Focales n°9 - AFD
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Troisième partie<br />
alternative ou complémentaire (si la production tchadienne devait augmenter au-delà<br />
des capacités de transport de l’oléoduc de Doba), l’option d’un oléoduc du Tchad<br />
au Soudan serait aussi considérée. Une telle infrastructure faciliterait l’exportation<br />
vers la Chine via Port Soudan. Mais elle serait assez coûteuse, car elle devrait couvrir<br />
environ 1 400 km jusqu’aux oléoducs qui traversent le Kordofan soudanais. Elle resterait<br />
aussi suspendue à l’évolution de la situation politique au Soudan, dont la division<br />
en deux États, à la suite du référendum d’autodétermination au sud (janvier 2011),<br />
n’a pas dissipé toutes les incertitudes. De plus, l’histoire mouvementée des relations<br />
entre le Soudan et le Tchad depuis les années 1960 [ 108 ] ne plaide pas en faveur d’un tel<br />
itinéraire. Enfin, la réalisation par la CNPC d’un projet pétrolier dans l’est du Niger,<br />
dans le prolongement des gisements du lac Tchad, semble pouvoir aussi ouvrir des<br />
possibilités de connexion vers le sud-ouest (cf. partie 5). Les enjeux se présentent<br />
comme ceux du Tchad : une petite raffinerie située à 50 km de Zinder sera alimentée<br />
par un oléoduc de 300 km environ. Elle n’absorbera qu’une partie de la production,<br />
dont l’excédent devra être exporté. Par le Nigeria ? Le Bénin ? Le Tchad ? Le premier<br />
itinéraire serait le plus court, mais le transit via le Nigeria soulève beaucoup de difficultés.<br />
Le second serait le plus sûr, mais il serait très long (1 400 km environ depuis<br />
Zinder au littoral béninois). Le troisième serait potentiellement le plus économique,<br />
car la distance d’oléoduc à construire jusqu’à Djermaya (500 à 600 km), puis des champs<br />
de Koud Alwa à l’oléoduc de Doba (150-200 km) serait la moins longue. Mais il aurait<br />
des implications importantes sur les règles de la production, et supposerait une convergence<br />
des standards avec l’oléoduc Exxon (cf. partie 4).<br />
La discussion entre le Tchad et Eximbank sur la voie de chemin de fer reliant Ngaoundéré<br />
à Nyala en traversant le Tchad évoque les vieux rêves de désenclavement du bassin<br />
tchadien par le chemin de fer qui avaient failli se matérialiser à la fin des années 1950<br />
(cf. Sautter, 1958). Ses justifications économiques demeurent obscures : quels flux<br />
pourraient donc rentabiliser une telle infrastructure ? Mais la coïncidence de ces<br />
pourparlers avec les négociations sur une éventuelle connexion entre les champs de<br />
pétrole de la CNPCIC et l’oléoduc Tchad Cameroun n’en est peut-être pas une : les<br />
projets de désenclavement les plus utopiques affleurent souvent dans de tels contextes,<br />
comme s’ils avaient pour fonction de faire baisser les enchères en montrant que<br />
d’autres choix (que ceux qui sont âprement négociés) sont possibles [ 109 ] .<br />
[108 ] Le premier grand mouvement de rébellion du Tchad, le Front de libération nationale du Tchad (FROLINAT), a<br />
été fondé au Soudan en 1965. En 1990, c’est du Soudan qu’est parti Idriss Déby, lorsqu’il a chassé du pouvoir<br />
Hissein Habré. Durant les années 2000, des mouvements de rébellion tchadiens soutenus par Khartoum<br />
étaient basés au Darfour, d’où ils ont lancé, en avril 2006 et en février 2008, deux attaques sur Ndjaména.<br />
[109] Au moment des négociations entre le Tchad et le Cameroun sur le projet Doba, on avait déjà observé des<br />
séquences comparables, la presse faisant écho de discussions secrètes sur un tracé congolais alternatif à celui<br />
du Cameroun (Tulipe, 2004).<br />
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© <strong>AFD</strong> / Novembre 2012 / Une compagnie pétrolière chinoise face à l’enjeu environnemental au Tchad