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Glossarium mediae et infimae latinitatis Conditum a Carolo du ...

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vaincre, <strong>et</strong> qui n'observans pas entierement les regies qui<br />

leur estoient prescrites, faisoient tous leurs efforts pour<br />

renvers'er leur adversaire, de quelque maniere que ce fust.<br />

II y en avoit d'autres qui prenoient ces occasions pour se<br />

venger de leurs ennemis. C'est pourquoy on jugea a propos<br />

d'obliger ceux qui se faisoient faire chevaliers, de faire<br />

serment qu'ils ne fr£quenteroient les tournois que pour y<br />

apprendre les exercices de la guerre, se tirocinia non nisi<br />

causa militaris exercitii frequentaturos '. Car souvent ces<br />

combats, qui d'abord ne se faisoient que par divertissement,<br />

<strong>et</strong> pour s'exercer, se tournoient en querelles <strong>et</strong> en de veritables<br />

guerres. Henry Kinghton 2 , parlant <strong>du</strong> tournoy qui se<br />

fit a Chalon en 1'an 1274, ou le roy Edoiiard avec les Anglois<br />

C9mbattit contre le comte de Chalon <strong>et</strong> les Bourguignons,<br />

dit que les deux partis s'y porterent avec tant de chaleur <strong>et</strong><br />

de jalousie, que plusieurs y demeurerent sur la place, adeo<br />

ut non torneamentum, sed parvum bellum de Chalon communiter<br />

dicer<strong>et</strong>ur. Et Mathieu Paris 3 , racontant un autre<br />

tournoy, en 1'an 1241: c< Fuerunt autem ibidem multi, tarn<br />

« milites quam armigeri, vulnerati, <strong>et</strong> clavis cassi, <strong>et</strong> graviter<br />

« Isesi, ep quod invidia multorum lu<strong>du</strong>m in praelium com-<br />

« mutavit. »<br />

Les histoires sont remplies de ces funestes accidens qui<br />

arrivoient aux tournois. Raoul, comte de Guines, y perdit la<br />

vie, au recit de Lambert d'Ardres *. Robert de Hierusalem,<br />

comte de Flandres, y fut blesse a mort 5 . Geoffrey de Magneville,<br />

comte d'Essex en Angl<strong>et</strong>erre, y fut tu6 en 1'an 1216 6 .<br />

Florent, comte de Hainaut, <strong>et</strong> Philippes, comte de Bolpgne<br />

<strong>et</strong> de Clermont, perirent pareillement au tournoy qui fut<br />

tenu en la ville de Corbie, en 1'an 1223 7 . Comme aussi le<br />

comte de Hollande a celuy qui fut tenu a Neumague 1'an<br />

1234 s ; Gilbert, comte de Pembroch, en 1'an 1241 9 ; Hernaud<br />

de Montigny, chevalier anglois, en 1'an 1252 10 ; Jean, marquis<br />

de Brandebourg, en 1'an 1269 ". Le comte de Clermont y fut<br />

tellement blesse, qu'il en perdit 1'esprit, 1'an 1279 12 ; Louys,<br />

fils <strong>du</strong> comte Palatin <strong>du</strong> Rhin y perdit la vie, en 1'an 1289 l3 ;<br />

Jean, <strong>du</strong>e de Brabant, en 1'an 1294 '*. Et plusieurs autres<br />

personnes de condition, que je passe, dont les auteurs l5<br />

font mention.<br />

Ces funestes accidens donnerent occasion aux papes<br />

d'interdire les tournois, avec de grieves peines, excommuniant<br />

ceux qui s'y trouveroient, <strong>et</strong> defendant d'inhumer dans<br />

les cim<strong>et</strong>ieres sacrez ceux qui y perdroient la vie. Innocent<br />

II l6 , Eugene III, <strong>et</strong>, apres eux, Alexandre III, au concile de<br />

Latran de Fan 1179, furent les premiers qui fulminerent leurs<br />

anathemes, declamant contre les tournois, <strong>et</strong> les appellant<br />

« d<strong>et</strong>estabiles nundinas vel ferias, quas vulgo torneamenta<br />

« vocant, in quibus milites ex condicto convenire solent, <strong>et</strong><br />

« ad ostentationem virium suarum <strong>et</strong> audaciae temere con-<br />

« grediuntur, unde mortes hominum <strong>et</strong> perieula animarum<br />

« saBpe proveniunt. » Ce concile ajoute ces mots : « Et siquis<br />

« eorum ibi mortuus fuerit, quamvis ei poenitentia non<br />

deneg<strong>et</strong>ur, ecclesiastica tamen careat sepultura. » Innocent<br />

III " les interdit pareillement pour cinq ans, sous peined'excommunication.<br />

C'est ce qui a fait dire a C&sarius l8 qu'il ne<br />

faisoit pas de difficulte d'avancer que ceux qui estoient tuez<br />

dans les tournois estoient damnez : « De his vero qui in<br />

« torneamentis ca<strong>du</strong>nt nulla questio est quin yadant ad<br />

« inferos, si non fuerint adjuti beneficio contritionis. » II<br />

parle ensuite d'une vision qu'un prestre espagnol cut de<br />

quelques chevaliers qui avoient este tuez dans les tournois,<br />

qui demandoient d'estre secourus par les prieres des fiddles.<br />

A quoy 1'on peut rapporter une autre vision, dont Mathieu<br />

Paris l9 parle en 1'an 1227, ecrivant que Roger de Toeny,<br />

vaillant chevalier, s'apparut a Raoul son frere, <strong>et</strong> lui tint ce<br />

discours: « Jam <strong>et</strong> poenas vidi malorum, <strong>et</strong> gaudia beato-<br />

« rum ; nee non supplicia magna, quibus miser deputatus<br />

« sum, oculis meis conspexi. Vae t vae mini! quare unquam<br />

« torneamenta exercui, <strong>et</strong> ea tanto studio dilexi. » La Grande<br />

Chronique Belgique 20 raconte qu'en 1'an 1240 il se fit un<br />

tournoy a Nuis, pres de Cologne, apres la Pentecqste, ou<br />

soixante tant chevaliers qu'ecuyers ayant per<strong>du</strong> la vie, pour<br />

avoir este pour la plupart suffoquez de la pqussiere, on<br />

entendit apres leur mort les cris des demons, qui y parurent<br />

1. W. Heda, in Hist. Episc. Traject. — 2. L. 2, de Event. Angl. p. 2459. —<br />

3. P. 383. — 4. P. 13. — 5. W. Malmesb. 1. 3, Hist. Angl. p. 105. — 6. Math. Par.<br />

p. 194. _ 7. J0. Beka : W. Heda : Jo. a Leydis, 1. 22, c. 16. — 8. Godef. Mon.<br />

A. 1234, Hist. Archiep. Brem. p. 110. — 9. Math. Paris, p. 383 ; Math. Westm.<br />

p. 305. — 10. Id. f. 566. — 11. Chr. Austral. A. 1269 : Chr. Citizense, p. 813. —<br />

12. Gesta Phil. Ill, reg. Fr. — 13. Chr. Austral. A. 1289. — 14. Mag. Chr. Belg.<br />

A. 1294. — 15. Chr. d'e Flandr. ch. 31 ; Math. Westm. A. 1295 : Tom. 2, Monast.<br />

Angl. p. 220, 222; P<strong>et</strong>rarch. Epist. Famil. 73; M. Chr. Belg. A. 1240. —<br />

16. Baron. A. 1148, n. 12. — 17. Tom. 5, Hist. Fr. p. 759. — 18. Caesar. Hist, de<br />

Mirac. 1. 12, c. 16, 17. — 19. P. 237. — 20. A. 1240.<br />

DISSERTATIONS<br />

en guise de corbeaux <strong>et</strong> de vautours, au-dessus de leurs<br />

corps. C'est done des termes de ces conciles que les tournois<br />

sont appellez par S. Bernard ', 1'auteur de sa vie, Csssarius 1 ,<br />

<strong>et</strong> Lambert d'Ardres 3 , nundinas execrabiles <strong>et</strong> maledictse.<br />

Innocent IV n'apporta pas moins de rigueur pour abolir<br />

les tournois que ses predecesseurs *. Mais, ne pouvant en<br />

empecher entierement 1'usage, il les defendit pour trois ans,<br />

au concile tenu a Lyon 1'an 1245, prenant pour pr<strong>et</strong>exte qu'ils<br />

empechoient les gentilshommes d'aller aux guerres d'outre<br />

mer. On prenoit encore celuy de la depense que les chevaliers<br />

faisoient en ces occasions, que Ton tachoit d'arr<strong>et</strong>er, aussi<br />

bien que toutes les autres, comme superflues, <strong>et</strong> qui les<br />

m<strong>et</strong>toient dans 1'impuissance de fournir a celles qu'il leur<br />

faloit faire pour les guerres saintes. Lambert d'Ardres s :<br />

« Cum omnino tune temporis propter Dominici sepulchri<br />

« peregrinationem in toto orbe interdicta fuissent tornia-<br />

« menta. » Et yeritablement les gentilshommes faisoient deprodigieuses<br />

depenses dans ces rencontres, soit acause de la<br />

magnificence de leurs habits <strong>et</strong> de leurs suites <strong>et</strong> le prix de<br />

leurs chevaux, que parce qu'ils estoient souvent obligez<br />

d'entreprendre de longs voyages pour en aller chercher les<br />

occasions : ce qui a fait tenir ces paroles au cardinal Jacques<br />

de Vitry a , au suj<strong>et</strong> des peuples, qui souffroient infiniment<br />

par ces defenses des seigneurs : « Maxime cum eorum dpmini<br />

« prodigalitati vacantes <strong>et</strong> luxui , pro torneamentis <strong>et</strong><br />

« pomposa sseculi vanitate expensis superfluis <strong>et</strong> debitis<br />

« astringebantur <strong>et</strong> usuris. » Et le meme Lambert 7 parlant<br />

des prodigalitez d'Arnoul le Jeune , seigneur d'Ardres:<br />

« Lic<strong>et</strong> extra patriam munificus <strong>et</strong> liberalis, <strong>et</strong> expensaticus<br />

« dicer<strong>et</strong>ur, <strong>et</strong> circa militiam quicquid militantium <strong>et</strong> tor-<br />

« niamentantium consu<strong>et</strong>udo poscebat <strong>et</strong> ratio, quasi prodi-<br />

« galiter expender<strong>et</strong>. »<br />

Le pape Nicolas IV t6moigna le m6me zele pour <strong>et</strong>eindre<br />

les tournois 8 , particulierement en France, ou ils se faisoient<br />

plus frequemment que dans les autres royaumes, excommuniant<br />

ce*ix qui contreviendrpient a ces defenses. Et sur ce<br />

que le cardinal de Sainte-Cecile, legat <strong>du</strong> saint-siege, qui les<br />

avoit fait publier, en accorda la surseance pour trois ans a<br />

la priere <strong>du</strong> roi, il 1'en reprit aigrement par la l<strong>et</strong>tre qu'il<br />

lui ecrivit, qui est inser6e dans les Annales Ecclesiastiques.<br />

Clement V interdit pareillement les tournois, principalement<br />

acause <strong>du</strong> dessein qu'il avoit de faire entreprendre aux<br />

princes Chr<strong>et</strong>iens la guerre contre les infideles. Sa bulle 9 est<br />

datee a Peraen de Gransille pr6s de Malausane, au diocese<br />

de Bazas, le 14 de septembre Pan 8 de son pontificat, de laquelle<br />

j'ai extrait ce qui sert a mon suj<strong>et</strong>: « Cum enim in<br />

« torneamentis <strong>et</strong> justis in aliquibus partibus fieri solitis<br />

« multa perieula immineant animarum <strong>et</strong> corpqrum, quo-<br />

« rum destructiones plerumque contingunt, nemini vertitur<br />

« in <strong>du</strong>bium sanse mentis, quin illi qui torneamenta faciunt,<br />

« vel fieri procurant, impedimentum procurant passagio<br />

« faciendo, ad quod homines, equi, <strong>et</strong> pecunia <strong>et</strong> expensae<br />

« fore necessaria dinoscuntur; quorum torneamentorum<br />

« factura cum gravis poanae adjectione a nostris prsedecesso-<br />

« ribus est interdicta. »<br />

Mais 1'ardeur de la noblesse estoit si grande, pour les occasions<br />

qui s'offroient de donner des preuves de sa valeur dans<br />

les temps de paix, qu'il n'y avoit point d'anatheme ni de<br />

bulle des papes qui en put arr<strong>et</strong>er le cours. Ce qui a fait<br />

dire a Guillaume de Neubourg : « Lic<strong>et</strong> solemnem ilium tiro-<br />

« num concursum tanta sub gravi censura v<strong>et</strong>uerit pontifi-<br />

« cum autoritas, fervor tamen juvenum armorum vanissimam<br />

« affectantium gloriam, gaudens favore principum probates<br />

« habere tirones volentium, ecclesiasticae provisionis sprevit<br />

« decr<strong>et</strong>um. » Et Henry de Knighton I0 , en 1'an 1191: « Fie-<br />

« bant interea ad tironum exercitium intermissa diu tor-<br />

« neamenta, quasi bellorum praBludia, nonobstante papali<br />

« prohibitione- »<br />

Comme done le peril qui se trouvoit dans les combats des<br />

tournois estoit si grand ", que cela a donne premierement<br />

suj<strong>et</strong> aux papes de les interdire sous les peines d'excommunication,<br />

Ton jugea aussi a propos d'en dispenser au moins<br />

les souverains <strong>et</strong> les princes de leur sang, acause de 1'importance<br />

de leurs personnes. Du Till<strong>et</strong> l2 raconte que le roy<br />

Philippes-Auguste prit, au mois de may 1'an 1209, le serment<br />

de Louys de France, son fils alne, <strong>et</strong> de Philippes comte de<br />

Bologne, son autre fils, qu'ils n'iroient en aucun tournoy<br />

sans son conge, sous pr<strong>et</strong>exte d'y faire signaler leur valeur<br />

<strong>et</strong> d'y remporter le prix: leur perm<strong>et</strong>tant, toutefois, que s'il<br />

s'en faisoit quelqu'un pres d'eux, d'y aller, sans y porter les<br />

1. Ep. 358 : Theoder. Abb., in Vita S. Bern. 1.1, c. 11. — 2. L. 7, c. 39 ; 1.12,<br />

c. 17. — 3. P. 13, 29. — 4. Math. Par. p. 455. — 5. P. 250. — 6. L. 2, Hist.<br />

Occid. c. 'A. — 7. P. 167. — 8. Od. Raynald. A. 1279, n. 16, 17. — 9. Orig. —<br />

10. P. 2408. — 11. Favyn, torn. 2, p. 1751. — 12. P. 313.

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