Mgr Delassus – La Conjuration anti-chrétienne - Bibliothèque de ...
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en un rationalisme religieux : ils ont délaissé les observances familières, et l’exercice <strong>de</strong> la religion se réduit pour eux à<br />
passer quelques heures par an, dans une synagogue, en écoutant <strong>de</strong>s hymnes qu’ils n’enten<strong>de</strong>nt plus. Ils ne peuvent<br />
pas se rattacher à un dogme, à un symbole : ils n’en ont pas, en abandonnant les pratiques talmudiques, ils ont abandonné<br />
ce qui faisait leur unité, ce qui contribuait à former leur esprit. Cette marche, il est vrai, est à peine sensible dans<br />
les régions <strong>de</strong> l’Orient; elle est d’une rapidité prodigieuse en certaines contrées occi<strong>de</strong>ntales. » Il faut voir en cela, dit M.<br />
Gougenot <strong>de</strong>s Mousseaux, « le signe éclatant d’une époque nouvelle et le présage d’événements grandioses. »<br />
« Voici, nous disent les hommes du progrès judaïque, que les effluves <strong>de</strong> la liberté chassent <strong>de</strong>vant eux les nuages <strong>de</strong><br />
l’immobile orthodoxie et le Talmud qui, <strong>de</strong>puis son apparition avait joui d’une autorité incontestée, se voit dédaigné et repoussé.<br />
Non seulement « l’<strong>anti</strong>que co<strong>de</strong> <strong>de</strong> Moïse et le Talmud ne sont plus du goût <strong>de</strong> la majorité, mais les simulacres<br />
mêmes <strong>de</strong> l’orthodoxie offusquent <strong>de</strong>s myria<strong>de</strong>s d’Israélites. » C’est un journal allemand et protestant <strong>La</strong> Croix, qui fait<br />
cette constatation.<br />
Un fait entre plusieurs rapportés par M. Gougenot <strong>de</strong>s Mousseaux, montre jusqu’où va chez les juifs libéraux, le mépris<br />
<strong>de</strong> l’orthodoxie. Un journaliste belge, juif et libre-penseur, Bérard, fut surpris au théâtre par le choléra qui l’expédia<br />
hors <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>. Ses coreligionnaires <strong>de</strong> la libre-pensée le portèrent au cimetière israélite, et là, le grand rabbin <strong>de</strong><br />
Belgique, Aristi<strong>de</strong> Astruc, déposa sur sa tombe « un juste tribu <strong>de</strong> regrets et d’estime pour cet amant passionné <strong>de</strong> la liberté<br />
religieuse. » Le Moniteur <strong>de</strong>s solidaires traita <strong>de</strong> méprise ou d’inconséquence cette intervention du grand rabbin à<br />
l’enterrement d’un libre penseur. M. le rabbin lui répliqua : « Bérard était maître <strong>de</strong> la libre pensée-, nous le savions. Le<br />
judaïsme n’exclut personne <strong>de</strong> ses temples pendant la vie, ni <strong>de</strong> ses cimetières après la mort... Bérard a pu <strong>de</strong>venir libre<br />
penseur en restant israélite, »<br />
« On nous juge toujours au <strong>de</strong>hors, disent les Archives israélites (XV, p. 677, année 1867), avec les habitu<strong>de</strong>s<br />
d’Eglise établie et officielle dont le christianisme nous offre le modèle. Nous sommes, au contraire, le type le plus absolu<br />
<strong>de</strong> démocratie religieuse, et chacun <strong>de</strong> nous est le juge suprême <strong>de</strong> la foi. »<br />
<strong>La</strong> réforme ne porte point seulement sur le dogme : les progressistes veulent la, disparition prohibitive du sabbat, etc.;<br />
etc. LUnivers israélité va même jusqu’à dire : « Qui sait ? Peut être vont-ils jusqu’à se flatter in petto, que- la circoncision,<br />
ce cachet divin que nous portons sur notre chair, selon la poétique expression du T almud, sera rayée par un trait <strong>de</strong><br />
plume» (Univers israélite, VIII, pp. 358.359, année 1868). En même temps, une autre feuille juive, la Neuzeit, attaque<br />
avec violence dans l’<strong>anti</strong>que capitale <strong>de</strong> l’empire allemand, à Vienne, « la vie israélite tout entière, le Talmud, le Schoulchan<br />
Ârouch, les triaditions, les cérémonies religieuses du foyer domestique. »<br />
« Nous voulons marcher, s’écrient les voix tumultueuses <strong>de</strong>s réformistes. Nous ne saurions être pour un statu quo<br />
béat et inintelligent dont il existe encore <strong>de</strong>s coryphées ! L’immobilité n’est, en ce mornent surtout, le droit ni l’avantage<br />
<strong>de</strong> personne. Unir le passé au présent <strong>de</strong> manière à préparer l’avenir par d’utiles améliorations faites à propos, c’est le<br />
secret <strong>de</strong> la durée pour nos croyances. Depuis un <strong>de</strong>mi siècle, on a, malgré les cris et les protestations <strong>de</strong> ce qui s’intitule<br />
l’orthodoxie, réalité nombre <strong>de</strong> changements avantageux taxés à l’origine <strong>de</strong> subversifs et d’impies, et l’on n’est pas au<br />
bout <strong>de</strong> cette fécon<strong>de</strong> transformation» (Archives israélites, XIX, p. 835, 1866). « Une religion n’est à nos yeux ni une morale<br />
inflexible, ni une matière inerte qui se prête à d’incessantes expériences; c’est un être vivant, perfectible, ayant, dans<br />
le passé <strong>de</strong>s racines qu’il ne faut pas couper et se renouvelant avec une lenteur nécessaire1 ».<br />
Ces pensées sont-elles celles <strong>de</strong> tous les Juifs <strong>de</strong> nos jours ? Non; nous l’avons dit, les Juifs <strong>de</strong>s contrées orientales,,<br />
sont encore à peu près ce qu’ils étaient il y a <strong>de</strong>s siècles. Mais eux aussi sont travaillés. Voici un fait qui montre bien les<br />
influences que l’Alliance israélites sait employer pour amener, même dans ces pays, la transformation du judaïsme et<br />
préparer l’avenir du genre humain, tel qu’elle le conçoit, le veut et l’espère.<br />
Le 10 mars 1908, M. Brice, ministre <strong>de</strong> France à Addis-Abbeba, écrivit à M. Pichon, ministre <strong>de</strong>s Affaires étrangères,<br />
que le 6 du même mois, M. Roux, consul <strong>de</strong> France, avait présenté sur son ordre, à Ménélick, MM. Nahoum et Eherim.<br />
Rendant compte <strong>de</strong> cette entrevue avec l’empereur, M. Nahoum dit : « Je suis arrivé à parler <strong>de</strong> la renaissance d’Israël et<br />
<strong>de</strong> la floraison <strong>de</strong> l’Ethiopie dans les temps mo<strong>de</strong>rnes, Les Israélites continuent <strong>de</strong> marcher vers le progrès, grâce à leur<br />
organisme vivant qui est l’Alliance, qui, en travaillant dans ce but, travaille aussi pour l’humanité en général. »<br />
On voit ici le gouvernement <strong>de</strong> la France charger ses représentants d’introduire auprès <strong>de</strong> l’empereur d’Ethiopie les<br />
délégués <strong>de</strong> l’Alliance israélite universelle, afin que ceux-ci puissent l’entretenir <strong>de</strong> cet « organisme vivant » qui fait marcher<br />
Israël, et, en général, l’humanité, vers le progrès.<br />
En Occi<strong>de</strong>nt, s’il-y a -<strong>de</strong>s Juifs réformistes, il y a aussi les Juifs orthodoxes; mais les premiers sont <strong>de</strong> beaucoup les<br />
plus nombreux et les seconds fléchissent, leur orthodoxie n’est plus, que l’ombre <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> leurs frères d’Orient ou <strong>de</strong><br />
celle <strong>de</strong> tous les juifs d’autre-fois. M. Gougenot <strong>de</strong>s Mousseaux en donne <strong>de</strong>s preuves nombreuses et frappantes (Les<br />
juifs, le judaïsme et la judaïsation <strong>de</strong>s peuples chrétiens).<br />
Cependant, remarquons le <strong>de</strong> nouveau, il ne faut pas croire que le juif, parce qu’il renie les croyances <strong>de</strong> ses pères,<br />
n’est plus un juif. Tout en se libérant <strong>de</strong> sa foi, le juif conserve et maintient avec un soin jaloux sa nationalité. Les réformistes,<br />
aussi bien que les orthodoxes, à quelque échelon qu’ils se soient arrêtés, brûlent également du zèle <strong>de</strong> tenir haut<br />
et ferme l’étendard national du judaïsme pas plus ceux-là que ceux-ci n’abandonnent l’idée et l’espoir <strong>de</strong> soumettre le<br />
genre- humain tout entier à leur joug. « Vos observances surannées, disent les, réformistes aux orthodoxes, empêchent<br />
le judaïsme <strong>de</strong> se faire accepter et nous font ainsi manquer un prosélytisme que nous <strong>de</strong>vons exercer, » en vue <strong>de</strong> cette<br />
domination (Archives israélites, X, p. 448, année 1867).<br />
En 1886, la place <strong>de</strong> Grand rabbin <strong>de</strong> France <strong>de</strong>vint vacante. Deux concurrents se présentèrent Salomon Klein, grand<br />
rabbin <strong>de</strong> Colmar, orthodoxe, et Isidore, grand rabbin <strong>de</strong> Paris, progressiste. Les Archives israélites se prononcèrent pour<br />
celui-ci, pour cette raison : « Toute candidature qui nous ramènerait à l’ancien système d’étroite casuistique, et qui prétendrait<br />
immobiliser les errements talmudiques FERAIT OBSTACLE A L’AVENIR DU JUDAISME, et doit être écartée»<br />
1 Archives israélites, XX, p. 879, année 1866. Qui ne serait frappé <strong>de</strong> la ressemblance <strong>de</strong> ce langage avec celui <strong>de</strong>s catholiques mo<strong>de</strong>rnistes<br />
condamnés par Pie X ! Nous verrons plus loin qu’il n’y a dans ces <strong>de</strong>ux régions judaïques et catholiques qu’un seul et même<br />
mouvement d’idées.<br />
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