Glossarium mediae et infimae latinitatis Conditum a Carolo du ...
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24 DISSERTATIONS<br />
DES ARMES A OUTRANGE, DES JOUSTES,<br />
DE LA TABLE RONDE, DES BEHOURDS, ET DE LA QUINTAINE.<br />
Les tournois dont je viens de parler n'estoient que jeux <strong>et</strong><br />
passe-temps, <strong>et</strong> ne se faisoient que pour exercer la noblesse:<br />
c'est pourquoi on n'y employoit que des armes innocentes :<br />
<strong>et</strong> s'il y arrivoit quelquefois de funestes accidens, c'estoit<br />
centre 1'intention <strong>et</strong> 1'esprit de ceux qui les inventerent,<br />
lesquels tacherent d'y remedier par les regies <strong>et</strong> les loix<br />
qu'ils y prescrivirent. Mais dans la suite des temps on en<br />
mit d'autres en usage, ou Ton combattoit avec les armes<br />
dont on se sert dans les guerres, c'est-a-dire avec des lances<br />
<strong>et</strong> des 6pees dont les pointes n'estoient pas emoucees. D'ou<br />
Mathieu Paris ' a pris suj<strong>et</strong> d'appeller c<strong>et</strong>te espece de tournoy<br />
torneamentum aculeatum, <strong>et</strong> hostile, parce que les deux<br />
partis y venoient aux mains avec des armes offensives,<br />
comme avec des ennemis. Nos Francois lui ont donne le<br />
nom d'armes a outrance, dautant que ces combats ne se<br />
terminoient presque jamais sans effusion de sang, ou sans<br />
la mort de ceux qui entroient en lice, ou sans 1'aveu <strong>et</strong> la<br />
confession de celui qui estoit terrasse <strong>et</strong> vaincu.<br />
L'ordonnance de Philippes le Bel 2 pour les <strong>du</strong>els, <strong>et</strong> Hardoiiin<br />
de la Jaille en son traite sur le meme suj<strong>et</strong>, qu'il dedia<br />
a Ren6, roi de Sicile, adm<strong>et</strong>tent plusieurs cas ausquels on<br />
estoit tehu pour vaincu dans les <strong>du</strong>els : le premier est<br />
lorsque 1'un des combattans avoiioit -le crime dont il estoit<br />
accuse, <strong>et</strong> se rendoit volontairement a son accusateur ; 1'autre<br />
estoit quand 1'une des parties estoit j<strong>et</strong>tee hors des lices,<br />
ou qu'elle avoit pris la fuite; <strong>et</strong> enfln le troisieme estoit<br />
lorsqu'elle avoit este tuee dans le combat. Car en tous ces<br />
cas le gage de bataille estoit outre, ainsi que parle le Roy<br />
(auquel endrqit Andre Favyn a mis mal a propos le mot<br />
ottroie): c'est-a-dire qu'il estoit termine par la mort, la fuite,<br />
ou la confession de 1'une des parties. Oar outrer signifioit<br />
proprement percer son ennemy de 1'epee ou de la lance;<br />
d'ou nous disons, II lui a perce le corps d'outre en outre.<br />
Robert de Bourron, en son Roman de Merlin : « II ne cuide<br />
« pas qu'il ait un seul chevalier el mpnde qui <strong>du</strong>sques a<br />
« outrance le puest mener, ou <strong>du</strong>sques a la mort. » Georges<br />
Chatellain 3 , en 1'Histoire de Jacques de Lalain, chevalier<br />
de la Toispn d'or, a aussi us6 de ce mot en c<strong>et</strong>te signification<br />
: « Mais ne demeura gueres de grand haste <strong>et</strong> ardeur,<br />
« que le seigneur de Haqu<strong>et</strong> avoit de ferir <strong>et</strong> outrer messire<br />
« Simon de Lalain. »<br />
On appellpit done particulierement armes a outrance les<br />
combats qui se faisoient avec armes offensives, de commun<br />
accord,<strong>et</strong>de commun consentement, sans aucune ordonnance<br />
de juges, <strong>et</strong> neantmoins devant des juges qui estoient nommez<br />
<strong>et</strong> choisis par les parties, <strong>et</strong> sous des conditions dont<br />
on demeuroit d'accprd reciproquement. En quoy ces combats,<br />
s'ils estoient singuliers. c'est-a-dire d'homme a homme, differqient<br />
des <strong>du</strong>els, qui se faisoient toujours par 1'ordonnance<br />
<strong>du</strong> juge.<br />
Les armes a outrance se faisoient ordinairement entre ennemis,<br />
ou entre personnes de differentes nations, sous de<br />
differents princes, avec les defis <strong>et</strong> les conditions <strong>du</strong> combat,<br />
qui estoient portez par les roys d'armes <strong>et</strong> les herauds ; les<br />
princes donnoient a c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> des l<strong>et</strong>tres de sauf-con<strong>du</strong>it a<br />
ceux qui devoient combattre dans les endroits des deux Etats<br />
dont on eonvenqit. Les juges <strong>du</strong> combat estoient aussi<br />
choisis par les princes, <strong>et</strong> memes les princes s'y trouvoient<br />
quelquefois en c<strong>et</strong>te qualite. Souvent ces defis se faisoient<br />
en termes generaux, sans designer les noms des personnes<br />
qui devoient combattre; mais on y marquoit seulement le<br />
nombre de ceux qui devoient faire le combat, la qualite des<br />
armes, <strong>et</strong> le nombre des coups qu'on devoit donner. D'ou<br />
\. P. 554, 372. — 2. Dans Favyn, Savarcn, <strong>et</strong>c.; Hardoiiin de la Jaille, Ms. —<br />
3. Ch. 55.<br />
DISSERTATION VII. -<br />
vient que Jacques Valere, en son Traite de la noblesse, appelle<br />
c<strong>et</strong>te espece de combat Champs a articles, ou a outrance,<br />
acause des conditions qui y estoient appos6es ; <strong>et</strong> Froissart',<br />
joustes mortelles <strong>et</strong> a champ.<br />
Quoy que le nombre des coups qu'on devoit donner fust<br />
ordinairement limite, souvent neantmoins les parties ne se<br />
separoient point sans qu'il y en eust de morts ou de grievement<br />
blessez. C'est pourquoi Froissart, decrivant le combat<br />
d'entre Renaud de Roye, chevalier picard, <strong>et</strong> Jean de Holland,<br />
chevalier anglois, tient ce discours: « Or, regardez le peril<br />
« ou tels gens se m<strong>et</strong>toient pour leur honneur exaucer; car<br />
« en toutes choses n'a qu'une seule mesaventure <strong>et</strong> un coup<br />
« a meschef. » Et ailleurs, racqntant le combat d'entre Pierre<br />
de Courtenay, chevalier anglois, <strong>et</strong> le seigneur de Clary en<br />
Picardie 2 : « Puis leur furent baillez leurs glaives a pointes<br />
« acerees de Bourdeaux, tranchans <strong>et</strong> affilez. Es fers' n'y<br />
« avoit point d'espargne, fors 1'aventure, telle que les armes<br />
« 1'envoient. »<br />
Ces combats, quoy que mortels, se faisoient ordinairement<br />
entre des personnes qui, pour le plus souvent, ne se connaissoient<br />
pas, ou <strong>du</strong> moins qui n'avoient aucun deme!6 particulier<br />
entre eux; mais seulement pour y faire par<strong>et</strong>re la bravoure,<br />
la generosit6 <strong>et</strong> 1'adresse dans les armes. C'est pour<br />
cela qu'on avoit encore <strong>et</strong>ably des loix <strong>et</strong> des regies generales<br />
pour c<strong>et</strong>te maniere de combattre, ausquelles, neantmoins,<br />
on derogeoit quelquefois par des conditions dont on convenoit<br />
ou qu'on propqsoit. La plus ordinaire de ces loix estoit<br />
que si on combattoit avec 1'epee ou la lance, il faloit frapper<br />
entre les quatre membres : que si on frappoit ailleurs, on estoit<br />
blame <strong>et</strong> condamn6 par les juges. D'ou vient que Froissart<br />
3 , parlant d'un chevalier qui en c<strong>et</strong>te occasion avoit<br />
frappe sur la cuisse de son ennemy, ecrit « qu'il fut dit que<br />
« c'estoit villainement pousse. » La peine de ceux qui n'observoient<br />
pas la loi <strong>du</strong> combat estoit la perte de leurs armes<br />
<strong>et</strong> de leurs chevaux. Le meme auteur *, ailleurs : « Les An-<br />
« glois virent bien qu'il s'estoit mesfait, <strong>et</strong> qu'il avoit per<strong>du</strong><br />
« armes <strong>et</strong> cheval si les Francois vouloient. » II y a une infinite<br />
d'exemples de c<strong>et</strong>te espece de combats dans Mathieu<br />
Paris 5 , dans le meme Froissart 6 , dans 1'Histoire de Louy_s<br />
<strong>du</strong>e de Bourbon, ecrite par d'Orronville 7 ; dans Georges Ch&tellain<br />
8 , Monstrel<strong>et</strong> 9 , Caxton I0 , <strong>et</strong> autres auteurs, qui font<br />
voir qu'ils se faisoient pour 1'ordinaire en attendant les occasions<br />
d'un combat general entre les nations ennemies, en<br />
estant comme le prelude, ainsi que parle Roderic, archevesque<br />
de Tolede'' : & Agareni <strong>et</strong>iam in mo<strong>du</strong>m tqrneamenti<br />
« circa ultimam partem castrorum qusedam belli praeludia<br />
« attentabant. » Desorte qu'on usoit <strong>du</strong> terme vulgaire de<br />
tournoier lorsqu'on faisoit de legers combats centre les ennemis<br />
avant la bataille, que les ecrivains nomment belluni<br />
campale. La l<strong>et</strong>tre d'Arnaud, archevesque de Narbonne, au<br />
suj<strong>et</strong> de la victoire remportee par les roys de Castille, d'Arragon<br />
<strong>et</strong> de Navarre sur les Mores 1'an 1212, parlant des<br />
escarmouches qui se firent la veille <strong>du</strong> combat: « Arabibus<br />