Glossarium mediae et infimae latinitatis Conditum a Carolo du ...

eduis encore sous cette espece de cris de guerre les suivans:
le cry de la maison de Montoison en Dauphine' : A la recousse
Montoison, que Philibert de Clermont, seigneur de
Montoison, obtint du roy Charles VIII en la bataille de
Fournoue, ainsi qu'il est amplement rapporte par un auteur
de ce temps ; celuy des dues de Brabant 2 , Lembourg a celui
qui I'a conquis, que Jean-I, due de Brabant, prit apres avoir
conquis le duche de Limbourg, qui lui estoit dispute par le
comte de Gueldres, qu'il dent en la bataille de Waronck, 1'an
1288: car les dues de Brabant 3 avoient avant ce temps-la
pour cry Louvain au riche due; le cry de la maison d'Anglure,
Saladin, ou Damns, dont 1'origine est racofttee par Papire
Masson en YEloge du seigneur de Givry. Mais je serois trop
long si par une curieuse recherche j'entreprenois de m'etendre
sur 1'origine et le sujet de ces cris : c'est pourquoy je me
contenteray d'en faire le denombrement suivant la distinction
que j'ay etablie cy-dessus.
La maison de Chauvigny en Berry, suivant I'auteur du Roy
d'armes, avoit pour cry Chevaliers pleuvent ; mais un Provincial
manuscrit dit que le seigneur de Chauvigny crie Hierusalem,
plainement.
Le seigneur de la Chastre: A I'attrait des bans chevaliers.
Le seigneur de Culant: Au peigne d'or.
Salvaing-Boissieu en Dauphine : A Salvaing le plus Gorgius.
Vaudenay : Au bruit 4 .
La maison de Savoye 5 crioit quelquefois Savoye, quelquefois
Saint-Maurice, et souvent Bonnes nouvelles.
Le seigneur de Rosiere en Barrois : Grand joye.
Le vicomte de Villenoir en Berry : A la belle.
Le seigneur de Chasteauvillain : Chastelvilain a I'arbre d'or.
Le seigneur d'Eternac : Main droitte.
Le seigneur de Neufchastel en Suisse: Espinart a I'Escosse.
Le seigneur de Waurins en Flandres 6 : Mains que le pas.
Le seigneur de Kercournadeck en Bretagne : En Diex est.
Ceux de Bar : Au feu, au feu.
Ceux de Prie : Cans d'oiseaux.
Ceux de Buves en Artois : Suves tost assis.
La maison de Molac, Gric a Molac : qui signifie, Silence 7 .
Messire simon Morhier, grand maitre d'hostel de la reine
de France (ce sont les termes d'un Provincial), prevost de
Paris sous Charles VI, et grand partisan des Anglois, crioit :
Morhier de I'extrait des Preux.
Les chevaliers du Saint-Esprit au droit desir, autrement
de I'Enneu, ou del Nodo, instituez par Louys de Tarente, rqy
de Sicile, le jour de la Pentescoste 1'an 1352, apres avoir cri6
le cry de leurs families, crioient le cry de 1'ordre, qui estoit :
Au droit desir 8 .
Les anciens seigneurs de Preaux en Normandie 9 avoient
pour cry : Cesar Auguste.
II y avoit de ces cris de guerre qui marquoient la dignitS
annexee a la famille dont le prince ou seigneur estoit issu.
Ainsi les premiers dues de Bourgogne avoient pour cry .-
Chastillon au noble due ; les dues de Brabant: Louvain au
riche due ; le due de Bretagne : Saint Halo au riche due ; le
le comte de Mceurs : Mceurs au comte ; les comtes de Hainault:
Hainault au noble comte, ou Hainault simplement,
dans lachronique de Flandres I0 ; les comtes Dauphins d'Auvergne:
Clermont au Dauphin d'Auvergne ; les dues de Milan
dans Froissart'' : Pavie au seigneur de Milan. Renerus, parlant
du comte de Los, « damans tertio titulum sui comita-
« tus, scilicet Loz, audacter hostium cuneos penetravit. » Les
anciens comtes d'Anjou l2 crioient Valie, qui est le nom d'un
pays voisin du comt6 d'Anjou, que Ton nomme Vallee, 911 est
Beaufort. Philippes Mouskes, en la Vie de Charles le Simple,
parlant des Normans:
Lors s'en al^rent a gens tantes,
Qu'ils arsent la cite de Nantes,
Touraine, et Angers, et Ango,
Le Mans, et Valie et Poito.
II y en avoit qui estoient tirez de quelques epithetes d'honneur
attribuez aux families. Ainsi la Maison de Bousies en
Hainault crioit : Bousies au bon fier; les seigneurs de Maldenghen
en Flandres : Maldenghen la loiale; les seigneurs
de Coucy enPicardie : Coucy a la merveille, ou, selon d'autres:
Place a la banniere ; les seigneurs de Vilain issus des Chastellains
de Gand : Gand a Vilains sans reproche l3 .
1. HJlarion de la Coste, aux Eloges des Dauphins, p. 3, 4. — 2. Chron. de Flandr.
c. 29. — 3. Hist, de la Maison de Chastillon, 1. 3, c. 8 ; Provincial ms. — 4. La
Colombiere. — 5. M. Guichenon, p. 140. — 6. La Colombiere. — 7. Science heroique.
— 8. Le Feron, Ordonnances ms. dudit ordre. — 9. Traite ms. des armes des
families de Normandie esteintes. — 10. Cbron. de Fland. c. 67 ; Froissart, vol. 1,
c. 63. — 11. Vol. 4, c. 25. — 13. Chappeavill. in not. ad ^Egid. aur. Vail. Mon.
c. 111. — 13. Hist, de la Maison de Gand.
SUR L'HISTOTRE DE SAINT LOUYS. 43
On en remarque d'autres tirez et extraits du blason des
armes de la famille : tel estoit le cry des comtes de Flandres :
Flandres au Lyon; et celui de la maison de Waudripon en
Hainault: Cul a Cul Waudripont, parce qu'elle porte en
armes deux lyons adossez.
Quelques princes parvenus a des royaumes ou principautez
spuveraines, pour marquer 1'origine de leur ancienne extraction,
en ont conserve la memoire par le nom de leur famille
dont ils estoient issus, qu'ils ont pris pour cry d'armes. C'est
pour cela que les rois de Navarre, si nous croyons Andr6
Favyn, avoient pour cry de guerre :'Begorre, Begorre, comme
issus et prenans leur extraction des anciens comtes de
Bigorre. Jean de Bailleul, roi d'Escosse, retint toujours le cry
de sa maison: Hellicourt en Pontieu, qui est une baronnie
situ6e au comte de Pontieu, laquelle lui appartenoit de son
propre, avec les seigneuries de Bailleul en Vimeu et de Harnoy,
et qui est a present en la maison de Rouhaut-Gamaches
'. D'ou on recueille 1'erreur de Nicolas Vigner, en sa
Bibliotheque historiale, de la Croix-du-Maine, en sa Bibliotheque
francoise*, et de Denis Sauvage, sur la Chronique de
Flandres 3 , qui ont cru que ceroy estoit seigneur de Harcourt
en Normandie, 1'ayant confqndu avec Hellicourt, qui est au
comte de Pontieu. Dans Froissart 4 le comte de Derby, de la
maison de Lancastre, crie : Lancastre au comte Derby.
Souvent les rois et les princes ont crie le nom de la capitale
de leurs Etats. L'empereur Othon a la bataille de Bovines
cria Rome ; Philippes Mouskes :
Li rois Othe pour son reclaim
Cria Roume trois fois s'enseigne,
Si come proesse li enseigne.
Ottocar 5 , roy de Boheme, en un combat contre les Allemans,
cria Prague, Prague ; les dues de Brabant crioient Louvain,
cpmme j'ay deja remarque. Le comte Raymond de Saint-
Gilles, en la premiere guerre d'outremer, crioit « Tolose, et
« acclamata Tolosa, quod erat signum comitis, discessit, »
dit Raymond d'Agiles 6 . Et Willebrand d'Oldenbourg 7 ecrit
que les rois d'Armenie crioient Navers, ou Navarzan, qui estoit
le nom d'un fort chateau d'Armenie.
Les communes crioient ordinairement le nom de la ville
principale de leur contree. Les Normans, dans Philippes
Mouskes 8 , crient: Rouen; les Gascons, Bordeaux:
Et Ruen escrient li Normant,
Bretagne hucent li Breton,
Bourdeaux et Blaves li Gascon.
Les Avalois, qui sont ceux des environs de Cologne, terme
que Sauvage n'a pas entendu en la Chronique de Flandres 9 ,
crierent a la bataille de Bovines, suivant le meme poe'te :
Cologne :
Li Avalois crient Coulongne.
Les Flamens,revoltez contre leur prince, dont les principaux
estoient ceux de Gand, crioient Gand! Gand I suivant Froissart
I0 .
Mais pour le plus souvent le cry d'armes estoit le nom de
la maison; d'ou vient que nous lisons presque a toutes rencontres
dans les Provinciaux, ou recueils de blasons, il porte
de, etc., et crie son nom ; c'est a dire que le cry d'armes est
semblable au nom de la famille. Dans Froissart ", le seigneur
de Roye crie : Roye au seigneur de Roye. Guillebert
de Berneville, en 1'une de ses chansons, parlant d'Erard de
Valery:
Va sans t'arrester
Erard saluer,
Qui Valery crie.
Ainsi le comte de Montfort en la guerre contre les Albigeois
criait Montfort, comme Pierre, mqine du Vaux de Sarnay l2 ,
nous 1'apprend, et apres luy Philippes Mouskes. Roderic de
Tolede l3 , parlant de celuy qui portoit 1'etendart du comte
Gomez en la bataille contre le roy d'Arragon :