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Tous à Zanzibar

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Avant d’avoir pu en être informée, Guinevere sentit que<br />

quelque chose allait de travers. D’ordinaire, son établissement<br />

laissait entendre un calme bourdonnement, un susurrement<br />

fluctuant mais perpétuel sur le contrepoint de la musique douce<br />

et lénifiante qu’exhalaient d’invisibles diffuseurs. À la première<br />

fausse note, elle leva les yeux. Elle délaissa la liste des ultimes<br />

préparatifs de sa soirée et pencha la tête de côté.<br />

À demi convaincue de s’être trompée, elle brancha le circuit<br />

intérieur de télévision et interrogea les diverses caméras du<br />

salon principal. Isolées par des tentures d’opaflex, les clientes,<br />

assises ou couchées, baignaient dans l’atmosphère luxueuse du<br />

salon, tandis que leurs imperfections étaient gommées, rabotées<br />

ou camouflées. Dans la cabine 38, M rs Djalabah exigeait encore<br />

une fois de sa masseuse un peu plus que le service normal.<br />

Guinevere le remarqua avec résignation, mais griffonna sur son<br />

aide-mémoire qu’il faudrait augmenter sa facture de cent pour<br />

cent. Tant que l’employée ne se plaignait pas… Et il fallait<br />

reconnaître que le mètre quatre-vingts d’ébène sculptural de<br />

M rs Djalabah était quelque chose de magnifique.<br />

Elle suivit sur son écran la travée centrale qui séparait les<br />

cabines jusqu’<strong>à</strong> l’entrée du salon, et l<strong>à</strong>, elle eut un aperçu du<br />

problème. Soudain inquiète – si c’était visible depuis la rue, il<br />

fallait que cela cesse immédiatement – elle brancha son écran<br />

sur les caméras qui surveillaient l’entrée.<br />

À cet instant, une voix agitée murmura dans l’intercom :<br />

« Gwinnie, il y a un type affreux ici et il pousse des hurlements.<br />

Je crois qu’il a bu. Il pue autant qu’un plein tonneau de fiente de<br />

baleine. Peux-tu te libérer et venir voir ? »<br />

« J’arrive », répondit-elle sèchement.<br />

Mais elle prit le temps de contrôler son image dans le miroir.<br />

Elle trouva son chef huissier Danny-boy – le rapin – aux<br />

prises avec l’envahisseur qui l’invectivait belliqueusement. Par<br />

bonheur, il était exagéré de dire qu’il hurlait, si bien qu’aucun<br />

écho de la scène ne parvenait vraisemblablement aux clientes<br />

des plus proches cabines. De plus, l’enseigne blonde avait eu la<br />

présence d’esprit de déplacer la cloison changeochromée de<br />

telle sorte que l’abominable étranger était invisible de<br />

l’extérieur de la Beautique.<br />

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