivement critiqué par d’autres membres de <strong>la</strong> délégation suisse en raison<br />

de son comportement lors des négociations de Washington (cf. chapitre 6). De plus, le Conseil<br />

fédéral reprocha à <strong>la</strong> Banque nationale de ne pas avoir renseigné complètement <strong>la</strong> délégation<br />

306 C’est en octobre 1943, à l’occasion du séjour de Puhl en <strong>Suisse</strong>, que <strong>la</strong> BNS se renseigna pour <strong>la</strong> première fois auprès<br />

de lui <strong>sur</strong> l’origine de l’or. Par ailleurs, <strong>la</strong> direction générale exigea du directeur général Rossy, «qu’il lui fasse rapport<br />

<strong>sur</strong> l’origine des lingots (poinçons, <strong>et</strong>c.) lors de prochains achats d’or». Archives BNS, Procès-verbal de <strong>la</strong> direction<br />

générale, 21.10.1943, N 1003, p. 1092 (citation originale en allemand). Cf. également Fior 1997, p. 61, 65-66.<br />

307 Archives BNS, Procès-verbal du Comité de banque, 22./23.7.1943, p. 182 (citation originale en allemand).<br />

308 Archives BNS, Procès-verbal du Comité de banque, 23./24.5.1946, p. 161–162 (citation originale en allemand); cf.<br />

également DDS, volume 15, n 447, p. 1138–1141.

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