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Tous à Zanzibar

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« Que veux-tu écouter ? une musique triomphale ? Une<br />

marche funèbre ? »<br />

« Que préfères-tu, jouer toi-même ou mettre une bande ? »<br />

« Une bande, je n’ai pas le cœur <strong>à</strong> jouer. » Il prit une bobine<br />

dans le meuble et l’introduisit dans l’appareil. « Du Berlioz,<br />

pour se remonter le moral ? » Il éteignit la suspension. « Tu<br />

verras, le rapport avec l’image est très astucieux. Je ne crois pas<br />

que tu l’aies déj<strong>à</strong> vu. »<br />

Le petit écran de l’appareil s’illumina de teintes blanc et or<br />

qui permirent <strong>à</strong> Pierre de retourner s’asseoir auprès de sa sœur.<br />

Immobiles, ils regardèrent pendant un moment. Le volume était<br />

fracassant. L’amour du maître pour les grands orchestres<br />

trouvait sa magnification dans les techniques modernes<br />

d’amplification.<br />

« Je devrais m’acheter un nouvel appareil », dit Pierre.<br />

« Avec celui-l<strong>à</strong>, <strong>à</strong> moins d’être assis exactement en face de<br />

l’écran, on perd l’impression de relief. »<br />

« Approche-toi. Mais tu es mal assis. Il faut vraiment avoir<br />

des os africains pour s’asseoir sur ces maudits sofas. Tu veux<br />

prendre un fauteuil ? »<br />

« Non, il faut choisir entre le fauteuil et la zone de visibilité<br />

de l’écran. On se disputait quelquefois <strong>à</strong> cause de ça, avec<br />

Rosalie. »<br />

« Tu vois bien, l<strong>à</strong> ? Laisse-moi m’appuyer sur toi. Non, avec<br />

ton bras autour de moi. Voil<strong>à</strong>, je suis bien. »<br />

Le temps passa. Un parfum flottait dans ses cheveux. Il était<br />

doux d’y poser sa joue. Les images et les couleurs qui<br />

accompagnaient la musique étaient de toute beauté. Elles<br />

pénétraient en lui malgré sa dépression et son apathie. Il sentit,<br />

mais sans y répondre, la longue main fine de sa sœur se tresser<br />

autour de la sienne, et lorsqu’elle bougea, il ne fit rien d’autre<br />

que d’ajuster sa position <strong>à</strong> la sienne. Rien d’anormal <strong>à</strong> ce que ses<br />

ongles caressassent le dos de sa main et de son poignet, et <strong>à</strong> ce<br />

que lui commençât <strong>à</strong> imiter le mouvement de sa sœur, jusqu’<strong>à</strong><br />

ce qu’il se rendît compte que sa main touchait la peau nue de<br />

son sein.<br />

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