Mgr Delassus – La Conjuration anti-chrétienne - Bibliothèque de ...
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ni pour la gran<strong>de</strong>ur, ni pour le prodige; qui est Celui qui est, et qui a tiré tout ce qui est, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> Lui, <strong>de</strong>s abîmes du<br />
néant 1 ».<br />
Dieu permet, nous en sommes, hélas, témoins, les égarements <strong>de</strong> l’homme et même la révolte contre lui, mais dans<br />
une mesure qui ne sera pas dépassée; il attend. Tout servira à ses <strong>de</strong>sseins, et lorsque l’épreuve aura cessé, tout sera à<br />
sa place; il n’y aura alors <strong>de</strong> mal que pour les coupables obstinés. Mais, disons-le, les coupables eux-mêmes rappelleront<br />
encome les <strong>de</strong>sseins pleins d’amour <strong>de</strong> Dieu pour ses créatures ce qui aura causé leur perte, ce sera en effet l’abus d’un<br />
bienfait qui était <strong>de</strong>stiné à leur procurer un poids immense <strong>de</strong> gloire, l’abus <strong>de</strong> la liberté que Dieu donne à ses créatures<br />
dans le but <strong>de</strong> se former <strong>de</strong>s élus qui puissent dire avec saint Paul « C’est par la grâce <strong>de</strong> Dieu que je suis ce que je suis,<br />
et sa grâce envers moi n’a pas été vaine 2 , J’ai travaillé non pas moi pourtant, mais la grâce <strong>de</strong> Dieu qui est avec moi. »<br />
Le fondateur <strong>de</strong> l’Illuminisme français, Saint-Martin, avait l’intuition <strong>de</strong> ces vérités et il se disait que Satan pourrait bien<br />
n’avoir pas le <strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> la Révolution. Le 6 janvier 1794, il écrivait au baron <strong>de</strong> Kirchberger : « Pour moi, je n’ai jamais<br />
douté que la Provi<strong>de</strong>nce ne se mêlât <strong>de</strong> notre Révolution et qu’il n’était pas possible qu’elle reculât. Je crois plus<br />
que jamais que les choses iront à leur terme et auront une finale bien importante et bien instructive pour le genre humain 3<br />
»<br />
De Maistre ne pensait pas autrement. « Pour tout homme qui a l’oeil sain, dit-il, et qui veut regar<strong>de</strong>r, il n’y a rien <strong>de</strong> si<br />
visible que le lien <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s. Tout ce qui se passe sur la terre a sa raison d’être dans le Ciel. C’est à<br />
l’accomplissement <strong>de</strong>s décrets divins que sont ordonnés tous les faits, toutes les révolutions que l’histoire a enregistrés,<br />
tous ceux qu’elle enregistrera jusqu’à la fin <strong>de</strong>s temps : tous concourent, selon leur nature et leur importance, à l’oeuvre<br />
secrète que Dieu opère presqu’à notre insu, et qui ne sera pleinement révélée qu’au grand jour <strong>de</strong> l’éternité. Si les révolutions<br />
sont amenées par les erreurs <strong>de</strong>s hommes, si elles sont faites <strong>de</strong> leurs crimes, Dieu les domine au point <strong>de</strong> les faire<br />
concourir à l’accomplissement <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins qui datent <strong>de</strong> l’éternité. »<br />
Personne n’a exprimé dans un langage plus sublime cette belle et consolante vérité. Aux premières lignes du premier<br />
<strong>de</strong> ses ouvrages, il a fait toucher cette action <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce qui mène les hommes où elle veut, tout en leur laissant la<br />
liberté <strong>de</strong> leurs mouvements.<br />
« Nous sommes attachés au trône <strong>de</strong> l’Etre suprême par une chaîne souple qui nous retient sans nous asservir. Ce<br />
qu’il y a <strong>de</strong> plus admirable dans l’ordre universel <strong>de</strong>s choses, c’est l’action <strong>de</strong>s êtres libres sous la main divine. Librement<br />
esclaves, ils opèrent tout à la fois volontairement et nécessairement; ils font réellement ce qu’ils veulent, mais sans pouvoir<br />
déranger les plans généraux. Chacun <strong>de</strong> ces êtres occupe le centre d’une sphère d’activité dont le diamètre varie au<br />
gré <strong>de</strong> l’éternel géomètre qui sait étendre, restreindre, arrêter ou diriger la volonté sans altérer sa nature... Sa puissance<br />
opère en se jouant; dans ses mains, tout est souple, rien ne lui résiste; pour elle, tout est moyen, même l’obstacle; et les<br />
irrégularités produites par les opérations <strong>de</strong>s agents libres viennent se ranger dans l’ordre général 4 »<br />
Satan n’échappe point à cette loi. Lui aussi fait ce qu’il veut; mais, en faisant ce qu’il veut, il travaille à<br />
l’accomplissement <strong>de</strong>s pensées divines. Il triomphe à l’heure actuelle; tout marche au gré <strong>de</strong> ses désirs et ses esclaves<br />
humains sont dans la jubilation. Ils ne voient point que, paraissant conduire la Révolution, ils n’y entrent que comme <strong>de</strong><br />
simples instruments et que leurs scélératesses ont toujours tourné contre les fins qu’ils s’étaient proposées.<br />
Ils veulent ané<strong>anti</strong>r le christianisme; ils ne s’en cachent point, ils le proclament; et voyant les ruines qu’ils ont accumulées<br />
<strong>de</strong>puis un siècle, aussi bien dans les âmes que dans la société, ils se flattent d’y parvenir. Leurs cris <strong>de</strong> joie, unis à<br />
leurs cris <strong>de</strong> haine, retentissent partout avec un éclat <strong>de</strong> plus en plus insolent. Ils ont tort. Ils se glorifient <strong>de</strong> ce qui, d’une<br />
manière ou d’une autre, fera leur honte.<br />
De même que l’unité <strong>de</strong> l’empire romain avait préparé le terrain pour la propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Evangile. Toutes les inventions<br />
nouvelles et toutes les révolutions préparent la fusion <strong>de</strong>s peuples. A quelle fin ?<br />
Nous savons les pensées, les espérances <strong>de</strong> la secte une religion unique ralliant tous les esprits, une Convention<br />
unique gouvernant tous les peuples. Les enfants <strong>de</strong> Dieu ont <strong>de</strong>s espérances tout autres.<br />
<strong>La</strong>cordaire les formulait un jour du haut <strong>de</strong> la chaire <strong>de</strong> Notre-Dame en ces termes : « O vous, hommes du temps,<br />
princes <strong>de</strong> la civilisation industrielle, vous êtes, sans le savoir, les pionniers <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce. Ces ponts que vous suspen<strong>de</strong>z<br />
dans les airs, ces montagnes que vous ouvrez <strong>de</strong>vant vous, ces chemins où le feu vous emporte, vous croyez<br />
qu’ils sont <strong>de</strong>stinés à servir votre ambition; vous ne savez pas que la matière n’est que le canal où coule l’esprit. L’esprit<br />
viendra quand vous aurez creusé son lit. Ainsi faisaient les Romains, vos prédécesseurs; ils employèrent sept cents ans<br />
à rapprocher les peuples par leurs armes, et à sillonner <strong>de</strong> leurs longues routes militaires les trois continents du vieux<br />
mon<strong>de</strong>; ils croyaient qu’éternellement leurs légions passeraient par là pour porter leurs ordres à l’univers; ils ne savaient<br />
pas qu’ils préparaient les voies triomphales du consul Jésus. O vous donc leurs héritiers, et aussi aveugles qu’eux, les<br />
Romains <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> race, continuez l’oeuvre dont vous êtes les instruments; abrégez l’espace, diminuez les mers, tirez<br />
<strong>de</strong> la nature ses <strong>de</strong>rniers secrets, afin qu’un jour la vérité ne soit plus arrêtée par les fleuves et les monts, qu’elle aille<br />
droit et vite. Qu’ils sont beaux les pieds <strong>de</strong> ceux qui évangéliseront la paix 5 »<br />
M. Dufourq, dans le livre que n ous venons <strong>de</strong> citer, pense aussi que ce qui se prépare sera la continuation,<br />
l’achèvement <strong>de</strong> ce qui se fait <strong>de</strong>puis Jésus-Christ.<br />
« C’est un fait, les peuples chrétiens tiennent le premier rang et jouent le premier rôle. Ce sont les chrétiens qui ont<br />
colonisé la Russie et l’Amérique, refoulé l’islam, conquis l’In<strong>de</strong>, ouvert la Chine; c’est la civilisation <strong>chrétienne</strong> qui apporte<br />
aux autres peuples les principes organisateurs <strong>de</strong> la vie matérielle et morale. Il semble que tous les ruisseaux humains se<br />
dirigent, pour être successivement recueillis par lui, vers le grand fleuve qui, né en Palestine, élargi en Galilée, il y a dixneuf<br />
cents ans, roule lentements ses eaux salutaires à travers le mon<strong>de</strong>. »<br />
1<br />
L’Eglise et la Révolution.<br />
2<br />
Cor. XV, 10.<br />
3<br />
Correspondance inédite <strong>de</strong> S. C <strong>de</strong> Saint-Martin publiée par L. Schaner. Paris, Dentu. - Un proverbe provençal exprime la même<br />
pensée à sa manière : Lou diable porto pèire. Le diable même apporte sa pierre aux bâtiments <strong>de</strong> Dieu.<br />
4<br />
Oeuvres complètes <strong>de</strong> J. <strong>de</strong> Maistre. T.I, p. 1.<br />
5<br />
Conférences <strong>de</strong> Notre-Dame, t. II, p. 198.<br />
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