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Actualité de Gramsci et de Freire
Si à quelque quarante ans d'écart, la conception du rôle des intellectuel-le-s du parti
de l'Italien Gramsci a été en quelque sorte réactualisée dans la conception
conscientisante de l'éducation du brésilien Freire, c'est sans doute qu'elle n'était pas
encore accomplie dans l'histoire et qu'elle continuait à se poser comme un défi à
relever pour ceux et celles qui s'inscrivent dans un rapport de solidarité avec les
classes opprimées. Et vingt-cinq ans après les premières expériences de Freire, la
question se pose encore dans les mêmes termes.
Beaucoup d'intellectuel-le-s qui se voulaient du côté des classes populaires ont lu
Gramsci ou Freire - selon le courant dans lequel ils se situaient. Ils-elles en ont parlé,
les ont commentés, s'en sont faits des maîtres à penser du moment, les ont critiqués,
puis sont passés à d'autres analyses et d'autres auteur-e-s, en esquivant le défi
existentiel qu'ils nous invitent à relever.
La conscientisation et d'autres pratiques dans la même veine ont malgré tout effectué
une percée au Québec à compter des années soixante-dix. Pratiques de
conscientisation 53
a rendu compte d'une partie d'entre elles. Des acquis existent,
mais ils sont fragiles, portés à bout de bras par des militants et militantes dont l'option
pour les classes populaires est intégrée au projet de vie. Les pratiques de
conscientisation sont notamment vulnérables aux sursauts des organisations
auxquelles sont rattaché-e-s plusieurs des agent-e-s qui les animent. Ils-elles les y
soutiennent d'ailleurs la plupart du temps à contre-courant des orientations
dominantes de ces organisations.
Dans le champ des services sociaux auquel ont été traditionnellement rattachés
plusieurs animateurs et animatrices de pratiques de conscientisation, l'étau se
resserre. L'incitation sinon la contrainte, se fait de plus en plus pressante pour que les
allié-e-s du peuple rentrent dans le rang.