Glossarium mediae et infimae latinitatis Conditum a Carolo du ...

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tres, c'a este pour quelque rencontre ou excellens faits d'armes
qu'ils out est6 choisis par quelques seigneurs particuliers,
comme la suite de ce discours le fera voir.
Les Francois qui setrouverent a la premiere conquete de la
Terre Sainte avoient pour cry general ces mots, Adjuva, Deus,
ainsi que nous apprenons de Foucher de Chartres ', et d'un
autre ancien auteur 2 , ou bien « Eia Deus, adjuva nos, » suivant
I'Histoire de Hierusalem. Raymond d'Agiles 3 rapporte la
cause et 1'origine de ce cry a la vision de Pierre Barthelemy,
qui trouva la sainte lance au temps que les Turcs assiegeoient
la ville d'Antioche sur les nostres: car durant ce
siege S. Andr6 luy estant apparu plusieurs fois, il luy enjoignit
de persuader aux Chretiens d'avoir recours a Dieu dans
les fatigues du siege et de la faim qu'ils enduroient, et de prendre
dans les combats pour cry d'armes ces mots Deus, adjuva:
« Et sit signum clamoris vestri, DEUS, ADJUVA, et revera
« Deus adjuvabit vos, » qui sont les paroles de saint Andre.
Roderic *, archevesque de Tolede, dit qu'au siege et a la prise
de Cordoue sur les Sarrazins d'Espagne, les Chretiens crierent
aussi Deus, adjuva. Us ajoustoient quelquefois a ce cry
ces mots: Deus vult 5 , ou, pour parler en langage du temps,
et suivant qu'ils sont enoncez en la chronique du Mont
Cassin 6 , Dlex el volt, dont 1'origine est rappprtee au concile
de Clermont en Auvergne, ou le pape Urbain II, ayant fait
une forte exhortation pour porter les princes Chretiens a
prendre les armes pour aller retirer la Terre Sainte des
mains des infideles, «ita omnium qui aderant aflectus in
« unum concitavit, ut omnes acclamarent, Deux volt, Deux
« volt 7 . » Apres quoy le pape, ayant rendu graces a Dieu,
dit entre autres paroles celle-cy: « Sit ergo vobis vox ista in
« rebus bellicis militare signum, quia yerbum hoc a Deo est
« prolatum, cum in hostem flet bellicosi impetus congressio,
« erit universis haec ex parte Dei una vociferatio, Deus vult,
« Deus vult. » D'ou on recueille pourqupy le cry est appe!16
Signum Dei dans quelques auteurs 8 . Boempnd, qui faisoit la
guerre en la Pouille, ayant appris qu'il estoit arrive un grand
nombre de gens de guerre, qui allpient degager le S. Sepulcre
du joug des infideles, s'enquit a 1'instant qui ils estoient,
quelles armes ils portpient, et quel cry ils crioient 9 : « Quod
« signum (haec gens) in certamine spnat. Cui per ordinem
« dicta sunt omnia. Deferunt arma jugiter ad bellum con-
« gruentia, in dextra, vel inter utrasque scapulas Crucem
« Christi bajulant,.sonum vero Deus hoc vult, Deus hoc vult,
« Deus hoc vult, simul una voce conclamant. » Nous lisons '°
qu'ils ont encore crie ces mots, Christus vincit, Christus regnat,
Christus imperat, que nos rois ont depuis fait graver
dans leurs monnoyes d'or et d'argent, et particulierement
dans celles que nous appellons escus. Csesarius" nous apprend
qu'ils crioient encore : « Dieu, aide et le S. Sepulcre,
« Deus adjuva et sanctum sepulcrum. »
C'est de ces cris de guerre de nos paladins francois, et de
nos cpnquerans de la Terre Sainte , que les dues de Normandie
ont receu le leur, conceu en ces termes: « Diex aie,
« dame Diex aie, » par lesquels ils reclamoient 1'assistance
de Dieu, ces mots signifiant « Domine Deus, adjuva: » au
lieu dequoy quelques-uns ont pense qu'ils signifioient, « Nos-
« tre dame Dieu aide, » acause de Dame, qui signifie en cet
endroit Seigneur. De fait ceux qui ont ecrit I'Histoire d'Angleterre
13 les ont tournez par ceux-cy, « inclamato Dei
« auxilio. » Orderic Vital '*, parlant des premieres guerres
saintes: « Illi ver6 jam acriter pugnantes inyenerunt, et sift
gnum Normannorum, Deus, adjuya, fiducialiter vociferati
« sunt. »
Ainsi les seigneurs de Montmorancy avoient pour cry,
suivant un Provincial manuscrit: Dieux, aieve, ou selpn les
autres: Dieu, aide au premier chrestien. Quelques historiens IS
en rapportent 1'origine au premier seigneur de Montmorancy,
qu'ils nomment Lisoie, qui fut le premier des gentilshommes
francois qui embrassa le christianisme avec le roy Clovis, et
qui fut baptise par saint Remy. Ses successeurs ayant de la
pris sujet de crier en guerre l6 , Dieu aide au premier Chrestien,
comme estant un honneur deft a cette maispn d'avoir produit
le premier qui, apres son prince, ait quitte les erreurs
du paganisme, pour embrasser la veritable religion. La maison
de Beauffremont en Lorraine et en Bourgogne avoit un
1. Fulch. Carnot. 1. 1, c. 18 : 1. 2, c. 10 ; 1. 3, c. 42, 46, 50 : Gesta Franc,
expug. Hier. 1. 1, c. 26, 43. — 2. Gesla Dei, p. 602. —3. Raymond d'Agil. p. 153.
— 4. Roderic. Tolet, 1. 19, de reb. Hisp. c. 16. — 5. Gesta Fran, expug. Hier. 1.1,
c. 26. — 6. Chr. Cass. Befly des dues de Guienne, c. 29. — 7. Rob. Mon. 1. 1. —
8. Gesta Fran. exp. Hier. 1. 1, c. 8. —9. TuHebod. I. 1. — 10. Fulch. Car. 1. 2,
c. 31 : Gesta Fran. exp. Hier. 1. 1. c. 56: Hist. Hier. p. 607. — 11. L, 10, c. 12.
— 12. Loisel en 1'Hist. de Beauvais, p. 154. — 13. Wuillelm. Malmesb. 1. 4, p. 101.
— 14. Orderic. 1. 10, j>. 798. — 15. Chr. ms. de France parlanl de la bat. de
Bovines. — 16. Ph. Mor. Doublet, aux Aniiq. de S. Denys, 1. 1, c. 17.
cry semblable a celuy de Montmorancy, les seigneurs de
cette famille crians en guerre, Bauffremont au premier chrestien,
ainsi que nous apprenons de quelques Provinciaux 1 ,
acause peut-estre qu'un de cette maison fut le premier d'entre
les Bourguignons qui yinrent s'etablir en ces provinces
qui embrassa la foy chretienne.
Plusieurs princes ont reclame le secours de la tres-sainte
Vierge dans leurs cris, comme les dues de Bourgogne, dont
le cry estoit, selon Monstrelet, Georges Chastellain 2 et quelques
herauds, Nostre Dame Bourgogne 3 . Les dues de Bourbon
de la maison royale crioient Bourbon nostre dame, ainsi que
nous apprenons de Jean Dorronville, qui a ecrit 1'histoire et
la vie de Louys, troisieme due de Bourbon 3 . Les comtes de
Foix avoient pour cry de guerre: Nostre Dame Bieme ou
Beam*. La maison de Vergy ces mots : Vergy a Nostre Dame*.
Froissart fait mention de plusieurs seigneurs qui crioient
Nostre Dame dans les combats. Le comte d'Auxerre crioit
Nostre Dame Auxerre *: le connetable du Guesclin, Nostre
Dame Guesclin 7 : le comte de Sancerre, Nostre Dame Sancere
8 : le roy de Portugal, Nostre Dame Portugal 3 : le due
de Gueldres, Nostre Dame Gueldres I0 : le seigneur de Coucy,
Notre Dame au Seigneur de Coucy " : le comte de Henault,
dans Monstrelet l2 , crie Nostre Dame Hainault: memes les
rois de France, suivant I'autorit6 d'une chronique manuscrite
qui finit au regne de Charles VI l3 , laquelle dit que le
roy Philippe-Auguste a la bataille de Bovines cria, Nostre
Dame S. Denys Montjoie.
Les papes avoient aussi leur cry de guerre, aussi bien que
les princes seculiers, et crioient, suivant les Provinciaux '*,
Nostre Dame S. Pierre, invoquans particulierement outre la
sainte Vierge. le prince des apdtres, que Jesus-Christ a etabli
chef de son Eglise, dont ils tiennent la place, en 1'honneur
duquel ils font des chevaliers appellez chevaliers de S. Pierre
IS , et conferent ce degre de chevalier a 1'Empereur meme,
lorsqu'il vient a Rome pour s'y faire couronner. Gautier,
comte de Brienne, estant au royaume de Naples pour poursuivre
les droits de sa femme, scavoir la principaut6 de
Tarente et le comte de Liches, qui lui avoient este confirmez
par le pape Innocent III l6 , et ayant este etabli bail et regent
du royaume durant la minorite de Frederic, se preparant au
combat contre Diepold, lieutenant general des armees de
1'Empereur, en presence du legat apostolique, cria S. Pierre;
confortatus in Domino, disent les actes de ce pape, « prosiliit
« ad arma cum suis, et benedictione ac remissione a legato
« recepta, cum idem legatus maledixisset hostibus, in nomi-
« ne Domini, comes alta voce sanctum Petrum invocans
« adjutorem, processit ad pugnam. » Brunon en ses livres
de la Guerre de Saxe " asseure encore que les Saxons de son
temps crioient dans les combats Saint Pierre: « Ibi quidam
« de nostris adversarium sibi videns obvium, velut suum
« salutavit socium, dicens Sancte Petre, quod nomen Saxo-
0. — 4. Provinc. — 5. Hist, de la Maison de
Vergy, 1. 1, c. 3. — 6. Froiss. vol. 1, c. 222. — 7. Vol. 1, c. 222, 245, 312. —
8. Vol. 3, c. 9. — 9. Vol. 3, c. 15. — 10. Vol. 3, c. 119. — 11. Vol. 4, c. 74. —
12. Vol. 1, c. 47. — 13. Chr. ms. en la Bib. de M. de Mes. — 14. Provincial, ms.
— 15. Cer. Rom. 1. 1, p. 56, 76. — 16. Gesta Inn. Ill, PP. p. 23. — 17. Bruno, de
Bello Saxon, p. 137, to. 1 Rer. Germ. Freheri. — 18. L. 1, c. 11. — 19.01. Hemer.
de Acad. Paris. 1. 2, p. 30. — 20. L. 12, p. 849. a. 1119.