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LA POPULATION BERBÈRE AU MAROC 289
on apprend que quelque temps auparavant tous les. pro
priétaires de Juifs, après entente, se sont conduits de
cette cruelle façon. Bref, rien au monde ne protège un
Israélite du Beled es-Sîba contre son Sîd.
La dépendance du Juif est tellement accentuée, qu'il
peut bien accomplir les voyages nécessaires à ses affai
res,
mais qu'il doit laisser les membres de sa famille
comme otages au lieu où il demeure. S'il veut marier sa
sœur au dehors, il faut d'abord qu'il la rachète en
quelque sorte au Sîd contre une somme d'argent. Un
Juif obtient rarement la liberté, et seulement lorsqu'il a
été assez sage pour placer sa fortune hors de la portée
de son Sîd,
en un point du Beled el-Makhzin. Alors son
maître lui permet de se racheter pour une somme
énorme.
Souvent aussi le Juif réussit à fuir son domicile avec
les siens et à se mettre à l'abri dans le Beled el-Makhzin
ou dans une autre Kabîla ; mais c'est là une tentative
très risquée, dont il paie l'insuccès de sa vie. Naturelle
ment ni lui, ni ses parents,
ne peuvent plus jamais
s'aventurer dans le pays qu'ils ont quitté. Il est arrivé
que des enfants ou des petits-enfants de Juifs qui
s'étaient ainsi échappés, ont été saisis et réintégrés dans
l'ancienne situation de servage.
Dans les tribus dont l'organisation est complètement
démocratique (par exemple chez les Aït Atta), chaque
Israélite a son Sîd ; chez ces tribus gouvernées par un
cheikh absolu, tous les Juifs sont la propriété du chef
de la tribu. Dans les localités que gouverne un cheikh
aux pouvoirs limités, tout Juif doit payer à celui-ci un
tribut annuel et ne peut s'éloigner sans s'être racheté à
lui. Mais il n'en est pas moins la propriété d'un Sîd
particulier qui a sur lui les droits habituels (1).
Pour l'honneur de l'humanité, il faut cependant décla
rer qu'en général les Juifs sont traités par leurs Sîds
(1) Cf. Foucauld, p. 398, s. q.
Revueafricaine, ib'année. m»* SS4©.»4r (3e et 4e Trimestres 19021. 20