Focales n°9 - AFD
Focales n°9 - AFD
Focales n°9 - AFD
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Cinquième partie<br />
des tensions élevées vers la fin du cycle par manque de volonté de dialogue de la<br />
part des entreprises (Van Vliet, 1998). Jusqu’à présent, ces hypothèses ont plutôt été<br />
éprouvées dans le cas de projets extractifs menés par des entreprises occidentales. La<br />
question qui se pose est de savoir si elles s’appliquent aussi à des entreprises chinoises.<br />
En analysant les opérations pétrolières de la CNPC au Soudan, au Tchad et au Niger,<br />
certains éléments semblent se distinguer du modèle. Dans les trois cas étudiés, les<br />
contrats pétroliers ont été directement négociés avec l’autorité centrale du pays. La<br />
relation privilégiée avec l’État central, ainsi que l’importance stratégique de ces projets<br />
extractifs pour la Chine, font que la CNPC est au départ souvent peu disposée à interagir<br />
avec la population locale. Comparées aux majors occidentales, les entreprises<br />
pétrolières chinoises sont toujours en phase d’apprentissage et leurs départements<br />
des Relations publiques sont moins mis en avant. L’implantation initiale de la CNPC au<br />
Soudan, dans un contexte conflictuel, illustre ce caractère initialement très secondaire<br />
de la collaboration de l’entreprise avec la société civile ou les riverains. Les deux projets<br />
au Tchad et au Niger, toujours en phase de construction, donnent pour l’instant<br />
également l’image d’une entreprise qui accorde la priorité au respect du calendrier<br />
technique et aux relations avec le gouvernement hôte, et non aux dialogues avec les<br />
représentants des riverains.<br />
Pourtant, au Soudan, sous l’effet de la pression internationale et après la consolidation<br />
de l’investissement, la CNPC s’est au fur et à mesure montrée plus disposée à interagir,<br />
notamment avec la société civile ; elle s’est attachée à donner une image positive de<br />
son activité. Dans le schéma 2 (une mise à jour d’hypothèses initialement formulées<br />
par van Vliet, 1998), nous tentons d’illustrer les particularités de l’interaction entre<br />
entreprises pétrolières chinoises et acteurs nationaux et locaux (populations riveraines,<br />
gouvernement), en les comparant aux comportements des firmes occidentales. En<br />
début de cycle, l’entreprise pétrolière chinoise semble déployer une disposition à<br />
indemniser très basse (par comparaison avec les firmes occidentales), le rôle de légitimation<br />
en début de cycle étant assuré par la coopération bilatérale de la Chine<br />
(une pratique qui n’est plus acceptée sous cette forme par les pays occidentaux, qui<br />
savent en revanche parfois mobiliser de l’aide multilatérale, comme Exxon au Tchad).<br />
Cette disposition de l’entreprise chinoise à indemniser augmente cependant au fur<br />
et à mesure, en réponse aux exigences croissantes. Sur un pas de temps long, nous<br />
formulons l’hypothèse d’une lente convergence entre les stratégies des entreprises<br />
occidentales et celles des entreprises chinoises, qui se traduira notamment par une<br />
évolution de la disposition à indemniser (consolidation de la pratique de RSE) et une<br />
mobilisation commune de l’aide multilatérale pour gérer ou éviter des impacts<br />
négatifs et leurs conséquences (conflits). Une compétition accrue entre opérateurs<br />
219<br />
© <strong>AFD</strong> / Novembre 2012 / Une compagnie pétrolière chinoise face à l’enjeu environnemental au Tchad