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Focales n°9 - AFD

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zones d’extraction se trouvent au « sud ». Dans ce cas précis, la notion de nord et de<br />

sud ne se limite pas à un simple critère de localisation, mais renvoie davantage à une<br />

représentation du territoire national (Magrin, 2001). De manière schématique, on<br />

dissocie ainsi des zones à peuplement majoritairement musulmanes au nord et des<br />

populations en grande partie chrétiennes et animistes au sud, ce qui, au terme d’histoires<br />

nationales tumultueuses [ 190 ] , se traduit aujourd’hui par des asymétries fortes en ce<br />

qui concerne l’accès à la scène politique nationale. La plupart des champs pétroliers,<br />

bases actuelles de l’économie soudanaise, sont localisés dans la partie centrale, voire<br />

méridionale, du pays, alors que les activités de raffinage ainsi que la pétrochimie sont<br />

concentrées à Khartoum ou Port Soudan. Au Soudan, cette répartition a donné lieu<br />

à des interprétations opposées. Pour le gouvernement de Khartoum, elle représentait<br />

un outil d’intégration et d’interdépendance nationale. Pour les opposants du sud,<br />

elle n’était qu’un reflet des rapports de domination nord-sud. Au Niger, la capitale<br />

Niamey n’est pas directement concernée par les activités pétrolières ; les champs<br />

sont reliés par oléoduc à Zinder. L’axe du tracé de l’oléoduc dans ce pays tend<br />

davantage vers une orientation est-ouest et les clivages sociopolitiques se déclinent<br />

davantage en une opposition entre gens du fleuve et gens du désert. Le projet<br />

pétrolier ne s’inscrit donc pas dans une géopolitique ethnique simple : les espaces<br />

concernés présentent depuis longtemps un peuplement mêlé d’Arabes, de Toubous,<br />

de Touaregs, de Haoussas ou encore de Peuls.<br />

Un autre point commun entre les projets pétroliers de ces trois pays concerne l’enclavement<br />

et la difficulté d’accès des zones d’exploitation [ 191 ] . En général, les champs<br />

pétroliers n’ont bénéficié que des infrastructures strictement nécessaires à la phase<br />

de construction, ou pour l’accès aux installations de pompage et de transport en<br />

période de fonctionnement. Au Tchad, la ville de Bousso espère toujours bénéficier<br />

de la construction d’un pont sur le Chari [192] . Dans le cas des oléoducs, la situation<br />

est intermédiaire ; en saison sèche, l’accès est garanti, mais pendant la saison des<br />

pluies, certaines voies ne sont que très difficilement accessibles. La construction de<br />

pistes ou routes bitumées en lien avec les différents projets pétroliers a cependant<br />

permis de faciliter l’accès de certaines zones et d’encourager les activités de commerce.<br />

206<br />

© <strong>AFD</strong> / Novembre 2012 / Une compagnie pétrolière chinoise face à l’enjeu environnemental au Tchad<br />

Cinquième partie<br />

[190 ] Voir sur le Soudan : Lavergne, 1989 ; Prunier et al., 2003 ; Johnson, 2006 ; sur le Tchad : Buijtenhuis, 1987 ; Magrin,<br />

2001.<br />

[191 ] L’aménagement d’un projet pétrolier dépend certes des lieux où la ressource est exploitable, mais aussi des<br />

règles fixées pour son accès. Ensuite, l’orientation des infrastructures de transport, de stockage et de transformation<br />

dépendra certes des flux et des marchés existants, mais aussi des politiques proactives d’aménagement<br />

que les pays voudront et pourront négocier avec les firmes. L’élaboration de tels cadres de régulation et des<br />

politiques demandent des niveaux d’autonomie que de nombreux PMA ne possèdent pas.<br />

[192] Entretien avec le préfet de Bousso, en août 2010.

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